Critique : La familia

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La familia

Venezuela, Chili, Norvège : 2017
Titre original : –
Réalisation : Gustavo Rondón Córdova
Scénario : Gustavo Rondón Córdova
Interprètes : Giovanny Garcia, Reggie Reyes 
Distribution : Tamasa Diffusion
Durée : 1h22
Genre : Drame
Date de sortie : 10 avril 2019

3.5/5

C’est en tant que premier long métrage de son réalisateur que La familia faisait partie de la sélection de la Semaine de la Critique lors du Festival de Cannes 2017, avant d’obtenir l’ « Abrazo du meilleur film » au Festival de Biarritz Amérique Latine de 2017 . Toutefois, avant ce film, Gustavo Rondón Córdova, réalisateur vénézuélien qui a fait ses études de cinéma à l’Académie du film de Prague, n’était pas un novice en matière de festival, Nostalgia, son 5ème court métrage, ayant figuré dans la sélection officielle de cette catégorie à la Berlinade de 2012.

Synopsis : Pedro, 12 ans, erre avec ses amis dans les rues violentes d’une banlieue ouvrière de Caracas. Quand il blesse gravement un garçon du quartier lors d’un jeu de confrontation, son père, Andrés, le force à prendre la fuite avec lui pour se cacher. Andrés découvre son incapacité à contrôler son fils adolescent mais cette nouvelle situation rapprochera père et fils comme jamais auparavant.

Devenir un véritable père

Une erreur trop souvent commise : commencer à juger un film en cours de projection alors que, bien souvent, il s’avère difficile, voire impossible, de porter un « jugement » définitif lorsqu’on arrive au générique de fin. Alors, pensez donc, au bout de 10 minutes … Les 10 premières minutes de La familia ? Du déjà vu, à plusieurs reprises, et, en plus, du déjà vu qu’on a tendance à repousser : des gamins de 10 -13 ans qui, tout en jouant au base-ball avec des capsules de bière, s’invectivent, se lancent à la figure des insultes sexistes (« fillette ! ») et homophobes (« pédé ! »). Sommes nous en route pour un énième film sur une bande de jeunes mal dans leur peau et qui cherchent à reproduire les pires travers des adultes de leur entourage ? Des adultes dont on voit par ailleurs qu’ils se comportent de façon très lourde (pour ne pas dire plus !) avec les femmes.

Eh bien non ! Heureusement (si l’on peut dire !), très vite, Pedro, le jeune héros du film, âgé d’une douzaine d’années, poignarde mortellement un gamin des favélas qui cherchait à lui voler son portable et le film bifurque vers une toute autre direction : Andrés, le père de Pedro, comprend vite que, pour son fils, le risque d’être l’objet d’une vengeance est très grand et qu’il est hautement souhaitable de le soustraire à la rue de Caracas. Ce père, le plus souvent pris par des petits boulots quand ce n’est pas par ses liaisons avec une ou deux maitresses, ne s’était manifestement jamais réellement occupé de son fils mais là, les circonstances le poussent à introduire Pedro dans son univers quotidien et, ce faisant, à commencer à faire son éducation. Une éducation qui vise avant tout à éloigner Pedro des groupes corrompus ou criminels et à rechercher une forme de rédemption par le travail.

Père et fils dans un pays difficile

La voie vers laquelle s’oriente le film au bout d’une dizaine de minutes s’avère beaucoup plus intéressante que ce que le début du film semblait annoncer : non seulement, il y a ce rapport entre un père et un fils qui s’établit alors que, jusque là, ils se connaissaient très mal, mais il y a aussi, tout ce que le film nous montre concernant un pays, le Venezuela, souvent présent dans les médias mais qui, à part Pelo Malo, désigné meilleur film au Festival de San Sebastien 2013, et Les amants de Caracas, Lion d’or à la Mostra de Venise 2015, a rarement eu les honneurs du grand écran ces dernières années : les petits boulots qu’effectue Andrés, la peinture des relations entre les différentes couches sociales, l’insécurité, les divers trafics et la corruption qui gangrènent le pays et que, malheureusement, la révolution bolivarienne initiée par Hugo Chávez n’a, semble-t-il, pas réussi à éliminer.

Entre les Dardenne et Ken Loach

A l’instar de Il figlio Manuel, film italien sorti il y a plusieurs mois, La familia se situe quelque part entre le néoréalisme italien, le cinéma des frères Dardenne et celui de Ken Loach. Si les comédiens nous sont vraiment inconnus (tout en étant d’une grande véracité dans leur interprétation !), il n’en est pas de même du Directeur de la photographie, Luis Armando Arteaga, présent derrière la caméra sur de nombreux films français et Directeur de la photographie sur Ixcanul, le film guatémaltèque de Jayro Bustamante, sorti il y a 3 ans.

Conclusion

La familia, projeté à Cannes en mai 2017, devait sortir en mars de l’année dernière, sortie qui n’a pas pu avoir lieu, le distributeur de l’époque ayant été mis en liquidation. Heureusement, un autre distributeur, Tamasa Diffusion, a pris le relai et permet au public français, chose rare, de visionner un film qui montre sans manichéisme un pan de la situation qui régnait au Venezuela il y a 2 ou 3 ans et qui n’a probablement guère changé depuis.

https://www.youtube.com/watch?v=WmwsmtyAk58

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