Critique Express : Un été comme ça

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Un été comme ça

Canada : 2022
Titre original : –
Réalisation : Denis Côté
Scénario : Denis Côté
Interprètes : Larissa Corriveau, Aude Mathieu, Laure Giappiconi, Samir Guesmi
Distribution : Shellac
Durée : 2h18
Genre : Drame
Date de sortie : 27 juillet 2022

3/5

Synopsis : Invitées en maison de repos pour explorer leurs malaises sexuels, trois jeunes femmes occupent les jours et les nuits à apprivoiser les démons intimes. Sous la supervision tranquille d’une thérapeute allemande et d’un travailleur social bienveillant, le groupe tente de garder un équilibre fragile. Pour la jeune Geisha, la sombre Léonie et l’imprévisible Eugénie, il s’agit pour 26 jours d’éviter les cris, d’apprivoiser les chuchotements du temps présent et de considérer l’avenir.

A vous de voir si vous êtes captivé.e ou irrité.e, ou les deux !

Parmi les gens que vous fréquentez, il est probable que certains, que certaines vous paraissent parfois irritant.e.s dans leur comportement et, parfois, au contraire, profondément attachant.e.s. Pourquoi ce qui est possible s’agissant de personnes ne le serait pas s’agissant d’un film ? Un film qui, par moment, se révèlerait irritant, agaçant, voire insupportable et, un peu plus tard, se montrerait attachant et captivant. C’est exactement l’impression que laisse de Un été comme ça, le nouveau film du canadien Denis Côté. Ce qui irrite le plus dans ce film, c’est sa longueur : 138 minutes, c’est trop long par rapport à la matière à réflexion qu’il fournit aux spectateurs. Ce qui agace, c’est surtout le côté parfois trop maniéré de la mise en scène. Quant à ce qui insupporte de façon un peu trop répétitive, c’est le fait qu’il y a parfois des pans de dialogues qui s’avèrent incompréhensibles pour nous, francophones hexagonaux : face à l’accent canadien qu’on entend chez certaines des comédiennes, par ailleurs toutes excellentes dans leur jeu, un sous-titrage aurait été bienvenu ! Et ce qui est attachant et/ou captivant dans ce film, me direz vous ? Eh bien, c’est tout simplement, et heureusement, le sujet qu’il aborde : la sexualité et même, pour être plus précis, une forme de sexualité qui peut être considérée comme déviante.

Ce sujet, il l’aborde exclusivement par la parole, ce qui est plutôt rare au cinéma : la parole d’un petit groupe de personnages qui sont réunis pour 26 jours dans un très bel environnement au bord d’un lac. Parmi ces personnages, 3 jeunes femmes à la sexualité « gourmande, aveugle et agressive » : Gaëlle, surnommée Geisha, crane rasé, piercings, travailleuse du sexe ; Léonie, abusée par son père lorsqu’elle était enfant et qui va raconter sans fausse pudeur ses expériences sexuelles dont celle vécue, un jour, avec un groupe d’une quinzaine d’hommes ainsi que les pensées intimes qui la hantent et qu’elle qualifie de dégueulasses ; Eugénie, qui se prête à des pratiques BDSM avec son partenaire. Pour elles, ces 26 jours se dérouleront avec une utilisation très limitée et très surveillée du téléphone et il y aura 24 heures libres à mi-parcours. Pour Mathilde, l’organisatrice de ce « camp de vacances », il est hors de question de parler de maladie à leur sujet et, si elles sont là, c’est pour un cheminement et non pour un traitement. Il s’agit pour elle de les faire exister autrement que par leur rapport au sexe, pour les éveiller à d’autres stimulations. Etant elle-même en fin de grossesse, elle a préféré se mettre en retrait pour ce séjour et elle est remplacée par Octavia, une thérapeute allemande avec qui les rapports sont loin d’être au beau fixe et qui n’est pas exempte de problèmes dans sa vie sentimentale. Et puis aussi, curieusement, la présence d’un homme dans cet environnement féminin : Sami, un éducateur spécialisé de 51 ans, arrivé en 1998 au Canada depuis son Algérie natale et qui, bien sûr, va être convoité par Geisha, Léonie et Aurélie.

On commence à bien connaître le cinéma de Denis Côté et le Festival de Berlin le connait encore mieux que le public français. C’est ainsi que Un été comme ça, quatorzième long métrage du réalisateur canadien, était en compétition à la Berlinade  de 2022, sélectionné pour la 4ème fois par ce Festival. Tout au long du film, sa caméra très fluide effleure les personnages, s’intéressant plus aux visages qu’aux corps. Il ne se permet jamais de juger les comportements de Geisha, de Léonie et d’Eugénie, tel n’est pas son but. C’est à chaque spectateur, à chaque spectatrice, de se positionner par rapport à l’affirmation de Geisha, « Si je veux baiser toute la vie, on s’en fout non, ça fait de mal à personne » tout en remarquant que c’est avant tout un grand besoin de tendresse que Geisha, Léonie et Aurélie cherchent à satisfaire dans leurs pratiques sexuelles.  

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