Test Blu-ray : Bad trip 3D

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Bad trip 3D

 
France : 2014
Titre original : Paranormal bad trip 3D
Réalisation : Frédéric Grousset
Scénario : Frédéric Grousset
Acteurs : Philippe Hassler, Julien Masdoua, Gilles Serna
Éditeur : Artus Films
Durée : 1h12
Genre : Comédie, Horreur
Date de sortie cinéma : 8 Juin 2016
Date de sortie DVD/BR : 2 octobre 2018

 

 

Armé de son caméscope 3D, Johann se prépare à filmer la soirée d’enterrement de vie de garçon de Julien, organisée par ses vieux amis Philippe et Gilles. C’est une surprise totale et l’homme de la soirée se fait quelque peu prier avant d’accepter. La fête commence. Les ennuis ne vont pas tarder à pointer le bout de leur nez…

 

 

Le film

[3/5]

Produit par Artus Films en 2014, Bad Trip 3D est une comédie horrifique ayant eu l’honneur de se voir présentée, d’abord sous le titre Paranormal Bad Trip 3D, au Festival Hallucinations Collectives de Lyon, puis au FiFiGroT ou Festival International du Film Grolandais de Toulouse durant l’année 2014. Le film sortirait finalement dans un circuit très réduit de salles françaises en juin 2016, sous le titre Bad Trip 3D qu’on lui connaît aujourd’hui. Il s’agit bien sûr d’un film très indépendant réalisé par Frédéric Grousset. Mais qu’on se le dise : de la même manière que les livres édités à compte d’auteur ne sont pas tous à jeter, les films produits sans la moindre aide de l’état ne sont pas non plus forcément synonymes de nanars amateurs. Dans son genre, et même si son titre ultra commercial laisse penser à un long surfant de façon éhontée sur tout ce qui marchait dans les salles en 2014 (la référence explicite aux franchises Very bad trip et Paranormal activity, le recours à la 3D – autant d’éléments appartenant, seulement quatre ans plus tard, à un passé quasi-révolu), Bad Trip 3D a tout de même déjà pour lui le mérite d’être le tout premier film au monde (et toujours le seul à ce jour) à avoir été tourné selon le modèle du « found footage » ET en 3D native.

Alors, pour les deux cancres du fond qui n’auraient pas suivi, qu’est-ce que le found footage ? Il s’agit d’un procédé stylistique de cinéma « à la première personne », ayant recours à une caméra [très faussement] subjective, né du carton au box-office de Blair witch project en 1999, et ayant été utilisé des dizaines, et même probablement des centaines de fois dans le cinéma fantastique ou d’épouvante dans les années qui suivirent. Il s’agit d’ailleurs encore aujourd’hui d’un artifice très en vogue dans l’horreur contemporaine, au point que beaucoup de cinéphiles le considèrent comme la plaie du genre horrifique. Cette exaspération s’explique par le fait ce type de cinéma cadré à la va-vite, laissant une place prépondérante au hors-champ et ne répondant plus à aucune grammaire cinématographique établie, a ouvert la porte à des nuées, des pelletées, des vagues entières de films plus ou moins amateurs (ou amateurisants). Les cinéastes n’ont plus à se casser la tête à chercher des axes de prise de vue, les producteurs sont satisfaits car les coûts sont réduits, et en plus, le public est au rendez-vous… Depuis 2010, le succès de la saga Paranormal activity a contribué à pérenniser ce style, et à priori, malgré un léger retrait ces dernières années, il semble que le genre du found footage ait encore de beaux jours devant lui…

Tourné hors des circuits officiels et nanti d’un budget qu’on imagine dérisoire, Bad Trip 3D prend donc la forme du « film de potes », suivant un enterrement de vie de garçon de Julien qui vire au cauchemar. Au cœur du métrage, il y a donc Philippe Hassler, Julien Masdoua et Gilles Serna, les trois acteurs principaux du film, en mode « impro » et assez naturels – ils portent le film sur leurs épaules, mais ne sont pas forcément aidés par les interprètes féminines, pas forcément convaincantes (en particulier Frédérique Bruel). Sous ses allures de comédie de teuf qui dégénère, le film est surtout l’occasion pour Frédéric Grousset de livrer le portrait d’une génération d’hommes perdus, mal dans leur peau et mal dans leur couple : des « beaufs » dont l’existence est dominée par l’angoisse (de vieillir notamment) et la frustration. Par conséquent, il est somme toute logique que la soirée passée par les trois lascars se vautre dans le ressentiment, les règlements de compte et au final, le glauque et le malsain le plus total. Et le rire de la première moitié du film de virer au jaune, dans un rictus teinté de malaise. Et comme on ne se refait pas, Grousset en bon amoureux du cinéma de genre, choisit en plus de faire virer son récit, durant son dernier quart d’heure, dans le film d’horreur pur et simple, peuplé de fantômes et de zombies, avec même une apparition de la « dame blanche », légende urbaine dont, on en est sûr, tout le monde a déjà entendu parler sous une forme ou sous une autre. Le titre original du film de Frédéric Grousset devait d’ailleurs être La dame blanche à l’origine, mais on comprend cela dit qu’il ait préféré le modifier, dans le sens où les premiers éléments fantastiques apparaissent au bout de 55 minutes de métrage… pour un film durant en tout et pour tout 1h12, générique de fin compris. Et même si la toute dernière partie de Bad Trip 3D ne fait certes pas dans l’originalité, le tout s’avère assez efficace, et les effets spéciaux sont très soignés. On notera cependant que l’utilisation de la 3D, si elle est indéniablement réussie et renforce l’immersion au cœur du film, n’est finalement pas si indispensable que cela, le film se suffisant à lui-même, et ce même en deux dimensions.

 

 

Le Blu-ray

[4,5/5]

Comme on pouvait s’y attendre, le Blu-ray de Bad Trip 3D proposé ce mois-ci par Artus Films rend vraiment hommage à la patine visuelle du film, et nous livre un rendu aussi « roots » que possible. Si bien sûr, conditions de tournage obligent, le master nous propose forcément une expérience visuelle manquant de piqué et des scènes nocturnes assez granuleuses, mais il faut souligner que l’ensemble respecte pleinement et absolument les volontés artistiques de Frédéric Grousset. La définition ne pose donc pas de problème particulier, on ne repérera aucun lissage ou boost artificiel des couleurs, et le tout est proposé en 1080p : le rendu visuel est donc à 100% fidèle à ce qu’auront pu découvrir les quelques cinéphiles l’ayant découvert dans les salles. Côté son, le film n’est pas proposé en Haute Définition mais en Dolby Digital 5.1 au rendu très atmosphérique, contribuant pleinement à l’immersion au cœur du film : la spatialisation est bien travaillée, les basses se déchainent, et l’ensemble s’avère parfaitement convaincant. On notera également la présence d’un mixage stéréo en Dolby Digital 2.0, anecdotique mais probablement plus clair si vous ne bénéficiez pas des délices du Home Cinema et visionnez le Blu-ray le plus simplement du monde sur votre téléviseur.

Du côté des suppléments, Artus Films a fait les choses en grand. On commencera avec un entretien avec Christian Lucas, qui reviendra en une vingtaine de minutes sur l’histoire du cinéma 3D en France. On y découvrira donc que l’utilisation de la 3D remonte à très loin dans l’histoire du cinéma français, et les anecdotes, sur l’utilisation du procédé dans le cinéma X ou la première diffusion d’un film en trois dimensions à la TV, sont assez savoureuses. On continuera ensuite avec la découverte de deux œuvres de Frédéric Grousset antérieures à Bad Trip 3D : l’amusant court-métrage Kangootomik, réalisé en 2011, ouvrira le bal (ce petit film étant disponible à la fois en version longue et en version courte), mais on s’attardera surtout sur le long-métrage Climax (2009), proposé ici en intégralité et en Haute Définition (le son est également proposé en Dolby Digital 2.0). On n’est d’ailleurs pas loin de penser que ce film vaut tout autant, si ce n’est plus, la peine d’être découvert que Bad Trip 3D ! Tendu et efficace, ce thriller très sanglant, mettant en scène pour l’essentiel les mêmes acteurs que le film de 2014, permet notamment à Grousset de livrer quelques plans iconiques assez redoutables. Composant admirablement avec les limites de son budget ridicule (7000 euros !), Climax propose non seulement un huis-clos solide et très habilement torché mais également une réelle réflexion sur le sens des images, les dernières minutes du film remettant en question tout ce qui a été vu précédemment. Les références et hommages abondent sans alourdir l’intrigue (au giallo, à La nuit des morts vivants de Romero…), la mise en scène et les cadrages sont tout particulièrement soignés, malgré une photo passe-partout, qui s’explique cela dit par le fait que le film est censé être la reconstitution télévisuelle d’un fait divers sanglant. Une belle découverte !

 

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