Test Blu-ray 4K Ultra HD : L’Épée sauvage

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L’Épée sauvage

États-Unis : 1982
Titre original : The Sword and the Sorcerer
Réalisation : Albert Pyun
Scénario : Tom Karnowski, Albert Pyun, John V. Stuckmeyer
Acteurs : Lee Horsley, Kathleen Beller, Richard Lynch
Éditeur : Carlotta Films
Durée : 1h39
Genre : Aventures, Heroic Fantasy
Date de sortie cinéma : 28 juillet 1982
Date de sortie DVD/BR : 4 avril 2023

Le tyrannique Lord Cromwell est prêt à tout pour conquérir le royaume d’Ehdan, même à recourir à la magie noire. Avec l’appui du sorcier démoniaque Xusia de Delos, il parvient à anéantir ses ennemis et à neutraliser le roi Richard et sa famille. Seul son fils Talon réussit à échapper au massacre. Onze ans plus tard, le jeune homme, devenu un guerrier redoutable, est de retour au royaume où un complot contre Cromwell se prépare…

Le film

[4/5]

En 35 ans de carrière et plus de 50 films, Albert Pyun (1953-2022) n’a jamais réellement connu d’égards de la part des médias ; au contraire, pendant de nombreuses années, ce cinéaste américain d’origine Hawaïenne fut régulièrement la cible des quolibets et autres sous-entendus dénigrant régulièrement son talent de metteur en scène. Heureusement, l’avènement de l’ère du « Bis » au début des années 2000 a permis à Albert Pyun de bénéficier, pendant les dernières années de sa vie, d’une communauté de plusieurs milliers de fans à travers le monde, qu’il informait généreusement de l’avancée de ses projets par l’intermédiaire des réseaux sociaux.

Souvent considéré comme un franc-tireur au sein du cinéma de genre indépendant, Albert Pyun fait aujourd’hui l’objet d’un début de réhabilitation en France grâce à Carlotta Films. Prenant le relais de Metropolitan Vidéo, qui avait offert aux cinéphiles la possibilité de revoir quatre films d’Albert Pyun au format Blu-ray en 2017 (Nemesis + Mean Guns, puis Crazy Six + Explosion imminente), l’éditeur français entreprend donc aujourd’hui de nous faire (re)découvrir son premier long-métrage, L’épée sauvage, qui a la particularité notable d’avoir été, avec 36 millions de dollars de recettes aux États-Unis, le film indépendant le plus rentable de l’année 1982. En France, le film serait distribué par Gaumont durant l’été de la même année, et attirerait presque 300.000 curieux dans les salles obscures, ce qui est, à titre de comparaison, beaucoup plus que le Ténèbres de Dario Argento, également sorti en 1982, et qui n’enregistrerait qu’un peu plus de 170.000 entrées. Qu’est-ce qui explique donc que L’épée sauvage soit quant à lui complètement retombé dans l’oubli ?

Hé bien, pour être tout à fait honnête, on ne se l’explique pas réellement, si ce n’est peut-être par le manque d’intérêt des français pour le genre de l’Heroic Fantasy. Beaucoup de films de Sword & Sorcery sortis tout au long des années 80 sont ainsi complètement retombés dans l’oubli de nos jours. Mis à part quelques aficionados, qui se souvient en effet de longs-métrages tels que Voltan le barbare (Terry Marcel, 1980), Bandits bandits (Terry Gilliam, 1981), Le Dragon du lac de feu (Matthew Robbins, 1981), La Dernière licorne (Jules Bass et Arthur Rankin Jr, 1982), Dar l’invincible (Don Coscarelli, 1982), Thor le guerrier (Tonino Ricci, 1983), Yor le chasseur du futur (Antonio Margheriti, 1983), Conquest (Lucio Fulci, 1983), Tygra la glace et le feu (Ralph Bakshi, 1983), Deathstalker (James Sbardaletti, 1983), Le Guerrier et la Sorcière (John C. Broderick, 1984) ou encore L’Épée du vaillant (Stephen Weeks, 1984) ?

Pourtant, à l’époque de sa sortie, L’épée sauvage cartonne aux États-Unis : le succès du film fut d’ailleurs tel qu’il a permis à Albert Pyun d’être associé à plusieurs grands projets de science-fiction dans les années qui suivirent, tels que Spider-Man, Les Maîtres de l’Univers 2 ou encore Total Recall, qui échouerait finalement – et pour notre plus grand bonheur – entre les mains fermes de Paul Verhoeven. L’idée – parfaitement assumée – des producteurs de L’épée sauvage était de griller la priorité à Conan le Barbare, dont la sortie était prévue au mois de mai 1982. Ils y parvinrent d’ailleurs avec brio, puisque le film d’Albert Pyun devancerait finalement celui de John Milius en atteignant les salles de cinéma deux semaines avant son concurrent. Comme dans L’Agence tous risques, le plan s’est déroulé sans accroc en dépit d’une gestation difficile (un cascadeur est mort sur le tournage), et la proximité avec Conan alliée au talent d’Albert Pyun permettant finalement à L’épée sauvage d’atteindre les sommets du box-office.

Visuellement, L’épée sauvage emprunte évidemment beaucoup à Excalibur, réalisé par John Boorman en 1981. On y retrouve le même genre de costumes baroques, et la sublime photo de Joseph Mangine (Neon Maniacs) contribue à faire du film un véritable plaisir pour les yeux. La nature « magique » de l’intrigue du film nous est balancée d’entrée de jeu par une impressionnante scène de nécromancie, et Albert Pyun, habile, met clairement en avant la nature épique de l’expérience, même si les scènes de batailles sont souvent évitées par une pirouette (on pense notamment au gag des mercenaires se préparant à livrer bataille, que l’on retrouve dans un cachot dès la séquence suivante). L’essentiel est là cependant : il y a un héros charismatique, des méchants machiavéliques, des royaumes à conquérir, un prince et une princesse, de la magie ainsi que la présence – honteusement sous-exploitée – d’une impressionnante épée à trois lames capable de lancer deux de ses lames comme si elles étaient projetées depuis une arbalète. Le tout est par ailleurs rempli jusqu’à la gueule d’effets visuels souvent réussis et impressionnants, et d’une poignée de maquillages et d’effets spéciaux très solides.

Inventive et extrêmement bien rythmée, la mise en scène d’Albert Pyun tire vraiment le maximum du budget étriqué du film (1,5 millions de dollars). Le scénario de L’épée sauvage est certes assez linéaire et cousu de fil blanc, mais l’univers proposé par le cinéaste est dense, et aurait probablement mérité d’être élargi à d’autres films ; la séquence finale annonçait d’ailleurs explicitement le retour du prince Talon (alors incarné par Lee Horsley) dans Tales of the Ancient Empire. Le film ne verrait finalement le jour qu’en 2010 grâce à l’obstination d’Albert Pyun. On espère pouvoir un jour le découvrir en France…

Le Blu-ray 4K Ultra HD

[4,5/5]

L’épée sauvage est donc le premier film d’Albert Pyun à voir le jour au format Blu-ray 4K Ultra HD, et on ne pourra que s’avérer conquis par la restauration qui nous est proposée aujourd’hui par Carlotta Films. Le film nous est proposé en HDR10 & Dolby Vision, et le rendu visuel retranscrit parfaitement l’atmosphère et les éclairages que nous ont concocté Albert Pyun et son directeur photo Joseph Mangine. La granulation d’origine a été respectée, le niveau de détail est excellent, les noirs sont profonds, les couleurs naturelles, et les jeux d’ombres et de lumières sont de toute beauté. L’étalonnage Dolby Vision nous offre par ailleurs des contrastes fins et équilibrés et des blancs plus éclatants : un très beau travail. Côté son, le film nous est proposé en VF et VO dans des mixages DTS-HD Master Audio 2.0. L’ensemble est assez propre, avec des dialogues globalement bien découpés et intelligibles. On notera également la présence d’une piste DTS-HD Master Audio 5.1 en VO, qui permettra surtout de donner de l’ampleur et du dynamisme à la musique de David Whitaker, ses grands mouvements orchestraux trouvant une position plus adéquate afin de soutenir l’action.

Du côté des suppléments, Carlotta Films recycle une partie des suppléments de l’édition américaine du film, sortie en 2022 chez Shout Factory. On commencera donc par un passionnant entretien avec Albert Pyun (33 minutes). Après avoir rapidement évoqué son parcours et ses premiers films en Super 8 à Hawaii, le cinéaste reviendra avec une grande honnêteté sur son premier long-métrage, en abordant les bons côtés aussi bien que les mauvais. Il évoquera donc le casting du film, et reviendra sur la personnalité de Richard Lynch et de Lee Horsley, avec qui les choses ne furent pas toujours des plus faciles. Il se lamentera des scènes de nudité totalement gratuites que la production l’a obligé à tourner, et évoquera le décès du cascadeur Jack Tyree ainsi que les pressions qu’il subissait de la part de l’équipe (notamment du directeur photo et du monteur du film), et qui contribuèrent à cultiver une ambiance de merde sur le tournage. On continuera ensuite par un entretien avec le monteur Marshall Harvey (14 minutes), qui ne citera jamais Albert Pyun mais évoquera en revanche ses excellentes relations avec le producteur Brandon Chase, et son implication dans le choix de la musique du film. Les entretiens suivants seront plus axés sur la technique, avec tout d’abord un entretien avec Allan Apone, spécialiste des effets spéciaux (12 minutes), qui reviendra sur son expérience pour le tournage, et notamment sur les effets prosthétiques. Cette interview sera complétée par un entretien avec les frères Chiodo (10 minutes), que l’on connaît surtout aujourd’hui pour leur boulot sur la saga Critters ainsi que sur leur film Les Clowns tueurs venus d’ailleurs (1988). Ces derniers reviendront sur leur boulot sur L’épée sauvage, qui consistait à créer l’étonnant autel constitué de visages humain dans la crypte du sorcier, au début du film. Une des images les plus marquantes du film assurément ! On terminera le tour des suppléments avec deux bandes-annonces et un Spot TV.

On ajoutera par ailleurs que le Blu-ray 4K Ultra HD de L’épée sauvage édité par Carlotta Films est proposé dans un superbe Steelbook aux couleurs du film.

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