Critique : Chappie

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Chappie

Etats-Unis, 2015
Titre original : Chappie
Réalisateur : Neill Blomkamp
Scénario : Neill Blomkamp et Terri Tatchell
Acteurs : Sharlto Copley, Dev Patel, Hugh Jackman, Sigourney Weaver
Distribution : Sony Pictures Releasing
Durée : 2h00
Genre : Science-fiction
Date de sortie : 4 mars 2015

Note : 2,5/5

Deux sujets prédominent dans les trois longs-métrages de Neill Blomkamp : les créatures hybrides mi-homme, mi-machine, ainsi que la révolte des bas-fonds contre un ordre social dépourvu de tout terrain d’entente entre la classe dominante et la plèbe. Ces préoccupations constantes sont représentées selon un schéma narratif de moins en moins ingénieux, puisque de District 9 à Chappie, en passant par Elysium, nous ne pouvons nous empêcher de constater un lent effet d’usure formelle et de fatigue. Pire encore, le penchant du réalisateur pour la grandiloquence se trouve de moins en moins maîtrisé ici, alors qu’il nous avait tout de même gratifié dans son film précédent d’un des rôles les plus savoureux de Jodie Foster ces derniers temps. On cherchera en vain pareil morceaux de bravoure dans l’exagération parmi les personnages disparates de ce film-ci. Ces derniers ont plutôt tendance à évoluer en vase clos, tous caricaturaux mais chacun à sa façon guère compatible avec celle des autres, si ce n’est que grâce à l’intervention de la bonté même en la personne de ce bébé-robot.

Synopsis : Dans un avenir proche, l’Afrique du Sud sombre dans la violence. Pour lutter contre une criminalité omniprésente, la police de Johannesburg fait appel aux Scouts, des policiers automatisés qui mènent les opérations les plus périlleuses. Leur créateur, l’ingénieur Deon Wilson, ne veut pas s’arrêter en si bon chemin. Il travaille en privée sur la conception d’une intelligence artificielle, susceptible de rendre les Scouts plus humains. En même temps, son collègue Vincent Moore, un ancien militaire, a mis au point une machine plus martiale, qui ne rencontre point les faveurs des forces de l’ordre. Quand sa supérieure refuse à Deon de soutenir officiellement sa nouvelle découverte, il vole le Scout 22, bon pour la casse, afin de tester sur lui son logiciel révolutionnaire. En chemin, il est enlevé par la bande de Ninja, un gangster malchanceux qui espère débrancher les Scouts grâce à la télécommande supposée de Deon, avant son prochain braquage.

Seul contre tous

Malgré les apparences, Chappie n’est nullement un film pour enfants. L’apprentissage des us et coutumes humains par ce robot d’une nouvelle génération n’a rien de strictement édifiant. Son périple s’apparente en effet au conte tristement poétique du petit garçon dans A.I. Intelligence artificielle de Steven Spielberg. Comme lui, Chappie peine à trouver sa place dans un monde, qui sait tirer avantage de lui, mais qui est trop égoïste et calculateur pour le laisser exister selon ses propres désirs. Ainsi, ce n’est ni la volonté, ni la capacité de s’intégrer de la part de cet individu d’un âge nouveau qui freine son épanouissement, mais les agendas personnels des hommes qu’il croise, sans exception obnubilés par leur propre réussite au détriment du bien-être de leur ami en titane. Seule sa mère de substitution cherche à le cajoler, une attitude protectrice qui dénote, elle aussi, dans le contexte d’un scénario qui ne sait visiblement pas sur quel pied danser.

Plusieurs moumoutes à évincer

Car la cause principale de nos réserves envers ce film survolté se situe du côté d’une multiplication assez superflue des intrigues. Les trois différents théâtres de l’action – le repaire des bandits, la maison de Deon et le hangar de Moore – s’agencent assez mal pour donner un ensemble narratif à la fois clair et engageant. Au fil du temps, le spectateur risque de se sentir aussi écartelé entre ces différents points de vue que Chappie. Contrairement à lui, nous ne faisons pas toujours preuve d’un caractère magnanime, puisque le va-et-vient narratif sans but précis finit par nous lasser, surtout lors de l’affrontement final interminable. Une première possibilité d’améliorer le rythme du récit aurait pu être la suppression pure et simple du personnage interprété par Hugh Jackman, coiffé de surcroît d’une façon particulièrement ringarde. Mais même les autres professeurs improvisés du robot trop naïf pour ce monde sont de piètres exemples de la gente humaine. Accessoirement, ils sont aussi les témoins d’une écriture scénaristique, qui ne vise guère plus haut que des stéréotypes criards et sans profondeur.

Conclusion

Bien que le cinéma de Neill Blomkamp sache assez habilement éviter les sentiers battus de la science-fiction, son regard décalé court sérieusement le risque de tourner en rond au bout de trois films au message quasiment interchangeable. Si les rumeurs sur la collaboration prochaine du réalisateur à l’univers de Alien se concrétisent, nous ne pouvons qu’espérer qu’il abandonnera sa gentillesse parfois enfantine, au profit d’une approche encore plus cruelle et surtout moins complaisante de cette légende du genre.

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