
L’acteur, réalisateur et producteur américain Robert Redford est décédé le 16 septembre à Sundance dans l’Utah. Il était âgé de 89 ans. L’une des plus grandes vedettes du cinéma hollywoodien des années 1960 aux années ’80, Redford avait en parallèle mené une remarquable carrière de réalisateur. Celle-ci s’était soldée par neuf longs-métrages dont le premier, Des gens comme les autres, avait remporté l’Oscar du Meilleur Film en 1981. Devant la caméra, il avait brillé dans des classiques tels que Butch Cassidy et le Kid et L’Arnaque de George Roy Hill, Nos plus belles années, Les Trois jours du Condor et Out of Africa de Sydney Pollack, ainsi que Les Hommes du président de Alan J. Pakula.

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Comme bon nombre de ses confrères plus ou moins du même âge que lui, tels que Paul Newman, Steve McQueen, Clint Eastwood et Warren Beatty, pour ne citer qu’eux, Robert Redford avait fait ses premiers pas d’acteur à la télévision. Après un tout premier rôle de cinéma dans Le Mal de tuer de Denis Sanders en 1962, il s’impose réellement sur grand écran trois ans plus tard, grâce au coup double de Situation désespérée mais pas sérieuse de Gottfried Reinhardt et surtout Daisy Clover de Robert Mulligan.
Dès lors considéré comme un jeune premier prometteur du cinéma américain, avec ses cheveux blonds et son physique de genre idéal, il enchaîne des productions prestigieuses, telles que La Poursuite impitoyable de Arthur Penn, Propriété interdite de Sydney Pollack, Pieds nus dans le parc de Gene Saks et Butch Cassidy et le Kid de George Roy Hill. C’est principalement le succès commercial de ces deux derniers films qui propulse Redford très tôt au panthéon des acteurs américains.

Pourtant, ses quatre films suivants (La Descente infernale de Michael Ritchie, Willie Boy de Abraham Polonsky, L’Ultime randonnée de Sidney J. Furie et Les Quatre malfrats de Peter Yates) ne suscitent point le même engouement public. Il faudra attendre ses retrouvailles avec son réalisateur attitré Sydney Pollack, d’abord en 1972 sur le western écologique Jeremiah Johnson, puis l’année suivante sur le mélodrame romantique par excellence Nos plus belles années, pour le remettre sur le devant de la scène. Entre-temps, le thriller politique Votez McKay de Michael Ritchie avait d’ores et déjà souligné l’engagement civique de l’acteur.
Les douze prochaines années étaient rythmées pour Robert Redford de films globalement très populaires, encadrés par deux lauréats de l’Oscar suprême du Meilleur Film : L’Arnaque de George Roy Hill en 1974 et Out of Africa de Sydney Pollack en 1986. Il s’agit de l’adaptation de Gatsby le magnifique par Jack Clayton, La Kermesse des aigles de George Roy Hill, Les Trois jours du Condor et Le Cavalier électrique de Sydney Pollack, Les Hommes du président de Alan J. Pakula, Un pont trop loin de Richard Attenborough, Brubaker de Stuart Rosenberg, Le Meilleur de Barry Levinson, ainsi que L’Affaire Chelsea Deardon de Ivan Reitman, sorti en 1986.

Or, l’activité d’acteur de Robert Redford allait progressivement ralentir à partir des années ’80. Pour cela, deux raisons principales que sont ses débuts en tant que réalisateur avec Des gens comme les autres en 1980 et dès l’année suivante la création du Sundance Institute et son Sundance Film Festival qui promeut jusqu’à ce jour le cinéma américain indépendant. En fin de compte, la filmographie de Robert Redford, réalisateur, avait peiné à confirmer l’espoir placé en elle à partir de ce premier coup d’éclat. Néanmoins, ses huits films suivants, jusqu’à Sous surveillance en 2012, faisaient preuve d’une solidité narrative très fiable, tout en soutenant parfois des sujets qui tenaient particulièrement à cœur à leur réalisateur.
Il en va ainsi de Milagro sur la précarité des immigrés latinos au Nouveau-Mexique, Et au milieu coule une rivière et sa famille qui pratique la pêche au Montana, Quiz Show et son scandale d’un jeu télévisé truqué, le mélodrame équestre L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, l’aventure sportive aux accents fantastiques La Légende de Bagger Vance, le thriller militaire Lions et agneaux, le drame historique La Conspiration et donc le thriller médiatique Sous surveillance. Le point commun de la plupart de ces films est sa distribution prestigieuse, puisque la réputation de Redford lui avait permis de faire défiler devant sa caméra entre autres Brad Pitt, Ralph Fiennes, Kristin Scott Thomas, Will Smith, Matt Damon, Meryl Streep, Tom Cruise, Robin Wright et Shia LaBeouf.

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Face à cette nouvelle casquette pleinement assumée, Robert Redford se faisait de plus en plus rare dans des films d’autres réalisateurs. Ses retrouvailles avec Sydney Pollack en 1990 dans Havana avaient même surtout fait parler d’elles à cause de l’âge de l’acteur. Des commentaires aussi cinglants avaient accompagné les sorties de Proposition indécente de Adrian Lyne et Personnel et confidentiel de Jon Avnet, dans lesquels le sexagénaire tentait de séduire respectivement Demi Moore et Michelle Pfeiffer. A partir de Les Experts de Phil Alden Robinson en 1992, Redford s’était focalisé de plus en plus sur des personnages de vieux sages.
Une stratégie qui avait plus ou moins porté ses fruits pendant le quart de siècle à venir. Grâce à ses collaborations avec Rod Lurie (Le Dernier château), Tony Scott (Spy Game Jeu d’espions), Pieter Jan Brugge (L’Enlèvement), Lasse Hallström (Une vie inachevée), J.C. Chandor (All is lost), les frères Russo (Captain America Le Soldat de l’hiver et Avengers Endgame, son dernier film sorti au printemps 2019), Ken Kwapis (Randonneurs amateurs), James Vanderbilt (Truth Le Prix de la vérité), David Lowery (Peter et Elliott le dragon et The Old Man and the Gun) et Ritesh Batra (Nos âmes la nuit).

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Puis, aussi incroyable que cela puisse paraître, Robert Redford avait trouvé le temps de produire une quarantaine de films. En priorité les siens, évidemment, à partir de Milagro en 1988. Mais également en tant que producteur exécutif ou producteur à part entière ceux réalisés par Michael Hoffman (Promised Land et Some Girls), Errol Morris (Le Vent sombre), Michael Apted (le documentaire Incident à Oglala), Edward Burns (Petits mensongens entre frères et Quitte ou double), Walter Salles (Central do Brasil – Ours d’or au Festival de Berlin en 1998 – et Carnets de voyage), Tamara Jenkins (Les Taudis de Beverly Hills), Steven Zaillian (Préjudice), Dan Algrant (Influences), Pamela B. Green (Be Natural L’Histoire cachée d’Alice Guy-Blaché) et Laure De Clermont-Tonnerre (Nevada).

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Robert Redford a été nommé à quatre reprises à l’Oscar : comme Meilleur acteur dans L’Arnaque, dans la catégorie du Meilleur réalisateur pour Des gens comme les autres et Quiz Show et en tant que producteur du Meilleur Film Quiz Show. Il l’avait gagné pour Des gens comme les autres en 1981, en s’imposant notamment face à David Lynch pour Elephant Man et Martin Scorsese pour Raging Bull. Le syndicat des réalisateurs, la Directors Guild of America, l’avait récompensé pour le même film et l’avait nommé également pour Quiz Show. Enfin, Des gens comme les autres avait aussi été victorieux pour le Meilleur réalisateur auprès du National Board of Review. Le seul trophée majeur remporté par Redford pour son travail devant la caméra a été le prix du Meilleur acteur des critiques de New York en 2013 pour son rôle du skipper à la dérive dans All ist lost.
En termes de prix honorifiques, le talent, le travail et l’engagement de Robert Redford ont été reconnus, par ordre chronologique, par la Screen Actors Guild en 1996, un Oscar d’honneur en 2002 reçu des mains de Barbra Streisand, sa partenaire à l’écran dans Nos plus belles années, un Lion d’or au Festival de Venise en 2017 et un César d’honneur en 2019.

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