Critique Express : Dealer

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Dealer

Belgique : 2021
Titre original : –
Réalisation : Jeroen Perceval
Scénario : Jeroen Perceval
Interprètes : Sverre Rous, Ben Segers, Veerle Baetens, Bart Hollanders
Distribution : Eurozoom
Durée : 1h44
Genre : drame
Date de sortie : 9 novembre 2022

3/5

Synopsis : Johnny 14 ans, deale pour Luca, caïd intraitable. Il rêve d’une vie meilleure, loin de la drogue et des institutions pour mineurs. Il trouve espoir auprès d’un de ses clients, Antony, acteur de renommée internationale, qui est comme un père de substitution. Les deux tentent de donner une nouvelle direction à leur vie qui semble vouée à une impossible rédemption…

Qui peut vraiment aider Johnny ?

Le titre du film annonçant clairement la couleur, ce n’est pas la peine de vous faire un dessin ! Et, en effet, c’est dès le début du film qu’on se retrouve aux côtés de Johnny, un gamin de 14 ans qui deale de la coke à Anvers pour le compte de Luca, un caïd local. Par contre, c’est petit à petit qu’on va découvrir que ce Johnny, bravache et batailleur, a d’autres facettes qui vont amener les spectateurs à ressentir de l’empathie pour lui. En effet, Johnny, ce gamin qui se prend pour un grand et qui ne cesse de vouloir parler d’égal à égal avec les adultes, est surtout un gamin vulnérable dont tout laisse à penser que c’est son environnement qui en a fait ce qu’il est, dans ses actes et dans ses discours. Dans cet environnement, le pion probablement le plus important est, paradoxalement, une absence, celle du père. Ce père, Eva, la mère de Johnny, refuse de lui dire de qui il s’agit, mais, au moins, il a une mère ! Toutefois, celle-ci, une artiste peintre, est particulièrement instable, au point qu’elle va être internée dans un établissement psychiatrique pour psychose.

Du fait de cette instabilité, Johnny a été placé dans un foyer avec autorisation de passer les week-ends avec sa mère, ce qui devient impossible lorsqu’elle est internée. L’autre adulte de l’environnement de Johnny, c’est Luca. Comment Johnny s’est-il retrouvé à « travailler » pour cet homme violent et retors, le problème n’est pas là, il est dans le fait que, même si on le souhaite très fort, il est très difficile de sortir des griffes d’un tel individu. Les choses vont elles changer avec l’arrivée d’Antony dans l’environnement de Johnny ? Acteur quadragénaire de grande renommée, Antony va passer pour Johnny de l’état de client en matière de coke à celui de père de substitution, un rôle qui semble ne pas déplaire au comédien qui accueille de façon favorable le souhait de Johnny de devenir acteur tout en le mettant en garde contre les risques de ce métier et qui va même jusqu’à devenir son tuteur pour lui permettre de passer ses week-ends en dehors du foyer. Toutefois, cet homme à la personnalité borderline peut-il vraiment être la bonne planche de salut pour Johnny ?

Avant ce film, ce qu’on connaissait de Jeroen Perceval, c’était surtout ses prestations d’acteur dans des films comme Bullhead, Borgman ou Les Ardennes. On savait moins qu’il était un des deux scénaristes de Les Ardennes, adaptation d’une pièce de théâtre qu’il avait lui-même écrite. Quant à ses prestations dans le monde du rap sous le nom de kRaMer, seuls les spécialistes du genre devaient être au courant. La réalisation d’un court métrage en 2014 et de quelques clips musicaux l’ont amené presque naturellement à la réalisation de Dealer, son premier long métrage. Un film dont on se demande si les qualités l’emportent sur les défauts ou bien le contraire. De toute façon, il est très probable que les scènes les plus irritantes pour certain.e.s, en particulier des scènes de parties fines assez complaisantes, seront accueillies dans la délectation par d’autres.

Ce film, dont l’atmosphère générale est plutôt sombre, le réalisateur a choisi de l’esthétiser en utilisant à plusieurs reprises des dominantes de couleur, le rouge, souvent, le bleu, parfois. L’esthétiser et, peut-être aussi, donner une signification particulière à certaines scènes, une signification liée à ce que, symboliquement, représentent traditionnellement  ces couleurs : le rouge,  l’amour, la sexualité, la colère et le danger, le bleu, la loyauté, la sincérité et la sérénité. Il a choisi aussi d’adoucir le propos au travers de la relation très touchante entre Johnny et Yousra, une copine du foyer. Johnny et Antony, les deux personnages principaux du film, sont magnifiquement interprétés par Sverre Rous, sans expérience devant une caméra auparavant mais criant de vérité dans ce rôle de gamin qui, sans même s’en rendre compte lui-même, ne cesse d’appeler à l’aide, et Ben Segers, peu connu chez nous car plus souvent présent dans des films pour la télévision que pour des films de cinéma. Dans le rôle d’Eva, c’est avec plaisir qu’on retrouve Veerle Baetens, inoubliable depuis sa prestation dans Alabama Monroe. On est moins convaincu par la façon trop « chargée » dont Bart Hollanders interprète le rôle de Luca. On est aussi peu convaincu par la façon dont Jeroen Perceval termine son film. Pour tout dire, on a vraiment l’impression qu’il ne savait pas très bien comment le terminer, et on arrive difficilement (voir pas du tout !) à comprendre quel était son ultime message.


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