Schirkoa – La Cité des Fables
Inde, France, Allemagne : 2024
Titre original : Schirkoa – In Lies we Trust
Réalisation : Ishan Shukla
Scénario : Ishan Shukla
Acteurs : Tibu Fortes, Golshifteh Farahani, Asia Argento
Éditeur : Blaq Out
Durée : 1h43
Genre : Animation, Science-fiction
Date de sortie cinéma : 1 janvier 2025
Date de sortie DVD/BR : 2 septembre 2025
Schirkoa : une utopie « idéale » où les citoyens portent tous des sacs en papier sur la tête pour effacer toute différence. Tous égaux, tous pareils. Jusqu’au jour où la rumeur d’un pays mythique sans sacs commence à s’étendre…
Le film
[3,5/5]
Schirkoa – La Cité des Fables, c’est un trip dystopique où tout le monde vit ensaché — littéralement, puisque tous les habitants de Schirkoa vivent avec un sac en papier sur la tête. Pas pour une manif écolo ni pour une opération marketing de fast-food, non : ici, c’est pour gommer les différences. Politique, religion, culture ? Trop clivant. Mieux vaut s’ensacher et suivre le triptyque du régime : « Sécurité, Sanité, Sainteté ». Ambiance. Dans cette cité aseptisée, l’anonymat est la norme et penser autrement frôle le blasphème.
Le film d’Ishan Shukla, adapté de son court-métrage Schirkoa (2016), nous plonge dans ce monde aseptisé, où l’anonymat est roi et les émotions demeurent sous scellés. Le héros, 197A (oui, c’est son nom, enfin son numéro), traîne sa cravate rouge et son spleen existentiel jusqu’à croiser une femme tatouée qui ose retirer son sac pour fumer. Rébellion douce, mais rébellion quand même. Et voilà notre homme embarqué dans une quête de sens, entre anomalies, déités cornues et murmures de Konthaqa, cette cité légendaire où les gens vivent à visage découvert. Un rêve, ou une utopie ? L’intrigue de Schirkoa – La Cité des Fables vous le révélera, au prix de nombreux atermoiements dramatiques tantôt bizarres, tantôt poétiques, tantôt franchement incompréhensibles.
Narrativement, Schirkoa – La Cité des Fables n’est en effet pas toujours des plus limpides, et emmène le spectateur dans une espèce de grand huit. On commence dans une ville façon Blade Runner sous Lexomil, et on finira dans des contrées ensoleillées aux accents latino-asiatiques. Entre les deux, ça parle de révolte, de résistance, de différence. On sent confusément qu’Ishan Shukla a mis ses tripes dans son film, et que le message est là, mais il s’avère malheureusement noyé dans une soupe mystico-politique un peu confuse. Les cornes du héros, les figures divines, le barnum festif entourant les Anomalies… on frôle le trop-plein symbolique, et même si on ne pourra en aucun cas reprocher au film de manquer d’idées, on déplore que le scénariste / réalisateur ne soit pas parvenu à canaliser son énergie.
Mais qu’à cela ne tienne : on préférera toujours trop que pas assez, et en dépit de ses excès et/ou de ses égarements narratifs, Schirkoa – La Cité des Fables interroge notre rapport à l’identité, à la conformité, à la peur de l’autre. Et même si le scénario tangue, le film dénote d’une vraie volonté de de bousculer le spectateur, dans le but de le faire réfléchir. Visuellement, le constat est le même : c’est du Unreal Engine, et ça se voit. C’est parfois saisissant, parfois bluffant, occasionnellement très beau, mais l’influence du jeu vidéo se fait sentir : les textures font le yo-yo, les mouvements de caméra hésitent entre cinéma et gameplay, et certains personnages semblent tout droit sortis d’un mod de Cyberpunk 2077.
Mais le moins que l’on puisse dire à la découverte de Schirkoa – La Cité des Fables, c’est que l’ambition est là, palpable, et le film tente vraiment des choses à longueur de bobine. Il ose, il se plante parfois, mais il ose. Slalomant entre la fable politique et le délire mystique, le film d’Ishan Shukla cache une vraie réflexion sur l’identité, la conformité et le droit à la différence derrière les sacs en papier. Et cette audace mérite le coup d’œil.
Le Blu-ray
[4/5]
Le Blu-ray de Schirkoa – La Cité des Fables, disponible depuis quelques jours sous les couleurs de Blaq Out, nous permettra de découvrir l’audacieux film d’animation d’Ishan Shukla dans les meilleures conditions possibles. L’image est de toute beauté, les couleurs sont éclatantes et le niveau de détail ainsi que le piqué ne faiblissent jamais, nous proposant un confort de visionnage vraiment optimal. Côté son, la VO encodée en DTS-HD Master Audio 5.1 est littéralement tonitruante, et pleine d’emphase dans ses effets acoustiques, ce qui sera tout particulièrement notable durant les impressionnantes scènes de fêtes et/ou de foule que nous propose le film. On notera par ailleurs que Blaq Out nous propose également de découvrir le film dans un sobre mixage DTS-HD Master Audio 2.0, plus équilibré si vous regardez le film sur un simple téléviseur et sans utiliser de Home Cinéma.
Du côté de la section suppléments, on commencera par un entretien avec Ishan Shukla (12 minutes), qui reviendra, le visage dissimulé derrière un sac en papier, sur sa trajectoire ainsi que sur la genèse du film. Les propos du cinéastes seront complétés par un making of (16 minutes), ainsi bien entendu que par le court-métrage par lequel tout est arrivé, Schirkoa (2016, 14 minutes). Les complétistes pourront également découvrir le clip de la chanson « Sexodrome » d’Asia Argento feat. Morgan, un projet expérimental également réalisé par Ishan Shukla (4 minutes). Les passionnés d’animation pourront également se régaler de la version animatique du film (VOST anglais, 2h10), qui permet d’en découvrir énormément sur le travail effectué par les équipes de Schirkoa – La Cité des Fables.
