Critique : Avec un sourire, la révolution !

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Avec un sourire, la révolution !

France : 2019
Titre original : –
Réalisation : Alexandre Chartrand
Interprètes : Lluis Llach, Sergi López
Distribution : Plátano Films
Durée : 1h37
Genre : Documentaire
Date de sortie :  15 septembre 2021

3/5

Réalisateur en 2004 de La planque, un long métrage de fiction co-dirigé avec Thierry Gendron, le cinéaste et peintre canadien Alexandre Chartrand a ensuite fait de la culture catalane son sujet de prédilection. Après Le peuple interdit, un premier long métrage documentaire consacré en 2016 au combat pour l’indépendance mené dans cette région d’Espagne, il est retourné sur le terrain pour suivre, en 2017, la tentative de référendum sur l’indépendance de la Catalogne.

Synopsis : Quarante ans après la fin de la dictature franquiste, toutes les sphères de la société catalane se mobilisent pour l’organisation d’un référendum d’autodétermination interdit par l’Espagne. Alors qu’ils s’engagent ouvertement dans la désobéissance, les Catalans font face à une répression grandissante, avec le sourire. À leurs côté, Alexandre Chartrand livre son témoignage et son point de vue sur cette page de l’histoire Catalane, Espagnole et Européenne.

L’histoire d’un référendum

Qu’ils soient pour ou contre le fait que la Catalogne accède à l’indépendance, il parait que, en 2017, plus de 80% de ses habitants souhaitaient la tenue d’un référendum d’autodétermination sur ce sujet. Certes, cela pouvait permettre (peut-être !) de trancher la question, mais la réponse du gouvernement espagnol de l’époque fut claire et nette : la constitution espagnole ne permet pas la tenue d’un tel référendum ! Ce refus du pouvoir central n’a pas empêché le gouvernement catalan de se lancer dans l’organisation d’un référendum qui s’est tenu le 1er octobre 2017. Alexandre Chartrand a choisi de nous faire vivre la préparation de cet événement du côté, principalement, de ses organisateurs, ainsi bien sûr, que l’évènement lui-même et ce qui a suivi. L’occasion de rencontrer, entre autres, Carles Puigdemont, alors Président de la généralité de Catalogne, Oriol Junqueras, le vice-président, mais aussi Jordi Cuixart, homme d’affaires et Président de l’association Omnium Cultural et Mireia Boya, députée et leader du groupe parlementaire Candidature d’Unité Populaire. De temps en temps on entend les interventions anti référendum de Mariano Rajoy, le Président du gouvernement espagnol à l’époque des faits. Par ailleurs, deux artistes favorables à l’indépendance interviennent à plusieurs reprises : l’acteur Sergi López et, surtout, Lluis Llach, un chanteur contestataire qui se consacre dorénavant à la politique et qui est l’auteur de la chanson « L’estaca » (Le pieux), composée en 1968 et très vite devenue l’hymne officieux de la résistance catalane au franquisme.

Un film riche sur certains points, beaucoup moins sur d’autres

Il n’est déjà pas toujours facile de se faire sa propre opinion sur des évènements politiques se déroulant dans son propre pays. Il est encore plus difficile de le faire s’agissant d’évènements politiques se déroulant dans un autre pays, fut-il très proche comme l’est l’Espagne pour nous français. Alexandre Chartrand prend la précaution de prévenir dès le début du film : son film reflète le point de vue de son auteur, et ce point de vue québécois est clairement en faveur de l’indépendance de la Catalogne. Si son film est très riche en ce qui concerne les actions et les paroles liées à l’organisation du référendum ainsi que sur les actions policières pour essayer d’empêcher sa tenue et les actions de répression qui ont suivi, on peut regretter qu’il soit si peu bavard sur les motifs politiques, sociaux et économiques qui, d’un côté, sous-tendent le choix de l’indépendance et, de l’autre, sur ceux qui s’y opposent. Vu de France, on comprend, même si le film ne le montre guère, que la période qu’a connue la Catalogne sous la dictature de Franco est encore pour beaucoup dans le ressentiment des catalans envers le pouvoir de Madrid. On peut aussi se montrer surpris de constater ce très fort désir d’indépendance chez de nombreux catalans lorsqu’on se rend compte de la très grande autonomie dont jouit déjà la région Catalogne : un parlement, un gouvernement, un budget, une police, … On est bien loin de ce que vivent les régions françaises en matière d’autonomie ! On peut aussi se demander si, dans ce désir d’indépendance, ne pointe pas un certain égoïsme de la part des catalans : la Catalogne est une des régions les plus prospères d’Espagne et l’indépendance permettrait de ne plus « subventionner » les régions espagnoles beaucoup plus pauvres.

Un format inhabituel pour un documentaire

Pour Avec un sourire, la révolution !, Alexandre Chartrand utilise un format peu pratiqué dans le monde du documentaire : 2.35 : 1. Dans le contexte de l’histoire racontée, avec le décompte des jours qui restent avant la tenue du référendum, on est, avec ce format, avec cette belle qualité de l’image, très proche d’un film de fiction « adapté d’une histoire vraie ». D’autant plus que le réalisateur a habilement fait appel à des flashbacks comme le concert donné 2 mois après la mort de Franco, en janvier 1976, par Lluis Llach, de retour en Catalogne après 5 années d’exil.

Conclusion

Même si on peut regretter le peu d’informations fournies sur les motifs politiques, sociaux et économiques qui, d’un côté, sous-tendent en Catalogne le choix de l’indépendance et, de l’autre, sur ceux qui s’y opposent, on ne peut qu’être intéressé par la façon digne d’un film de fiction dont sont montrées l’organisation du référendum du 1er octobre 2017 ainsi que les actions policières pour essayer d’empêcher sa tenue et les actions de répression qui ont suivi.

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