Test Blu-ray : Host

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Host

Royaume-Uni : 2020
Titre original : –
Réalisation : Rob Savage
Scénario : Gemma Hurley, Rob Savage, Jed Shepherd
Acteurs : Haley Bishop, Jemma Moore, Emma Louise Webb
Éditeur : StudioCanal
Genre : Thriller
Durée : 57 minutes
Date de sortie DVD/BR : 7 juillet 2021

Six amis engagent un medium pour une séance de spiritisme sur Zoom pendant le confinement. Très vite, la situation dégénère quand ils réalisent qu’ils ont laissé entrer un esprit maléfique chez eux… Survivront-ils à la nuit ?

Le film

[4/5]

Sorti sur les écrans du monde entier en 2015, le film d’horreur Unfriended avait surpris tout le monde par un parti pris innovant : celui de donner à voir au spectateur l’intégralité de l’intrigue du film par le biais d’un écran d’ordinateur. Devant le succès remporté par le film, plusieurs aspirants-cinéastes s’étaient également lancé dans l’aventure du grand écran en reprenant le même dispositif technique : ce fut le cas pour Searching – Portée disparue et Unfriended : Dark web, tous deux sortis en 2018.

Le « Grand Confinement » mondial de l’année 2020 et la prolifération de réunions, soirées et apéros virtuels ont naturellement contribué à remettre le genre sur le devant de la scène, en France avec Connectés, et au Royaume-Uni avec Host, qui débarque aujourd’hui au format Blu-ray chez StudioCanal. Dérivé d’une courte vidéo tournée par Rob Savage au début du confinement et rapidement devenue virale, Host a la particularité – assez rare – de ne durer que 57 minutes : il rentre donc dans la catégorie des moyens-métrages. On ne peut d’ailleurs que féliciter l’apprenti-cinéaste de ce choix – plutôt que de « gonfler » la durée du film par le biais de péripéties inutiles, il a préféré aller à l’essentiel, et le moins que l’on puisse dire, c’est que son film fonctionne parfaitement ainsi, sa courte durée évitant de toute façon l’ennui de s’installer.

L’autre particularité de Host est d’avoir été proposé, dès l’été 2020, en exclusivité sur Shudder, service de SVOD américain proposant exclusivement des films d’horreur ou assimilés. En France, on l’a en revanche découvert pour la première fois en sélection lors de l’édition 2021 du Festival international du film fantastique de Gérardmer. Tourné pendant le confinement, le film a obligé Rob Savage à diriger ses acteurs à distance : chacun d’entre eux a mis en place les caméras et les lumières, et géré lui-même les cascades et effets spéciaux. Le reste est venu par la magie du montage et de la post-production.

J’en entends déjà râler dans le fond, dénigrant Host sous le fallacieux prétexte que ce n’est pas du cinéma, et gna gna gna, et que ce procédé technique n’est finalement qu’un dérivé du found footage, qui a déjà fait assez de mal comme ça au cinéma de genre. On nous opposera également que le fait de voir des acteurs parler à leur webcam dans l’étroitesse de leur salon mal éclairé n’est pas forcément la conception que l’on se fait d’un divertissement idéal. Ces arguments sont en partie recevables, on les conçoit du moins complètement. Mais le fait de se démener ainsi afin de mener son projet à bien n’est-il pas le signe d’une obstination remarquable à mettre au crédit du réalisateur Rob Savage ? La volonté acharnée de ce cinéaste indépendant nous parait ainsi plus que louable ; en réalité, elle dénote même probablement de beaucoup plus d’ambition que tout ce que – à titre personnel – j’ai pu faire au cours de l’année dernière.

Comme on l’a souligné un peu plus haut, Host s’avère d’une redoutable efficacité, si tant est bien sûr que le dispositif d’un récit uniquement amené par le biais d’un ordinateur ne vous pose pas de problème. On peut sans doute avancer que des quelques films ayant utilisé ce dispositif depuis 2015, Host est probablement le plus convaincant du point de vue technique, mais également du strict point de vue de l’immersion : tout y est présenté en temps réel, les interactions entre les différents personnages sont réalistes, et la sobriété formelle de l’ensemble permet au récit d’installer une ambiance solide, qui ne tardera d’ailleurs pas à devenir véritablement anxiogène, si ce n’est oppressante.

Bien sûr, cette efficacité est probablement liée à la « période » que chacun d’entre nous vient de traverser ; depuis l’année dernière, de très nombreuses personnes à travers le monde – même parmi les plus réfractaires aux nouvelles technologies – se sont mises à utiliser Skype, Zoom, FaceTime, Hangouts ou WhatsApp pour garder un semblant de contact social avec leurs proches. Host débarque donc à un moment où ces technologies apparaissent sans nul doute beaucoup moins comme de simples « gadgets » à destination des jeunes qu’à la sortie de Unfriended en 2015.

Du point de vue du production design et de la mise en scène pure, il y a forcément peu à dire concernant Host, qui correspond aux standards de ce nouveau « format » de cinéma. Prises de vues relativement sombres, pixels, saccades, coupures et autres freeze frames seront donc évidemment à l’ordre du jour ; les « filtres » de type Snapchat s’invitent également à la fête, apparaissant parfois aux moments les plus inopportuns. Là où Host fait fort en revanche, c’est dans son scénario, aussi linéaire qu’implacable, tirant profit de son introduction pour nous livrer, dans sa deuxième moitié, un spectacle vraiment solide et enthousiasmant – tellement réussi dans son genre qu’on en oublierait presque les limites du dispositif technique.

C’est là que se situe la principale différence entre Host et ses prédécesseurs : à la manière d’un excellent épisode de Black mirror par exemple, le film de Rob Savage parvient à dépasser le statut de simple film-concept, et à proposer au spectateur quelque chose de plus vivant et de plus viscéral qu’à l’accoutumée. Si Searching et les deux films de la franchise Unfriended étaient « intéressants », Host parvient quant à lui à faire vivre ses personnages au-delà du dispositif technique – c’est ce qu’on pourrait appeler un tour de force.

Le Blu-ray

[4/5]

Avant toute chose, il nous faut saluer bien bas le pari éditorial que représente pour StudioCanal la sortie en Blu-ray d’un film tel que Host. En effet, le film de Rob Savage est non seulement victime de son concept côté image, mais il ne dure en plus que 57 minutes, ce qui risquerait bien de représenter un petit frein à l’achat pour une poignée de consommateurs. Ils auraient bien tort cela dit ! Car au-delà des limitations techniques liées au procédé de prise de vues utilisé pour le film, le Blu-ray de Host édité par StudioCanal s’avère tout simplement irréprochable, reproduisant avec fidélité l’image d’un film où tout se passe sur l’écran d’un ordinateur : le piqué, la définition et les couleurs ont forcément des hauts et des bas, en fonction des différents formats de captation, mais malgré ces limites propres à la nature même de l’œuvre, l’ensemble est excellent. Côté son, la VF et la VO nous sont proposées dans des mixages DTS-HD Master Audio 2.0, et nous plongent au cœur du film d’une façon modeste mais absolument cohérente vis à vis des partis pris esthétiques développés tout du long du métrage par Rob Savage.

Pas de suppléments, mais comme on l’a déjà écrit à de nombreuses reprises dans la section Blu-ray / DVD, le marché de la vidéo en France étant ce qu’il est, on affiche notre soutien sans faille aux éditeurs ayant eu le courage de se lancer dans cette aventure malgré la conjoncture : on préférera de plus toujours voir débarquer un film horrifique inédit dans une édition vidéo vierge de tout bonus que de ne pas le découvrir du tout !

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