Test Blu-ray 4K Ultra HD : Bandits, Bandits

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Bandits, Bandits


Royaume-Uni : 1981
Titre original : Time bandits
Réalisateur : Terry Gilliam
Scénario : Terry Gilliam, Michael Palin
Acteurs : Sean Connery, John Cleese, Shelley Duvall
Éditeur : ESC Films
Durée : 1h52
Genre : Comédie, Fantastique
Date de sortie cinéma : 10 mars 1982
Date de sortie BR/4K : 19 novembre 2025

Pendant la nuit, Kevin, un petit garçon anglais, est visité par six nains qui ont dérobé à l’Être Suprême la carte du temps. L’enfant s’engage alors dans un voyage à travers l’histoire : il croisera sur son chemin Napoléon à la bataille de Castiglione ainsi que Robin des Bois dans la forêt de Sherwood, le Titanic…

Le film

[4/5]

Bandits, Bandits n’est pas un film qui se regarde, c’est un film qui se traverse. Comme un rêve fiévreux où des nains chapardeurs dérobent les trésors de l’Histoire pendant que le spectateur, mi-hébété mi-émerveillé, tente de raccrocher les wagons d’un récit qui file à toute allure entre Napoléon, Robin des Bois et un paquebot qui sent le naufrage. Réalisé entre La Vie de Brian (1979) et Le Sens de la vie (1983), Bandits, Bandits est le deuxième long en solo de Terry Gilliam, et déjà, ça sent le soufre, le génie, et les prémices de Brazil (1985), ce chef-d’œuvre kafkaïen qui viendra quelques années plus tard et mettra tout le monde d’accord — ou pas.

Bandits, Bandits s’inscrit dans une époque bénie où les adultes faisaient des films pour enfants sans les prendre pour des abrutis. Le film est un concentré d’humour noir, d’aventures débridées et de visions cauchemardesques, le tout emballé dans un écrin visuel qui ferait passer la saga Harry Potter pour une pub Lidl. Terry Gilliam, fidèle à son goût pour le baroque et le grotesque, compose des tableaux vivants où chaque décor semble avoir été conçu par un taxidermiste sous LSD. Le château de Napoléon, les couloirs du Titanic, les cavernes de l’Être suprême : tout respire l’excès, la folie douce, et une forme de poésie visuelle qui n’a pas pris une ride.

Dans Bandits, Bandits, le jeune Kevin est embarqué dans une odyssée temporelle par une bande de nains qui ont volé la carte du Temps à l’Être suprême. Dit comme ça, on dirait le pitch d’un jeu mobile sponsorisé par Elon Musk, mais le film va bien au-delà de son synopsis délirant. Il interroge la notion de libre arbitre, la place de l’enfant dans un monde d’adultes déglingués, et surtout, il pose une question qui hante encore les forums Reddit : Dieu est-il un bureaucrate mal luné ? Terry Gilliam, avec son humour ravageur, ne répond pas, mais il s’amuse à semer le doute, à travers des séquences qui oscillent entre le burlesque et le métaphysique.

Bandits, Bandits est aussi un film pour enfants qui ose sortir des sentiers balisés du genre. Qui ose montrer des scènes effrayantes, des idées sombres, des personnages ambigus. Qui se permet même de ne pas tout expliquer, ne pas tout résoudre. À une époque où les ligues de vertu dégainent plus vite que leur ombre, difficile d’imaginer un producteur financer un tel projet sans se faire traiter de corrupteur de mineurs. Et pourtant, Bandits, Bandits est un chef-d’œuvre familial, dans la lignée de Dark Crystal (1982), Princess Bride (1987) ou Erik le Viking (1989), réalisé par Terry Jones, autre Monty Python en cavale.

Formellement, Bandits, Bandits est une leçon de cinéma. Le montage, nerveux sans être hystérique, épouse les sautes d’humeur du récit. La photographie, signée Peter Biziou, joue sur les contrastes, les ombres, les lumières tamisées, pour créer une ambiance à la fois féerique et inquiétante. Et la musique de Mike Moran, discrète mais efficace, accompagne les péripéties sans jamais les surligner. Terry Gilliam, en bon ancien cartooniste, sait où poser sa caméra, comment composer ses plans, et surtout, comment faire exister ses personnages dans un monde qui semble vouloir les avaler tout cru.

Et puis il y a les acteurs. Sean Connery en Agamemnon, John Cleese en Robin des Bois, Shelley Duvall en demoiselle en détresse, David Warner en incarnation du Mal : tous semblent s’amuser comme des cochons dans une baignoire. Mention spéciale à Craig Warnock, gamin lunaire et attachant, qui traverse le film avec une gravité inattendue. Son regard, souvent perdu, parfois inquiet, donne à Bandits, Bandits une profondeur émotionnelle qui dépasse le simple divertissement, et en fait un film qui ne ressemble à rien d’autre. Un OVNI cinématographique, un délire maîtrisé, une œuvre qui parle autant aux enfants qu’aux adultes, sans jamais les prendre pour des crétins.

Le coffret Blu-ray 4K Ultra HD

[5/5]

Bandits, Bandits était sorti au format DVD il y a quelques années sous les couleurs de M6 Vidéo, mais le film de Terry Gilliam méritait clairement mieux : c’est aujourd’hui chose faite grâce à ESC Éditions, qui nous propose de redécouvrir le film sur un Blu-ray 4K Ultra HD. Et d’entrée de jeu, cette édition s’impose comme indispensable, notamment en raison de son packaging, qui s’avère un véritable petit bijou propre à faire saliver les collectionneurs. Le boîtier Digipack trois volets avec étui respire le soin et l’amour du bel objet, et le livret « Les Rêves et les enfants d’abord » (32 pages) rédigé par Marc Toullec complète l’ensemble avec élégance. Côté technique, la restauration 4K supervisée par Terry Gilliam himself fait des merveilles : les couleurs sont éclatantes, les textures retrouvent leur grain d’origine, et les effets visuels, parfois rudimentaires, gagnent en lisibilité sans perdre leur charme vintage. Le Dolby Vision et le HDR10 assurent une profondeur d’image remarquable, notamment dans les scènes nocturnes ou les décors baroques. Le son n’est pas en reste : les mixages VF et VO en DTS-HD Master Audio 2.0 sont clairs, équilibrés, et respectueux du matériau d’origine. La VO est également proposée en DTS-HD Master Audio 5.1, et offre une spatialisation fine, mettant en valeur les dialogues et les ambiances sonores sans jamais sombrer dans le brouhaha. La VF, bien que très correcte, souffre en comparaison d’un léger manque de dynamique, mais rien de rédhibitoire. En somme, une édition Blu-ray 4K Ultra HD qui rend justice au film, sans trahir son esprit ni ses imperfections.

Côté suppléments, ESC Éditions ne fait pas les choses à moitié. On commencera donc en se régalant d’un commentaire audio de Terry Gilliam, Michael Palin, John Cleese, David Warner et Craig Warnock, enregistré en 1997 dans une ambiance bon enfant, entre anecdotes de tournage, souvenirs émus et vannes à la sauce Monty Python. On continuera ensuite le tour des suppléments avec une présentation du film par Emmanuel Raspiengeas (30 minutes), qui remettra le film dans son contexte de tournage et au cœur de la carrière de Terry Gilliam. On enchaînera ensuite avec la section « Entretiens récents », qui nous permettra tout d’abord de découvrir un entretien avec le co-scénariste / réalisateur Terry Gilliam (20 minutes). Il nous expliquera comment ce film a vu le jour, de son propre aveu « à cause de son incapacité à concrétiser son projet Brazil ». Il reviendra sur le choix de Craig Warnock, sur les Monty Python qui apparaissent dans le film, sur l’équipe du film, sur l’insistance du producteur Denis O’Brien pour inclure des chansons de George Harrison, avec une anecdote très amusante sur la chanson du générique de fin. Il abordera également la manière astucieuse dont il est parvenu à conserver la fin du film.

On poursuivra avec un entretien avec le co-scénariste / acteur Michael Palin (16 minutes), qui reviendra sur la question de savoir si ce film était considéré comme un film des Monty Python ou un film de Gilliam, sur le succès du film aux États-Unis, ainsi que sur le choix de David Warner pour incarner le Mal. On embrayera d’ailleurs avec un entretien avec l’acteur David Warner (9 minutes), qui sera suivi d’un entretien avec le superviseur des effets spéciaux Kent Houston (15 minutes), qui expliquera en détail comment les effets optiques du film ont été réalisés. Comme il parle sans images pour illustrer ses propos, on pourra avoir un peu de mal à le suivre. On aura également le droit à un entretien avec le chef costumier James Acheson (13 minutes), qui présentera ses croquis des tenues des personnages, les commentant en détail et évoquant son expérience sur le film, ainsi qu’à un entretien avec la chef décoratrice Milly Burns (11 minutes). Elle se remémorera sa rencontre avec Terry Gilliam et expliquera comment optimiser les décors lorsqu’on travaille avec un réalisateur comme lui, qui connaît sa vision avant même la construction des décors et la manière dont il va les filmer, pour en tirer pleinement parti.

On poursuivra ensuite la section bonus avec une galerie de photos de tournage (11 minutes), ainsi qu’avec un entretien d’archive avec Terry Gilliam et Michael Palin (27 minutes), probablement enregistré aux alentours de 2002. Le sujet prend la forme d’une conversation entre les deux hommes. Terry Gilliam y évoque la frustration initiale l’ayant poussé à réaliser Bandits, Bandits. Les deux hommes évoqueront la question du budget, et les scènes et d’éléments qui durent être abandonnés en cours de route. Ils évoqueront également le succès inattendu du film au box-office américain, alors qu’aucun distributeur n’en voulait au départ. Bref, cette édition Blu-ray 4K Ultra HD de Bandits, Bandits mérite sa place sur votre étagère, entre Brazil et Le Sens de la vie, avec une petite place pour les rêves, les enfants, et les nains voleurs de temps.

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