Critique : Jeune bergère

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Jeune bergère

France : 2018
Titre original : –
Réalisation : Delphine Détrie
Interprète : Stéphanie Maubé
Distribution : KMBO
Durée : 1h31
Genre : Documentaire
Date de sortie : 27 février 2019

3/5

Cela fait un peu plus de 20 ans que Delphine Détrie travaille dans le domaine de l’image, soit comme chef opérateur image, soit comme réalisatrice de documentaires et de reportages pour la télévision. C’est lors du tournage d’un reportage pour une émission de TF1 qu’elle a rencontré Stéphanie Maubé, une jeune femme élevant des moutons dans le Cotentin, et, le jour où celle-ci lui a expliqué que tout ce qu’elle avait construit durant plusieurs années risquait de disparaître, elle a eu l’envie de réaliser un long métrage avec elle : Jeune bergère, son premier long métrage !

Synopsis : Stéphanie est une jeune mère célibataire. Parisienne d’origine, elle a tout quitté pour réaliser son rêve et vivre plus près de la nature. Installée en Normandie, au cœur des prés salés du Cotentin, elle se réinvente en apprenant le métier de bergère. À la tête de son troupeau, elle découvre au quotidien les joies et les difficultés de sa nouvelle vie rurale.

Une bergère et ses animaux

« Salut les filles ! » : les premiers mots qu’on entend, au tout début du film ! Des mots que Stéphanie adresse à ses brebis en entrant dans la serre qu’elle a transformée en bergerie. Des mots qui sont le symbole de la relation qu’une bergère peut entretenir avec celles qu’elle qualifie de « collègues de travail ». A l’origine, Stéphanie Maubé se destinait à travailler dans le cinéma. Un week-end en Normandie a transformé sa vie, avec la découverte de l’élevage des moutons dans les prés salés de la côte ouest du Cotentin. Une formation d’un an au lycée agricole de Coutances, quelques stages chez des éleveurs, et la voici qui crée sa propre exploitation au bord d’un des 8 havres de la Côte des havres, celui de Saint-Germain-sur-Ay. A la tête d’un troupeau de 180 brebis et de 8 béliers, elle se réjouit de pouvoir travailler dans la nature, sans chef, avec des tâches différentes d’une saison à l’autre et même d’un jour à l’autre. En résumé, d’avoir donné un sens à sa vie.

La vie de « jeune bergère » n’est pas toujours rose, toutefois. C’est ainsi que la relation avec son compagnon (et père de son fils), qui, dans un premier temps, l’avait suivie en Normandie,  s’est très vite brisée : très parisien, il n’arrivait pas à assumer que les moutons « fassent caca » et qu’il leur arrive de mourir. Et puis il y a les tracasseries de l’administration, les prés salés où paissent les brebis appartenant à l’état, représenté par la Direction départementale des territoires et de la mer, une administration qui reproche à la jeune bergère d’ « être trop petite » mais qui, par ses réglementations, fait tout pour l’empêcher de grossir. Et puis les malveillances dirigées contre elle par certains voisins et que la gendarmerie ne prend pas au sérieux. Et puis les brebis « empruntées » par d’autres éleveurs et qu’elle ne revoit jamais alors qu’elle-même s’efforce d’être fair-play lorsqu’elle retrouve dans son troupeau des animaux qui ne lui appartiennent pas. Et puis, tout bêtement, le fait d’être une femme, et, en plus, de ne pas avoir une origine paysanne. Heureusement, Stéphanie ne manque pas d’idées et, grâce aux diversifications qu’elle a mises en œuvre dans ses activités, elle arrive à sortir la tête de l’eau.

Un film en immersion

C’est sous forme d’une immersion dans la vie de Stéphanie que Delphine Détrie a construit son film : elle même s’occupant de l’image et du son, pas de voix-off et, comme dans une fiction, c’est au spectateur de comprendre petit à petit ce qu’est la vie présente de Stéphanie et comment elle y est arrivée. Une séquence particulière contribue à faciliter cette compréhension : faite de questions  posées par les élèves d’une classe venue visiter le troupeau et la bergère, et de réponses apportées par cette dernière.

La façon de monter le film et les histoires de vol de brebis que nous raconte Stéphanie arrivent à donner un petit côté western à ce beau documentaire. A noter qu’on doit en grande partie ce film à un financement participatif via KissKissBankBank et à la décision de KMBO de distribuer le film en salles.

Conclusion

Il y a plusieurs façons pour le cinéma de s’introduire dans le monde de la paysannerie et, plus particulièrement, celui de l’élevage. En 2017, Hubert Charuel avait choisi la fiction pour Petit paysan, un film qui avait largement dépassé les 300 000 entrées dans l’hexagone. Delphine Détrie, elle, a choisi le documentaire, et on ne peut que souhaiter un succès équivalent à Jeune Bergère, un docu qui s’avère plus passionnant que bien des fictions.

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