Critique : Dernier train pour Busan

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Dernier train pour Busan

Corée du Sud, 2016
Titre original : Bu-san-haeng
Réalisateur : Yeon Sang-ho
Scénario : Yeon Sang-ho
Acteurs : Gong Yoo, Ma Dong-seok, Jeong Yu-mi
Distribution : ARP Sélection
Durée : 1h58
Genre : Horreur / Interdit aux moins de 12 ans
Date de sortie : 17 août 2016

Note : 3,5/5

Même en plein été, alors que les productions américaines trustent l’immense majorité du box-office, il n’est pas courant de voir débouler un film coréen sur des centaines d’écrans en France. Et il est encore plus étonnant de se rendre compte que le film en question est bien apparu sur le radar de spectateurs lambda, qui ne s’intéressent d’habitude qu’à une marchandise filmique joliment formatée. Ce petit miracle, nous le devons à Dernier train pour Busan, qui surfe certes sur la vague des zombies, proliférants depuis quelques années déjà dans tous les médias de divertissement, mais qui le fait avec une efficacité redoutable. L’invasion soudaine de ces créatures féroces y est prétexte à l’analyse astucieuse des réflexes sociaux d’une humanité en pleine détresse, car enfermée dans un décor exigu, assailli de toute part. Le film de Yeon Sang-ho n’atteint pas tout à fait la virtuosité de celui de son compatriote Bong Joon-ho, Snowpiercer Le Transperceneige. Il est néanmoins l’exemple parfait d’un film de genre mené avec vigueur, peu importe son pays d’origine.

Synopsis : Le gestionnaire d’actifs en bourse Seok Woo préfère se consacrer à son travail, plutôt que passer du temps avec sa fille Su-an. Pour son anniversaire, cette dernière voudrait se rendre dans la ville côtière de Busan, afin de voir sa mère dont Seok Woo s’est séparé récemment. Accablé par sa mauvaise conscience, son père accepte finalement de l’y emmener en train tôt le matin. Dès le début du voyage, des événements étranges se passent à bord. Bientôt, les passagers devront se défendre corps et âme contre une invasion de zombies meurtrière.

Zombie apocalypse

Sauve qui peut, les zombies débarquent ! Il n’y a plus rien d’intrinsèquement original à ce phénomène issu du cinéma fantastique, qui consiste à plonger un groupe de personnages dans une lutte effrénée pour la survie, face à une horde de morts-vivants sanguinaires. Par les temps qui courent, où les massacres se sont tragiquement introduits dans notre quotidien réel par voie du terrorisme, ces contes de l’horreur sans fin remplissent pourtant un rôle curieux d’échappatoire, comme s’il était plus récréatif de se soustraire à des bêtes décérébrées qu’à la folie sournoise de cinglés fanatiques. Dans Dernier train pour Busan, cette course contre la montre s’articule de façon classique, sur le mode de l’extermination progressive des protagonistes, jusqu’à ce que seulement les plus coriaces subsistent. Aussi peu révolutionnaire ce principe scénaristique soit-il, la narration l’applique assez sobrement, à l’image des films catastrophes, foncièrement schématiques et en même temps investis d’une mission méchamment cathartique.

Toujours un train d’avance

Le point d’intérêt principal du film, côté fond, est par contre ce qui se passe chez les vivants en sursis. A ce niveau-là, le récit multiplie avec aisance les pistes de réflexion, alors que le chaos se déchaîne sans répit. Après une introduction un peu lente, qui sert toutefois à bien établir les rapports tendus entre le père et sa fille, ainsi qu’à faire régner le calme avant la tempête, l’engrenage musclé d’une mort certaine s’emploie avant tout à détruire méthodiquement les repères sociaux sur lesquels se base la civilisation coréenne, dans le domaine de la solidarité viscérale pas si lointaine de la nôtre. La banalité cordiale et la séparation des classes des voyageurs encore de mise à l’embarquement volent sans tarder en éclats, dès qu’il s’agit de sauver sa peau coûte que coûte. Le comportement des uns et des autres s’affronte alors avec une violence peut-être plus cruelle que l’offensive désordonnée des zombies. Un certain manichéisme n’est pas absent de ce choc des priorités, altruiste d’un côté, égoïste de l’autre, mais c’est notamment le cheminement moral du père, interprété par Gong Yoo, qui permet de mettre en perspective ce qui aurait aisément pu n’être qu’une orgie de violence, haletante mais creuse.

Conclusion

C’est ainsi que nous aimons, non, que nous adorons le cinéma de genre coréen : techniquement sans faille et de surcroît subtilement chargé d’un message sur l’ambiguïté de la nature humaine ! Dernier train pour Busan prouve que les productions américaines ont perdu depuis longtemps le monopole des films d’horreur passionnants et qu’elles sont même en train de se faire voler la vedette par l’Asie, au moins aussi ingénieuse que les Etats-Unis en termes de spectacles tonitruants, avec quelques particularités locales en plus.

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