Critique : Carole / Le Venin de la peur

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Carole AFFICHE us 01Le Venin de la peur / Carole

Italie, 2014
Titre original : Una lucertola con la pelle di donna
Réalisateur : Lucio Fulci
Scénario : Lucio Fulci, Roberto Gianviti, Ottavio Jemma, José Luis Martínez Mollá, André Tranché
Acteurs : Florinda Bolkan, Stanley Baker, Jean Sorel
Distribution : –
Durée : 1h41
Genre : Fantastique
Date de sortie : 21 juillet 1976

Note : 3/5

Plusieurs titres français pour ce giallo de Lucio Fulci, l’un des maîtres transalpins du genre : Carole (c’est sobre), Le Venin de la peur (déjà plus imagé) et Les Salopes vont en enfer (plus typé). Qui a tué la voisine de Carol, une superbe blonde pas farouche qui organisait des orgies ? L’enquête va s’avérer tortueuse avec les errements mentaux de Carol qui a vu en rêve le meurtre qui s’est précisément déroulé comme elle l’a raconté à son psychiatre, jusqu’à la présence de deux hippies défoncés aux substances hallucinogènes.

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Synopsis : Mais qui a tué Julia Durer, la voisine suave de Carol, organisatrice de parties fines ? L’inspecteur Corvin enquête, et soupçonne tour à tour Carol, son père Edmund Brighton, son mari Frank et sa belle-fille entre autres suspects…

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Un rythme lancinant

Comme dans beaucoup de films de cette période, le grand problème est le rythme lancinant de l’enquête menée ici par l’inspecteur Corvin (Stanley Baker, délicieusement nonchalant et… siffleur) qui ne semble pas très concerné par son travail même s’il finit par surprendre, à la manière d’un Columbo ou plus précisément d’un Hercule Poirot. D’ailleurs, là encore comme dans beaucoup d’autres giallo (gialli?), l’affaire se résout verbalement avec l’explicitation à l’écran en dialogues explicatifs, façon policier belge d’Agatha Christie d’un mystère qui visait la métaphore et une forme de cérébralité. Le mystère policier est au final raté car tiré par les cheveux, non dans sa résolution mais dans la façon d’y parvenir. Les fausses pistes et les détours du scénario ne sont là que pour embrouiller le spectateur et le perdre dans un récit qui est inutilement compliqué, comme la représentation malhonnête à l’écran de la «relation» entre Carol et le hippie roux qui hante ses jours et ses nuits, reposant sur un twist de scénario presque malin mais, privé d’informations précieuses, le spectateur est manipulé (facilement). Alors qu’il pense partager les cauchemars de l’anti-héroïne jouée par Florinda Bolkan dont la prestation sobre enrichit les faux-semblants complaisants, la réalité est plus terre à terre. Côté opposition entre les bourgeois déviants et les hippies qui vivent librement, cette approche sociale aurait pu être passionnante mais elle n’est hélas qu’anecdotique, ces derniers étant particulièrement ridicules et ridiculisés.

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Un style (relativement) élégant

Heureusement le style de Lucio Fulci possède une certaine élégance, jusque dans ses angles troubles malgré sa propension à être à deux doigts de faire du Jess Franco dans certains zooms (en mieux tout de même). La photo de Luigi Kuveiller est d’une beauté irréelle dans certains séquences dont la scène d’ouverture impressionnante, qui a peut-être inspiré l’un des happenings les plus connus de l’artiste contemporaine Marina Abramovics. Dans d’autres cas, elle se fait plus discrète, presque naturaliste. La caméra occupe les décors avec force comme un personnage omniscient témoin des frasques des uns et des mauvaises idées des autres, captant la mort plus après les meurtres violents (une femme égorgée, retrouvée par la police, glace) plus que pendant, un choix narratif audacieux. L’assassinat n’est révélé que dans un flash-back et non pas vécu par celui qui l’a vécu directement ou en témoin mais commenté par une personne qui explique a posteriori. La performance de Jean Sorel en époux de Carol est comme effacée, notamment dans la façon qu’a son personnage d’affronter la mort d’un proche. La musique d’Ennio Morricone crée un climat plus angoissant et mystérieux que ce que l’on voit à l’écran, preuve du talent de l’un des plus grands compositeurs de musique de film de sa génération, sa partition étant le principal atout de la mise en scène dans sa capacité à créer le trouble. La sensualité promise par les scènes de lesbianisme (raisonnable) déçoit malgré le trouble que dégage brièvement les échanges entre la féline Florinda Bolkan (ou plutôt un lézard, comme dans le titre adopté dans les pays anglophones – Lizard in a woman’s skin – plus proche de son tempérament) et de la superbe blonde Anita Strindberg filmée avec délectation par le chaud Fulci. Carlo Rambaldi (E.T.) signe les effets spéciaux (approximatifs) de la scène dans un laboratoire avec un chien dont les entrailles sont exposées à l’air libre et de chauve-souris.

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Conclusion

Lucio Fulci signe un whodunit classique au potentiel de cauchemar fascinant hélas affaibli par un rythme inégal et un humour qui chasse le potentiel tragique, par exemple lorsque l’inspecteur dit «interrogez tous les rouquins de la ville !», «heureusement qu’on n’est pas en Irlande» lui dit son adjoint. Les amateurs irréductibles de Fulci seront certainement séduits, ceux qui peinent à supporter les déviations dramatiques resteront essentiellement extérieurs à l’ensemble du projet tout en appréciant de réelles qualités d’un auteur intéressant, quoique inégal du genre.

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