Critique : El bola

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El Bola

Espagne : 2000
Titre original : –
Réalisation : Achero Mañas
Scénario : Achero Mañas
Interprètes : Juan José Ballesta, Pablo Galan, Alberto Jiménez
Distribution : Les films du Whippet
Durée : 1h24
Genre : Drame
Date de reprise : 13 mars 2024
Date de première sortie française : 30 avril 2003

3.5/5

Synopsis : Pablo est un jeune collégien de 12 ans, calme et apparemment sans histoires et attaché à son talisman, une bille d’acier. Mais quels terribles secrets le poussent à éviter la compagnie de ses camarades de classe sauf pour partager avec eux des jeux dangereux ? L’arrivée d’un nouvel élève va bousculer son quotidien sombre. Va-t-il, grâce à lui, échapper aux lourds fardeaux qui pèsent sur ses jeunes épaules ?

Dans le collège de la banlieue de Madrid où il est élève, Pablo semble être un peu à part. Certes, cet élève de 12 ans participe avec certains de ses condisciples  au jeu très dangereux consistant à traverser en courant les voies de chemin de fer, au dernier moment lorsqu’un train arrive, afin d’attraper au vol une bouteille posée entre les rails, mais on sent chez lui le poids d’un secret qui l’empêche de vivre pleinement l’insouciance des enfants de son âge. Et puis, à quoi correspond ce tic qui consiste pour lui à malaxer sans cesse cette bille en acier dont il dit qu’elle est pour lui un talisman ? Un tic qui, d’ailleurs, lui vaut le surnom de El bola, la boulle. Et puis, il y a Mariano, son père, un homme qui tient une quincaillerie de quartier et qui ne cesse de le malmener pour un oui ou pour un non. Lorsque Alfredo, un nouvel élève, arrive dans sa classe, Pablo ressent, sans trop savoir pourquoi, le besoin de s’en rapprocher. Un rapprochement qui va lui permettre de constater qu’il existe des familles dans lesquelles les rapports entre mari et femme, entre père et fils sont aux antipodes de ce qu’il connaît : contrairement à l’emprise que Mariano a sur Aurora, son épouse, en particulier en ce qui concerne sa façon d’éduquer Pablo, il est patent que José et Marisa, le père et la mère d’Alfredo, vivent leur vie de couple et de parents sur un pied d’égalité. Pablo passe de bons moments avec Alfredo et dans la famille de ce dernier, mais ces bons moments, nouveaux pour lui, lui valent des rapports de plus en plus tendus avec son père que, manifestement, il déteste.

Ce n’est toutefois qu’à la 40ème minute du film, c’est-à-dire à son mitan, que va apparaître avec certitude la cruelle vérité. Elle va apparaître aux yeux des spectateurs, elle va apparaître aux yeux de la famille d’Alfredo : Mariano ne se contente pas de malmener son fils, de le houspiller, il le bat, il le tabasse. Mais comment faire pour protéger le gamin, pour lui éviter de futures torgnoles ? Laura, une amie de José et de Marisa qui travaille dans le social, ne cesse de les mettre en garde : il y a des choses que vous ne devez pas faire, car cela pourrait vous valoir de graves ennuis. Par exemple, garder Pablo chez vous sans prévenir ses parents. Tant pis si le père, prévenu, vient alors le chercher ! En fait, tout serait beaucoup plus facile si Pablo racontait aux autorités le comportement de son père envers lui. Facile à dire, plus difficile à obtenir.

El Bola amène les spectateurs à se poser une question importante : que peut-on faire à titre personnel lorsqu’on s’aperçoit que, dans notre entourage, un parent inflige des violences physiques à un ou plusieurs de ses enfants ? Le film date de l’année 2000, l’action se déroule en Espagne, Laura insiste sur l’impérieuse nécessité d’avoir des preuves solides pour faire intervenir les autorités et ajoute que de graves ennuis peuvent être rencontrés par quiconque cherche à protéger un enfant en le gardant chez lui sans prévenir ses parents. 24 ans plus tard, la situation a-t-elle changé ? Etait-elle et est-elle différente en France ? Bien évidemment, le film ne répond pas à ces questions, mais il fait de nous les témoins d’une situation près de laquelle certains d’entre nous, nombreux peut-être, sont déjà passés sans en avoir conscience. De façon discrète, la mort est souvent présente dans le film, avec le décès de Félix, le parrain d’Alfredo, atteint par le Sida, avec une discussion entre Pablo et Alfredo sur ce sujet et elle est appréhendée de façon différente par ses protagonistes, avec ces gamins des quartiers pauvres, ces gamins dont la vie est difficile, qui l’affrontent dans le jeu dangereux qu’ils pratiquent face au train qui passe dans leur quartier alors que Alfredo, qui apprécie la vie épanouie qu’il mène au sein d’une famille aimante, refuse d’y participer, le trouvant totalement stupide.

Sorti à la fin de l’année 2000 en Espagne, El Bola, premier long métrage du comédien Achero Mañas, avait obtenu 4 Goyas en 2001, meilleur film, meilleur scénario original, meilleur nouveau réalisateur et meilleur acteur révélation masculine.  Malgré ce succès espagnol, ce film avait dû attendre 2 ans pour atteindre les écrans français. On peut se féliciter que Les films du Whippet, distributeur spécialisé dans les films jeunes publics, ressorte en salle ce film bouleversant et qui n’a pas pris une ride, qui plus est dans une version restaurée qui met parfaitement en valeur la très belle photographie en format Scope. Si les comédiens et les comédiennes qui interprètent les rôles des adultes ont tous et toutes des jeux d’excellente qualité, ce sont quand même les interprètes de Pablo et de Alfredo qui impressionnent le plus. Qui sont ils et que sont ils devenus ? Agé de 12 ans au moment du tournage, Juan José Ballesta, l’interprète de Pablo, n’était pas totalement novice face à la caméra, ayant déjà participé à des téléfilms et à des publicité. Il a ensuite persévéré dans le métier et c’est ainsi, que dernièrement, il tenait le rôle principal dans Un homme d’action diffusé sur Netflix. Pablo Galán, l’interprète d’Alfredo, n’avait par contre aucune expérience dans le cinéma et il a été choisi parmi 1600 enfants. Lui aussi a continué de travailler comme comédien, en particulier dans la série La famille Serrano.  

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