Test Blu-ray : Nick Carter va tout casser

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Nick Carter va tout casser

France, Italie : 1964
Réalisation : Henri Decoin
Scénario : Jean Marcillac, André Haguet, André Legrand, Richard Heinz, Robert Braun
Acteurs : Eddie Constantine, Daphné Dayle, Paul Frankeur
Éditeur : Gaumont
Durée : 1h36
Genre : Espionnage
Date de sortie cinéma : 20 juin 1964
Date de sortie DVD/BR : 12 mars 2025

Contacté par un vieil ami de son père, Nick Carter Junior, fils du célèbre détective de New-York, arrive sur la Côte d’Azur. Didier Formenter, scientifique de renom, a fait appel à lui car il craint pour sa vie depuis qu’il a inventé une arme secrète mais déjà très convoitée par divers gangsters. Nick Carter mène l’enquête et va rapidement découvrir qui sont les réels ennemis de l’inventeur…

Le film

[3,5/5]

Si elle fut extrêmement populaire chez nos voisins italiens, allemands et même espagnols, la glorieuse tradition du cinéma « bis » n’a jamais été extrêmement développée à l’intérieur des frontières françaises. Néanmoins, à la faveur de quelques productions internationales (franco-italiennes surtout), et dans l’insouciance pop des années 60, le cinéma français s’est tout de même volontiers laissé aller à quelques titres flirtant volontiers avec le cinéma de genre tendance populaire. Outre les films de cape et d’épée et les romances historiques qui faisaient la joie des cinémas de quartier, on a donc également vu naître en France pendant cette décennie une poignée de films d’espionnage très orientés « action et petites pépées », que l’on pourra greffer à une vague d’œuvrettes tout à fait charmantes que le temps a affectueusement renommé « Euro Spy ».

Sous l’influence couplée des premiers James Bond et des « fumetti » (bandes dessinées populaires italiennes) qui inondaient le marché du divertissement à l’époque, on a donc vu fleurir sur grand écran les aventures – entre autres – de Coplan, d’OSS 117, du Commissaire X, de l’Agent secret 777 ou de F.B.I. 505, des espions au sourire ravageur qui sauvaient le monde dans des films dont les titres développaient volontiers un impact catchy et second degré : Coup de gong à Hong-Kong, Baroud à Beyrouth pour F.B.I. 505<, Karaté à Tanger pour agent Z7 ou encore le célèbre Banco à Bangkok pour OSS 117.

Comme son titre l’indique, Nick Carter va tout casser met en scène le personnage de Nick Carter, créé en 1886 dans une nouvelle de John R. Coryell. Dans les années 1950/60, pour concurrencer James Bond, le personnage, qui était à l’origine un « détective », devient un espion, et plusieurs écrivains, dont Manning Lee Stokes, Michael Avallone et Michael Collins, ont signé des aventures de Nick Carter. Une douzaine de titres de cette série d’espionnage sont parus en France dans la collection « Un mystère » aux Presses de la Cité. La filiation avec James Bond est d’ailleurs d’autant plus claire qu’à l’international, le film d’Henri Decoin a été distribué sous le titre License to Kill, un titre qui serait repris pour la franchise 007 en 1989.

Typique de l’Euro Spy, Nick Carter va tout casser s’appuie sur une intrigue tournant autour d’une arme révolutionnaire de science-fiction, créant une espèce de petit OVNI lumineux et meurtrier, ce dernier étant lancé d’une base secrète cachée dans un col de haute montagne dans les environs de Nice. Le film met également en scène un personnage féminin assez fort en gueule interprété par Daphné Dayle, une actrice dont la carrière au cinéma se limite à trois films d’espionnage aux côtés d’Eddie Constantine, tournés entre 1963 et 1964. Mais le lien avec la franchise 007 ne s’arrête pas à cette seule « James Bond Girl » : en effet, la méchante chinoise du film, interprétée par Mitsouko, jouerait l’année suivante dans Opération Tonnerre, le quatrième film de la série des James Bond.

Bien entendu, le film est porté par l’interprétation d’Eddie Constantine, qui à l’époque tournait encore entre quatre et cinq séries B par an, même si sa popularité commençait légèrement à décliner. Sa composition est à peu près la même que d’habitude : celle d’un espion charmeur et plutôt enclin à la bagarre, calqué sur le modèle des agents du FBI Lemmy Caution et Jeff Gordon, qu’il avait déjà incarné à plusieurs reprises avant Nick Carter va tout casser. Le moins que l’on puisse dire est que l’acteur ne forçait pas son talent, nous livrant une prestation dans la parfaite lignée de ce qu’il était habitué à offrir au public. La recette, éprouvée mais efficace, fonctionnait d’ailleurs parfaitement : le film d’Henri Decoin enregistrerait plus de 1,5 millions d’entrées en France en 1964, ce qui pousserait Eddie Constantine à réendosser le costard soigné de l’espion dès l’année suivante dans Nick Carter et le trèfle rouge.

Formellement, le film s’affiche dans un noir et blanc très soigné, avec une habile utilisation des ombres qui met en valeur les faux-semblants de cette intrigue d’espionnage relativement solide. Le rythme est solide, les scènes d’action relativement nombreuses et le Production Design est désuet mais plein de charme. Nick Carter va tout casser n’est par ailleurs pas exempt d’une certaine dose d’humour et de dérision, que l’on retrouve notamment lors de cette scène durant laquelle Eddie Constantine est ligoté à une chaise avec une bombe entre les jambes, et sa réapparition dans la séquence suivante sans la moindre égratignure. Tout cela concourt à faire du film d’Henri Decoin une série B sans prétention qui se regarde aujourd’hui avec un détachement et un plaisir non feints.

Le Blu-ray

[4/5]

Nick Carter va tout casser est disponible en Blu-ray chez Gaumont depuis le mois de mars, et à pris place, le même jour que Coplan prend des risques, au sein de la prestigieuse collection « Blu-ray Découverte » de l’éditeur (également appelée « Gaumont découverte en Blu-ray »). Le film d’Henri Decoin s’offre donc un nouveau lifting Haute Définition sur galette Blu-ray, relativement inattendu dans le sens où il s’agit malheureusement d’un film un peu oublié de nos jours, en dépit de son immense succès dans les salles françaises en 1964.

Côté Blu-ray, force est de constater que le master restauré qui nous est proposé ici par Gaumont est vraiment d’excellente tenue. Nick Carter va tout casser nous est proposé au format 1.66:1 respecté et encodés en 1080p. Le piqué est d’une belle précision, et la gestion des contrastes semble avoir fait l’objet d’une attention toute particulière, préservant les qualités de la photo noir et blanc de Lucien Joulin et Henri Persin. Le mixage audio est proposé en DTS-HD Master Audio 2.0, en mono d’origine, et le rendu acoustique de l’ensemble s’avère clair et sans souffle. Les dialogues sont présentés de manière claire et la musique de Pierick Houdy est tout à fait respectée. Du beau travail !

Côté suppléments, Gaumont nous propose de nous plonger dans un intéressant entretien avec Didier Decoin, écrivain et fils du réalisateur Henri Decoin (22 minutes). Il regrette que Nick Carter va tout casser soit un film mal compris ; selon lui, il doit être pris comme une comédie en mode bande dessinée. Il revient sur la prestation d’Eddie Constantine, qui buvait énormément sur le tournage, au point de n’être sobre que deux heures par jour. Il indique également qu’à l’époque, l’acteur venait de tourner Alphaville avec Jean-Luc Godard, mais c’est une erreur : le tournage du film de Godard ne commencerait qu’en janvier 1965, soit six mois après la sortie du film d’Henri Decoin dans les salles françaises. On terminera ensuite avec un sujet consacré à la restauration du film (3 minutes), sur le mode toujours payant du « avant / après », ainsi qu’avec la traditionnelle bande-annonce.

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