Test Blu-ray : Faust

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2019

Faust

Espagne : 2000
Titre original : Fausto – El amor de los condenados
Réalisation : Brian Yuzna
Scénario : David Quinn
Acteurs : Mark Frost, Isabel Brook, Andrew Divoff
Éditeur : First International Production
Durée : 1h37
Genre : Fantastique
Date de sortie DVD/BR : 3 juin 2021

Dans le cauchemar urbain du 21ème siècle, la fiancée de John Jaspers est sauvagement assassinée. Profondément meurtri, Jaspers décide de se suicider. Apparaît alors l’étrange Mister M. qui en échange de son âme, lui propose la force et les armes pour la venger…

Le film

Si vous êtes un lecteur régulier des tests rédigés au cœur de la section « Vidéo » de critique-film.fr, vous connaissez l’amour que l’on voue à Brian Yuzna et à son œuvre. Vous savez également l’enthousiasme que l’on développe autour de la sortie en Blu-ray de chacune de ses œuvres. Complètement absente des linéaires Haute-Définition il y a quelques années, la filmographie de Brian Yuzna profite aujourd’hui néanmoins de l’attrait des consommateurs pour les films d’horreur dits « de catalogue » – ces films qui intéressent peu les aficionados de Netflix et de la SVOD en général, et qui de fait se retrouvent aujourd’hui dans la ligne de mire des éditeurs vidéo.

Ainsi, en l’espace de deux/trois ans, la quasi-totalité des films de Brian Yuzna ont finalement vu le jour au format Blu-ray. Sorti en juin sous les couleurs de First International Production, Faust fait donc suite à Rottweiler (sorti le 20 mai), et précède de quelques mois le délirant Beyond Re-Animator, qui est annoncé pour le 18 août.

On ne vous fera pas ici l’offense de vous présenter à nouveau la carrière de Brian Yuzna, pas plus que la place capitale qu’il occupe dans l’Histoire du cinéma d’horreur de la fin du Vingtième Siècle. Tout juste peut-on cependant rappeler que Faust est le tout premier film produit par la Fantastic Factory, société de production espagnole spécialisée dans le cinéma fantastique, créée en 2000 sous l’égide de Filmax et dirigée par Julio Fernandez et Brian Yuzna lui-même. La Fantastic Factory ne produirait que neuf films avant de disparaître en 2007.

Il est également bon de préciser que Faust est l’adaptation d’une série de comics indépendants en noir et blanc signée David Quinn (scénario) et Tim Vigil (dessin), créée en 1987 et publiée de façon irrégulière jusqu’à son quinzième numéro en 2012, qui marquait la conclusion de l’histoire. Connue pour proposer des épisodes de violence graphique assez extrêmes et de nombreuses situations explicitement sexuelles, la série de comics avait été totalement interdite au Canada et en Angleterre. En France, un premier volume de la série avait été publié en 1993 chez Disjoncteur comics (également éditeur de la VF de The Crow), mais le reste de l’histoire était malheureusement resté inédit.

Pour découvrir Faust version Quinn et Vigil, il vous faudra donc vous tourner vers l’import, mais si vous vous laissez tenter, gardez à l’esprit qu’il s’agit d’une série à réserver, comme le veut l’adage, « à un public très averti » : Faust est en effet une histoire extrêmement brutale truffée de sexe hard, mais qui reste sur toute sa durée extrêmement très bien écrite et illustrée. Le scénario du Faust version Brian Yuzna est signé David Quinn lui-même, mais comme vous pouvez vous en douter, de larges concessions ont été faites afin de pouvoir porter le récit sur grand écran. Faust est donc à rapprocher de films tels que Wanted – Choisis ton destin (Timur Bekmambetov, 2008) ou encore Coq de Combat (Pou-Soi Cheang, 2007) dans les rangs de ces films bourrés de qualités au-dessus desquels flotte malheureusement l’ombre d’un récit graphique tellement barré et extrême que toute adaptation semblera forcément très adoucie.

Pour quiconque a lu le comics qu’il adapte, Faust est donc très symptomatique de cet état de fait : il a beau être complètement barré, le film de Brian Yuzna ne parvient jamais réellement à égaler la folie furieuse du comic book d’origine, outrageusement violent et érotique, dans lequel le bon Faust décapitait les méchants par paquets de douze à l’aide des longues griffes d’acier fixées à ses poignets. Vingt ans après sa sortie, Faust a également pris cher du côté des effets spéciaux numériques qui, s’ils ne faisaient déjà pas forcément illusion en 2000, susciteront aujourd’hui surtout quelques rires nerveux et un peu gênés.

Cependant, et comme à son habitude, Brian Yuzna signe avec Faust un film bien à l’ouest, enchainant les péripéties des héros sur un rythme d’enfer afin, semble-t-il, de se concentrer sur les aspects les plus visuels de son travail : mise en scène, esthétique et effets spéciaux. Les scènes gores, déviantes et bien dégueu se succèdent donc avec un imperturbable sérieux, au cœur d’une esthétique baroque très soignée – on décernera une mention spéciale aux maquillages et autres effets spéciaux old school signés Screaming Mad George, et qui pour le coup n’ont quant à eux pas du tout vieilli.

Pour autant, et malgré les défauts évidents du film, le génie et la générosité Yuzna transparaissent dans presque tous les plans, ainsi que son sens aigu du grotesque et du spectacle obscène. Ainsi, on ne pourra s’empêcher d’apprécier le clin d’œil effectué par le cinéaste à son public, notamment lors de cette scène évoquant Society lors de laquelle le cul et les seins d’une femme se mettent à gonfler/fondre… On notera également quelques belles idées de mise en scène, ainsi qu’une caméra globalement très énergique, nous permettant de passer outre les limites du casting.

Dans le rôle principal, Mark Frost apparait en effet malheureusement bien falot, de la même façon qu’Isabel Brook, qui peine à convaincre dans le rôle de la psychiatre victime de mauvais traitements. A leurs côtés, la star de la saga Re-Animator Jeffrey Combs semble endosser un costard un peu trop grand pour lui dans le rôle du lieutenant Dan « Bulldog » Margolies. De fait, les vrais « héros » de Faust seront les deux méchants, incarnés par Mónica Van Campen et surtout Andrew Divoff. Pour ceux qui l’auraient oublié, on avait découvert Andrew Divoff en 1990 dans La créature du cimetière, mais sa carrière dans le cinéma d’horreur exploserait réellement quelques années plus tard grâce à son rôle du Djinn, mauvais génie du film Wishmaster (Robert Kurtzman, 1997), qu’il reprendrait également dans le très amusant Wishmaster 2 (Jack Sholder, 1999).

En deux mots comme en cent, oubliez vos éventuelles réserves et régalez-vous du spectacle de Faust : un film de Brian Yuzna est toujours une expérience mémorable, surtout quand, comme ici, il évoque le meilleur de ces séries B déjantées des années 80, au cœur desquelles scènes de sexe et de violence s’enchaînaient sur fond de hard-rock tonitruant (Machine Head, Sepultura, Soulfly, Coal Chamber, Fear Factory…) et dans une bonne humeur communicative.

Breaking News : nos confrères de Deadline viennent tout juste de révéler que Sony Pictures Television avait acquis les droits de la série de comics Faust, qui devrait être adaptée sous forme de série animée. Matteo Pizzolo (très présent sur Twitter) devrait en écrire le scénario, sous la supervision de David Quinn et Tim Vigil. On ne pouvait pas être plus synchro avec l’actualité !

Le Blu-ray

Le Blu-ray de Faust édité par First International Production nous propose une expérience Home Cinema globalement recommandable. Si le film est malheureusement encodé en 1080i, faisant passer le film d’1h41 dans les salles où il a eu la chance de sortir à une durée d’1h37 (cadencement à 25 images / secondes oblige), l’image est stable et propre. On sent, malgré un piqué un poil doux, un indéniable upgrade HD pour un film qui restait de toute façon jusqu’ici inédit en Blu-ray en France, et uniquement disponible dans une édition DVD sortie en 2001 – et donc quasiment préhistorique. Le master a manifestement été nettoyé (comme l’annonce fièrement le sticker collé sur le boitier), et le rendu Haute-Définition est assez numérique : l’image a sans doute été passée au réducteur de bruit (DNR) afin d’obtenir une image plus « lisse » – ce détail apparaîtra surtout en cas de rétroprojection sur un écran de grande taille. Le boulot d’encodage proposé par FIP rend de fait un bel hommage à la photo nocturne très soignée du film, signée Jacques Haitkin (Shocker, L’ambulance, Maniac cop 3). Côté son, le film nous est proposés en DTS-HD Master Audio 5.1, et uniquement en version française. Le mixage est énergique, porté par une bande son très musclée, qui saura en imposer au spectateur, avec des passages littéralement tonitruants apportant un dynamisme certain à l’ensemble.

Dans la section suppléments, on trouvera une sympathique série d’entretiens avec l’équipe du film (9 minutes), en VO non sous-titrée, mais très aisément compréhensible. Brian Yuzna y reviendra sur la conception du film et sur le label Fantastic Factory, le maquilleur Screaming Mad George reviendra sur les différents effets pratiques réalisés sur le tournage, et les acteurs Mark Frost, Isabel Brook et Jeffrey Combs partageront leur expérience d’un tournage délocalisé en Espagne. On continuera ensuite avec une featurette nous proposant de découvrir quelques images volées sur le tournage (5 minutes), et ainsi d’admirer le maestro Brian Yuzna au travail. Une poignée de bandes-annonces de films déjà sortis ou à venir chez First International Production (Rottweiler, L’enfer des loups, Faust, The night et Fukushima 50) fermera le tour des suppléments.

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