Critique : La syndicaliste

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La syndicaliste

France : 2022
Titre original : –
Réalisation : Jean-Paul Salomé
Scénario : Jean-Paul Salomé, Fadette Drouard d’après le livre de Caroline Michel-Aguirre
Interprètes : Isabelle Huppert, Marina Foïs, Yvan Attal, Grégory Gadebois, François-Xavier Demaison, Pierre Deladonchamps
Distribution : Le Pacte
Durée : 2h01
Genre : Drame, Thriller
Date de sortie : 1er mars 2023

3/5

C’est à l’Université que Jean-Paul Salomé a fait des études de cinéma, à la Sorbonne pour être plus précis. Après avoir été assistant dans le tournage de films, en particulier auprès de Claude Lelouch, c’est pour la télévision qu’il a réalisé son premier long métrage, en 1991, avant de réaliser en 1993 Les braqueuses, son premier long métrage de cinéma. A la lecture de « La syndicaliste », le livre de Caroline Michel-Aguirre consacré à l’histoire de Maureen Kearney, il a eu l’intuition qu’il y avait là la matière d’un film.

Synopsis : Un matin, Maureen Kearney est violemment agressée chez Elle. Elle travaillait sur un dossier sensible dans le secteur nucléaire français et subissait de violentes pressions politiques. Les enquêteurs ne retrouvent aucune trace des agresseurs… est-elle victime ou coupable de dénonciation mensongère ?

Une lanceuse d’alerte en danger

Etre responsable n°1 d’un syndicat dans une grande entreprise française comme AREVA et devenir lanceuse d’alerte dans une sombre histoire impliquant le PDG d’EDF, les politiques et les chinois peut s’avérer extrêmement dangereux. Maureen Kearney est bien placée pour le savoir : cette irlandaise d’origine, employée par AREVA pour enseigner l’anglais aux cadres de l’entreprise, était devenue secrétaire du Comité Central d’Entreprise de ce géant européen du nucléaire et elle entretenait d’excellents rapports avec Anne Lauvergeon, la présidente du directoire d’AREVA. Il pouvait lui arriver d’aller jusqu’en Hongrie afin d’obtenir que, dans un pays aux lois sociales très limitées, soient versées des indemnités de licenciement à des femmes licenciées. Tout allait bien pour elle jusqu’au jour où elle a appris qu’était en train de se tramer un arrangement entre EDF et l’électricien chinois CGNPC qui aurait comme conséquence la perte de nombreux emplois parmi le personnel français. Pas question pour elle de ne pas réagir.

Sauf qu’Anne Lauvergeon a été remplacée par Luc Oursel, un homme qui n’a pas l’étoffe pour occuper le poste de président du directoire et dont le tempérament sanguin atteint des sommets, sauf que Maureen Kearney n’est pas ingénieure et qu’elle est souvent prise de haut par son environnement, sauf que les hommes politiques à qui elle fait part de ses craintes se contentent de temporiser, sauf que, en décembre 2012, le jour même où elle avait rendez-vous avec François Hollande, Président de la République depuis quelques mois, on la retrouve chez elle, bâillonnée, ligotée avec du scotch sur une chaise, le ventre tailladé en forme de A par un couteau qu’on retrouve enfoncé dans le vagin. Tout porte à croire qu’elle a fait l’objet d’une tentative d’intimidation, d’un très sérieux avertissement. Toutefois, cette « impression » n’est pas partagée par la gendarmerie chargée de l’enquête qui, suivie par la justice, y voit plutôt une mise en scène montée par Maureen seule ou aidée par Gilles, son mari. Et, après tout, peut-être est-ce là que se situe la vérité ? Une syndicaliste qui devient lanceuse d’alerte, ses rapports avec le monde politique, une agression à moins que ce soit une mise en scène, une enquête menée par la gendarmerie, un premier procès, un deuxième procès, tout est là pour la réalisation d’un thriller politique !

Un peu décevant

Il arrive de temps en temps qu’une authentique affaire soit utilisée comme scénario d’un film de cinéma avec l’utilisation des véritables noms des protagonistes. La syndicaliste n’est pas un film « inspiré d’une histoire vraie », c’est un film qui donne sa version d’une histoire qui s’est vraiment passée il y a une dizaine d’années et ses protagonistes, Maureen Kearney, Anne Lauvergeon, Luc Oursel, Arnaud Montebourg, Henri Proglio, François Hollande apparaissent sous les traits de comédiennes et de comédiens, ou sont évoqués nommément. Le réalisateur a cherché à être le plus fidèle possible à la réalité, allant jusqu’à tourner dans les décors de cette réalité, Bercy, l’hôpital de Rambouillet, le tribunal de Versailles où, de surcroît, des anciens d’AREVA, présents lors du procès, ont fait de la figuration en tenue syndicale.

Pourquoi, dans ces conditions, alors qu’il y avait tout pour faire un film tenant le spectateur en haleine du début jusqu’à la fin, pourquoi La syndicaliste apparaît-il finalement comme étant un peu décevant ? Principalement pour une question de rythme, que ce soit au niveau de la mise en scène, qui apparaît paresseuse par moment, ou, surtout, à celui du montage ! Le film dure 2 heures, c’est sans doute trop long et des scènes auraient mérité d’être raccourcies. Par contre, il serait injuste de mettre en cause la distribution dans cette (petite) déception, avec Isabelle Hupert dans un de ses meilleurs rôles, celui de Maureen Kearney, Marina Foïs, très sobre, très juste dans le rôle d’Anne Lauvergeon, Yvan Attal, convaincant en Luc Oursel insupportable, Grégory Gadebois excellent en mari discret, mais solide dans la tempête, Pierre Deladonchamps très crédible en enquêteur soupçonneux et sûr de son fait.

Conclusion

L’histoire qui s’est réellement déroulée il y a une dizaine d’années avait tous les ingrédients pour donner naissance à un grand film à la frontière entre le politique, le social et le thriller. De plus, le moment était bien choisi, avec l’accent positif que le projet concernant la retraite a mis sur le rôle des syndicats. Dire que Jean-Paul Salomé a raté son sujet serait mentir mais il parait honnête de dire que davantage d’implication dans la mise en scène et un montage plus nerveux auraient indéniablement permis de tirer le film vers le haut.

1 COMMENTAIRE

  1. En désaccord avec le critique qui manifestement considère à priori ce film comme un thriller et par conséquent veut un montage nerveux et rythmé. Ce film qui a la dilmension d’un thriller n’en est pas un. Il a aussi d’autres dimensions qui passent par une mise en forme et un montage plus aléatoires. Il s’agit avant tout d’une aventure humaine;

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