Critique : The Lunchbox

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The Lunchbox

the lunchbox_2Inde : 2013
Titre original : Dabba
Réalisateur : Ritesh Batra
Scénario : Ritesh Batra
Acteurs : Irrfan Khan, Nimrat Kaur, Nawazuddin Siddiqui
Distribution : Happiness Distribution
Durée : 1 h 42
Genre : Comédie romantique
Date de sortie : 11 décembre 2013

Note : 4,5/5

On sait depuis longtemps que l’Inde est le pays qui produit le plus de films chaque année mais on commet trop souvent l’erreur de coller l’étiquette Bollywood sur tout le cinéma de ce pays. Effectivement, les films du genre Bollywood représentent une part importante de la production indienne mais il y a toujours eu, à côté, un cinéma plus intimiste, plus proche des productions occidentales, avec de très grands réalisateurs comme Guru Dutt, Mrinal Sen et, bien sûr, Satyajit Ray. Lors du dernier Festival de Cannes, un nouveau nom est apparu, Ritesh Batra, avec un premier long métrage qui a enthousiasmé la Croisette, The Lunchbox, présenté à la Semaine de la Critique.

Ila, une jeune femme délaissée par son mari, se met en quatre pour tenter de le reconquérir en lui préparant un savoureux déjeuner. Elle confie ensuite sa lunchbox au gigantesque service de livraison qui dessert toutes les entreprises de Bombay. Le soir, Ila attend de son mari des compliments qui ne viennent pas. En réalité, la Lunchbox a été remise accidentellement à Saajan, un homme solitaire, proche de la retraite. Comprenant qu’une erreur de livraison s’est produite, Ila glisse alors dans la lunchbox un petit mot, dans l’espoir de percer le mystère…

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Une faille dans une organisation parfaite

À Bombay, règne sur les lieux de travail une organisation en principe parfaite qui permet aux employés de se faire livrer leur repas de midi sur leur lieu de travail. Ces repas sont le plus souvent préparés par les épouses, mais aussi, parfois, dans des restaurants de plus ou moins bonne qualité. Les livreurs, les « Dabbawallahs », sont au nombre de 5000. Illettrés, ils utilisent un système à base de couleurs et de codages pour arriver à livrer la bonne « lunchbox » à la bonne personne. Cette organisation a eu tellement d’écho dans le monde que l’Université de Havard a décidé de l’étudier et est arrivée à la conclusion que seulement une « lunchbox » sur un million n’arrivait pas à son destinataire. C’est justement les conséquences d’une de ces erreurs que Ritesh Batra a choisi de nous narrer, en nous présentant la rencontre totalement improbable de Ila et de Isaajan. Ila est une femme mariée, encore jeune, toujours très belle, mère d’une petite fille de 5 ans, et qui cherche à satisfaire un mari plutôt indifférent en lui préparant de bons repas. Isaajan est un veuf qui va bientôt partir la retraite, bougon, désagréable avec tout le monde, au point de tout faire pour éviter de former Shaikh, celui qui doit le remplacer. Un jour où Ila a préparé un plat particulièrement succulent, son mari, lorsqu’il revient à la maison, lui parle d’un repas insipide à base de chou bouilli. Un repas qui provient d’un restaurant et qui était destiné au vieux bougon. Se doutant d’une erreur, Ila décide de mettre un petit mot dans la « lunchbox » du lendemain. Début d’une relation entre Ila et Issajan, une relation tout d’abord épistolaire et qui va profondément bouleverser leur existence et leur comportement.

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Bien plus qu’une simple romance

On pourrait ne voir dans The Lunchbox qu’une romance « à la Capra » ou « à la McCarey ». Ce serait déjà beaucoup mais ce serait aussi commettre la même erreur que celle consistant à ne retenir que l’histoire sentimentale dans Amour défendu ou dans Elle et Lui. En fait, en parallèle avec la relation qui se noue entre Ila et Issajan, Ritesh Batra nous en dit beaucoup sur l’Inde d’aujourd’hui, sur cette organisation exceptionnelle des « Dabbawallahs », sur les conditions de vie des travailleurs, sur les moyens de transport et, surtout, sur la condition des femmes dans ce pays très conservateur. Il nous montre une femme qui sort peu de chez elle, une femme dont la principale distraction consiste à parler cuisine avec une voisine, une femme dont le rêve serait de partir au Boutan. Issajan, en tant qu’homme qui travaille, est bien sûr beaucoup plus libre mais tout n’est pas rose non plus ! Ritesh Batra le montre de façon subtile voire humoristique. C’est ainsi que lorsque Isaajan veut acheter une sépulture, lui qui se plaint d’avoir passé sa vie debout dans le train, dans les bus, il se voit proposer une sépulture … verticale, une sépulture qui prend moins de place dans un pays qui, dans ses cités tentaculaires, en manque cruellement.

Ça ressemble à un petit chef d’œuvre !

En tournant The Lunchbox, il est évident que Ritesh Batra n’a pas cherché à révolutionner l’histoire du cinéma. Il a repris une histoire qu’on connaît bien et qui a déjà donné de nombreux chefs d’œuvre à l’histoire du cinéma, celle qui consiste à mettre face à face deux êtres de sexe différent et que tout sépare et qui vont, petit à petit, cheminer l’un vers l’autre. Le talent de Ritesh Batra réside dans le traitement qu’il fait de cette histoire, en utilisant les particularités de son pays, les religions différentes, les conditions faites aux femmes. Il nous offre au final un film à la fois mélancolique et énergique, un film bourré d’une émotion qui n’est jamais forcée, un film qui agrège avec bonheur des séquences où règne un humour très fin avec la description pleine d’intérêt, mais aussi de surprises, d’un pays au travail. Dès l’écriture de son film, Ritesh Batra avait en tête Irrfan Khan et Nawazuddin Siddiqui pour interpréter les rôles de Isaajan et de Shaikh. Le premier a commencé sa carrière d’acteur avec un petit rôle dans Saalam Bombay ! Il est devenu, depuis, un acteur important dans le cinéma indien et c’est lui qui joue Pi adulte, le narrateur, dans L’Odyssée de Pi. Jusqu’à présent, le second n’était apparu sur nos écrans que dans les 2 volets du film Gangs of Wasseypur. Quant à Nimrat Kaur, c’est avant tout une comédienne de théâtre, choisie à l’issue d’un long casting. En 2012, elle était déjà dans un film présenté à Cannes, dans Peddlers, sélectionné par la Semaine de la Critique.

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Résumé

De temps à temps, arrive sur nos écrans un film venu d’un pays lointain, réalisé par un cinéaste connu des seuls spécialistes pour quelques court-métrages sélectionnés dans de nombreux festivals mais dont c’est le premier long métrage, et dont ressort heureux, non seulement parce qu’on s’est régalé pendant 102 minutes mais aussi parce qu’on pressent que ce réalisateur ne manquera pas de nous apporter d’autres bijoux dans le futur. Ces films, il ne faut surtout pas passer à côté.

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