Critique : Carnage (2ème avis)

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CarnageCarnage

France, Allemagne : 2011
Titre original : Carnage
Réalisateur : Roman Polanski
Scénario : Yasmina Reza
Acteurs : Jodie Foster, Kate Winslet, Christoph Waltz
Distribution : Wild Bunch Distribution
Durée : 1h19
Genre : Drame
Date de sortie : 7 décembre 2011

4/5

Ce dimanche 26 juillet 2015 à 20h50, France 2 propose de découvrir ce huis-clos verbal à la mise en scène enlevée, dirigée par un maître du cinéma qui s’approprie la pièce de Yasmina Reza qu’il a adaptée avec l’auteur. Une fois encore, il s’attache à nouveau à dépeindre la violence des rapports humains avec une ironie cinglante.

Synopsis : Dans un jardin public, deux enfants de 11 ans se bagarrent et se blessent. Les parents de la « victime » demandent à s’expliquer avec les parents du « coupable ». Rapidement, les échanges cordiaux cèdent le pas à l’affrontement. Où s’arrêtera le carnage ?

Carnage

Avoir le dernier mot…

Du côté « victime » : Jodie Foster, libraire et qui s’essaie péniblement à l’écriture et son mari John C.Reilly, quincaillier, de l’autre Christoph Waltz, avocat pour une entreprise pharmaceutique et son épouse Kate Winslet. Les quatre comédiens montrent une variété de styles dans leurs jeux respectifs. Effacés, agressifs, passifs, violents, énervés, rieurs, colériques, ils passent par tous ces sentiments sans que l’on ressente une dimension de performance d’acteurs. On croit à la rigidité de Jodie Foster, à la retenue fausse de John C.Reilly, à l’ironie cinglante de Waltz et à la folie contenue de Kate Winslet. Chacun pouvant adapter les traits de personnalité de l’autre d’un instant à l’autre. Leurs joutes verbales sont extraordinaires avec chaque mot disséqué et pouvant devenir le motif d’une déclaration de guerre.

Le scénario multiplie les faux départs des invités, chacun des participants relançant à tour de rôle le dialogue pour ne pas perdre la face, pour avoir le dernier mot. La surprise vient de cette capacité à clore apparemment les discours mais soudain un mot relance le débat. Les camps se font et se défont au détour d’une phrase, à la surprise des couples. S’ils sont d’abord unis face à l’adversaire, les rapports varient, chacun donnant raison à celui qui semblait son pire ennemi quelques minutes plus tôt à peine. L’opposition entre hommes et femmes n’est pas oubliée, les hommes semblant d’ailleurs plus à l’aise avec leurs métiers respectifs, les femmes étant elles moins satisfaites de leurs vies. Quête d’absolu ou impossibilité de faire avec ce qui ne leur plaît pas ? La réponse n’est pas claire même si les langues des uns et des autres se délient avec force. La volatilité des rapports humains est captée comme rarement. Le dialogue révèle malentendus et mauvaise écoute, aggravée par les quelques intrusions de l’extérieur comme les multiples appels reçus par l’avocat ou ceux de la mère du quincaillier.

Carnage

Roman Polanski, maître de l’espace confiné

Avec ce huis-clos, le réalisateur rappelle qu’il est un maître de l’espace confiné. Grâce aux décors efficaces de Dean Tavoularis, collaborateur fétiche de Francis Ford Coppola (Coup de cœur), on croît à ses quelques pièces comme un lieu de vie. Le soin accordé aux détails de l’appartement et du palier révèle l’art de donner vie à un décor factice de cinéma. La mise en scène coule d’un espace à l’autre, dans un mouvement incessant, où les personnages tentent de masquer leurs comportements puériles par un va-et-vient inutile. Ni foncièrement bons ni totalement mauvais, ils font comme ils peuvent avec leurs aspirations, leurs opinions et la réalité de leurs comportements. Roman Polanski maîtrise ces multiples duels avec un plaisir communicatif. Si l’enfermement est total, il n’est jamais oppressant. La virtuosité de la caméra est grande, sans empiéter sur les échanges imagés. Unité de lieu et de temps, comme dans La Jeune Fille et la Mort, avec un montage s’effectuant sous nos yeux sans que l’on ne ressente les raccords, qui sont d’une grande discrétion.

Carnage reilly foster waltz winslet 01

Conclusion

Le Dieu du Carnage est mis en évidence par un Dieu du cinéma qui s’interroge depuis le début de sa carrière sur la complexité des rapports humains où le pire est toujours possible, même sous l’apparence du Bien. À nouveau un très grand film dont la complexité s’éclairera à chacune vision.

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