Critique Express : Nitram

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Nitram

Australie : 2020
Titre original : –
Réalisation : Justin Kurzel
Scénario : Shaun Grant
Interprètes : Caleb Landry Jones, Essie Davis, Judy Davis
Distribution : Ad Vitam
Durée : 1h50
Genre : Drame, Thriller
Date de sortie : 11 mai 2022

2.5/5

Synopsis : En Australie dans le milieu des années 90, Nitram vit chez ses parents, où le temps s’écoule entre solitude et frustration. Alors qu’il propose ses services comme jardinier, il rencontre Helen, une héritière marginale qui vit seule avec ses animaux. Ensemble, ils se construisent une vie à part. Quand Helen disparaît tragiquement, la colère et la solitude de Nitram ressurgissent. Commence alors une longue descente qui va le mener au pire.


Un film anti armes à feu

Nitram, nom anacyclique de Martin, mais aussi une référence aux lentes, c’est ainsi que Martin Bryant est communément appelé depuis longtemps. Quand il apparait au début du film, on est en 1979, c’est un jeune gamin, il est à l’hôpital suite à des brulures causées par des pétards et il affirme qu’il recommencera. Quand on le retrouve des années plus tard, c’est un jeune homme solitaire qui vit chez ses parents avec qui la communication est loin d’être au beau fixe. Quelque peu déséquilibré, son passe-temps préféré réside dans la manipulation d’engins pyrotechniques.  Alors qu’il recherche dans le quartier où il habite des voisins acceptant de l’engager pour tondre leurs pelouses, il fait la connaissance d’Helen, une ancienne comédienne beaucoup plus âgée que lui, une riche héritière  qui vit dans une grande maison, entourée de ses chiens. Des liens très forts se tissent entre ces deux personnages aussi atypiques l’un que l’autre, Helen payant une voiture à Nitram, l’accueillant chez elle et allant même jusqu’à faire de lui son héritier.Que peut-il se passer dans la tête d’un tel individu à la disparition de la seule personne avec qui il avait pu tisser des liens solides ?

« D’après une histoire vraie qui a bouleversé l’Australie », nous annonce-t-on dès le début du film. Cette histoire vraie, c’est la tuerie de Port-Arthur, une fusillade qui s’est déroulée le 28 avril 1996 et qui fit 35 morts et 23 blessés. A l’origine de cette fusillade, un homme, Martin Bryant. Alors que, vivant à Los Angeles en 2018, Shaun Grant, le scénariste de Nitram, déjà très choqué au moment des faits, s’est replongé dans les conséquences de cette tuerie dans son pays suite à deux fusillades de masse qui venaient de se dérouler  aux Etats-Unis. A sa grande surprise, il s’est aperçu que, plus de 20 ans après la tuerie de Port-Arthur, la législation australienne concernant les armes à feu s’était relâchée depuis les décisions prises en 1996 suite à cet évènement, que de nombreuses préconisations datant de cette époque n’avaient jamais été appliquées et qu’il y avait en 2018 davantage d’armes à feu en Australie qu’en 1996 !

Pour répondre à la question qu’il se posait depuis 25 ans, « Qui peut bien commettre une chose pareille ? » et pour tenter de faire comprendre à ses concitoyens, et tout particulièrement à ceux qui sont favorables à la liberté de posséder des armes à feu, le danger qu’il y avait à ne pas contrôler davantage la vente des armes, Shaun Grant a considéré que le moyen le plus efficace était de réaliser un film adoptant le point de vue de l’auteur du massacre, un film qui fasse passer du temps auprès d’un personnage dont on comprendrait très vite qu’il ne devrait pas avoir accès à de telles armes.  Comme réalisateur du film, présenté en compétition au dernier Festival de Cannes, on retrouve un « spécialiste » des tueurs frappadingues, Justin Kurzel, dont le premier long-métrage, Les crimes de Snowtown, déjà scénarisé par Shaun Grant et sorti en 2011, s’était emparé de l’histoire de John Bunting, le plus célèbre des tueurs en série australien.

Fort heureusement, le scénariste et le réalisateur ont eu l’intelligence de se contenter d’évoquer la tuerie de Port-Arthur sans nous en infliger la reconstitution à l’écran. Par contre, le film pâtit d’une réalisation trop paresseuse et souffre de la comparaison avec d’autres films sur le sujet des tueries de masse, comme Elephant, de Gus Van Sant, Bowling for Colombine, de Michael Moore, ou le trop peu connu Polytechnique, de Denis Villeneuve. En fait, le vrai gros point fort de Nitram réside dans la prestation de l’interprète du rôle titre, Caleb Landry Jones, un comédien texan qui a dû  beaucoup travailler pour adopter un accent australien qui soit crédible. Cette excellente prestation lui a d’ailleurs valu d’obtenir le Prix d’interprétation masculine lors du dernier Festival de Cannes, en juillet dernier.

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