Conclave
États-Unis, Royaume-Uni : 2024
Titre original : –
Réalisation : Edward Berger
Scénario : Peter Straughan
Acteurs : Ralph Fiennes, Stanley Tucci, John Lithgow
Éditeur : M6 Vidéo
Durée : 2h00
Genre : Drame
Date de sortie cinéma : 4 décembre 2024
Date de sortie DVD/BR : 9 avril 2025
Quand le pape décède de façon inattendue et mystérieuse, le cardinal Lawrence se retrouve en charge d’organiser la sélection de son successeur. Alors que les machinations politiques au sein du Vatican s’intensifient, il se rend compte que le défunt leur avait caché un secret qu’il doit découvrir avant qu’un nouveau Pape ne soit choisi. Ce qui va se passer derrière ces murs changera la face du monde…
Le film
[4/5]
Adapté du roman éponyme de Robert Harris, sorti en France en 2017, Conclave a sans aucun doute « bénéficié » d’un dramatique concours de circonstances : la mort en avril dernier du Pape François, qui a créé un regain d’intérêt soudain pour le film d’Edward Berger, ainsi que pour le déroulement toujours un peu mystérieux du conclave. De fait, la sortie en vidéo du film de Berger consacré à l’élection du nouveau berger a coïncidé avec le « vrai » conclave ayant pris place début mai au cœur de la chapelle Sixtine. Il y a d’ailleurs fort à parier pour que les ventes du Blu-ray du film aient été boostées il y a une quinzaine de jours par l’écho que le film entretenait avec l’actualité pontificale, mais une actualité brûlante en chassant une autre, l’élection du pape Léon XIV est aujourd’hui déjà quasiment reléguée aux oubliettes de l’info.
Pour autant, il nous reste ce Conclave, considéré comme l’un des dix meilleurs films de 2024 selon le National Board of Review et l’American Film Institute ; il a également été récompensé par le Golden Globe du meilleur scénario, par quatre BAFTA dont celui du meilleur film, ainsi que par l’Oscar du meilleur scénario adapté. Sans chercher à être cynique ou de mauvais esprit, il y a fort à parier que la moisson de récompenses récoltée par le film eut été supérieure si le décès du Pape François était survenu quelques mois plus tôt. Quoi qu’il en soit, le film demeure instructif, intéressant et assez passionnant dans ses mécaniques narratives, que l’on croirait presque héritées du thriller. Le tout est teinté d’une certaine modernité, de quelques surprises, et d’un final qui sera forcément amené à diviser le public, et ce pour diverses raisons.
Conclave commence pile-poil avec la mort du pape. Après les formalités d’usage, le cardinal Lawrence (Ralph Fiennes) hérite donc de la tâche peu enviable de diriger le Conclave. Guidant les cardinaux tout au long de ce processus séculaire extrêmement secret, il devra composer avec les fortes personnalités et les ambitions variées de ceux qui briguent le rôle, tout en perçant les mystères qui entourent chacun de ces saints hommes. Plusieurs favoris émergent rapidement : le cardinal Tremblay (John Lithgow), décrit comme calculateur et manipulateur, le cardinal Bellini (Stanley Tucci), progressiste, le cardinal Tedesco (Sergio Castellitto), profondément conservateur, et le cardinal Adeyemi (Lucian Msamati), l’outsider de service. Et comme dans tout processus de sélection, d’autres candidats surprenants vont émerger, compliquant une situation déjà complexe…
Une partie de l’intrigue de Conclave tourne autour des recherches du cardinal Lawrence afin de percer les mystères et les questions laissées en suspens par la mort du pape précédent. Cette « enquête » soulève de nombreuses questions, et crée un malaise diffus qui permet à Edward Berger de développer une atmosphère de tension et d’incertitude(s), qu’il maintiendra de main de maître jusqu’aux dernières minutes du métrage. L’intrigue du film tend à mettre en lumière le fait que ces aspirants à la distinction suprême ne sont fondamentalement pas différents de la plupart des hommes, et alors que ce groupe d’hommes séquestrés enchaînent les tours de scrutin, les inévitables machinations politiques se font jour, et les tensions s’intensifient à mesure que les ambitions, les préjugés, les défauts et les faiblesses des hommes sont révélés.
Du côté des acteurs, on ne pourra que saluer l’interprétation de Ralph Fiennes, subtile, complexe et nuancée. A ses côtés, John Lithgow, Stanley Tucci et Sergio Castellitto sont également tout à fait remarquables, mais on notera aussi et surtout la performance d’Isabella Rossellini qui, dans le rôle de Sœur Agnès, démontre tout ce qu’il est possible de faire à l’écran avec un personnage aussi discret. Bien qu’elle n’ait ni voix ni autorité, elle est manifestement intelligente et observatrice, et rien ne semble lui échapper. L’actrice a bien sûr une poignée de lignes de dialogues à son actif, mais la véritable force de son interprétation réside dans ce qu’elle parvient à exprimer – et à transmettre au spectateur – en silence. D’ailleurs, la notion de « silence » est régulièrement exploitée à maintes reprises par la mise en scène d’Edward Berger ; outre la scène d’ouverture du film, rythmée par la respiration de Ralph Fiennes, de nombreuses scènes cruciales du film se déroulent sans le moindre dialogue. De longs silences persistants peuvent également s’installer au cœur de l’intrigue, alors que les personnages cherchent leurs mots ou assimilent ce qu’ils viennent d’entendre, ce qui amplifie encore l’atmosphère claustrophobe et volontiers oppressante de Conclave.
Le Blu-ray
[4/5]
Côté Blu-ray, la galette Haute-Définition de Conclave éditée par M6 Vidéo envoie vraiment du lourd : l’éditeur français semble en effet se faire un point d’honneur à nous fournir en vidéo le meilleur rendu HD possible, et en remet pour l’occasion un nouveau coup dans l’excellence technique. Le Blu-ray du film est tout simplement irréprochable côté image : le spectateur aura de quoi s’extasier, d’autant que la photo de Stéphane Fontaine (Un Prophète), sublimée par un encodage haute définition sans faille, est vraiment superbe. On notera par ailleurs que le piqué ne souffre jamais de la basse lumière. Côté son, les deux mixages audio, proposant la VO et la VF en DTS-HD Master Audio 5.1, font la part belle aux ambiances discrètes et très finement spatialisées, qui parviennent à mettre en valeur les nombreux moments de silence orchestrés par le film. La grande classe !
Dans la section suppléments, on trouvera un intéressant making of (17 minutes) au cœur duquel les acteurs et l’équipe évoqueront les lieux de tournage, leurs personnages et bien sûr le soin apporté aux costumes. L’ensemble est court mais tout à fait informatif !