Critique : Méduse

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 Méduse

France : 2022
Titre original : –
Réalisation : Sophie Levy
Scénario : Sophie Levy
Acteurs : Roxane Mesquida, Arnaud Valois, Anamaria Vartolomei
Distribution : Wayna Pitch
Durée : 1h26
Genre : Drame, Romance
Date de sortie : 26 octobre 2022

3.5/5

Sophie Levy est entrée dans le monde du cinéma par la réalisation de films publicitaires et de clips. Après deux court-métrages, Méduse est son premier long métrage de fiction. Ce film a été produit par le patron de presse Franck Annese qui vient d’ajouter la production cinématographique aux nombreux titres de la presse papier qu’il a lancés au sein de la société So Press : So Foot, So Film, Society, … . Méduse a été présenté dans près d’une centaine de festivals et a été très souvent récompensé à un titre ou à un autre (film, scénario, mise en scène, interprétation, photographie, musique, …).

Synopsis : Romane rentre tard chez elle en compagnie de Guillaume dont elle tombe rapidement amoureuse. Le lendemain matin, Guillaume découvre une fille dans le salon. C’est Clémence, la sœur de Romane, restée hémiplégique et privée de la parole des suites d’un accident. Guillaume se sent alors investi d’une mission : redonner corps et vie à Clémence.

Quel motif peut fragiliser le lien entre Romane et Clémence ?

Deux sœurs, Romane, proche de la trentaine, et Clémence, plus jeune d’une demi-douzaine d’années. Elles habitent dans une magnifique maison, une maison avec une grande piscine qui appartient à leur grand-mère, laquelle est dorénavant en maison de retraite. A la suite d’un accident de voiture dans lequel leur mère avait succombé, Clémence a subi un accident cérébral qui l’a privée de l’usage de la parole et qui affecte ses déplacements au point qu’elle doit marcher, difficilement, avec une canne. Romane, elle, est ressortie indemne de l’accident, elle travaille dans l’immobilier et elle s’efforce d’avoir une vie sociale et affective malgré la charge que représente pour elle le fait de s’occuper de Clémence. Même si on observe parfois quelques frictions entre Romane et Clémence, il est évident qu’un lien très fort les réunit, un lien dont on se demande quel motif pourrait arriver à le fragiliser. Et si ce « grain de sable » s’appelait Guillaume, un homme qui a participé à une fête organisée chez elle par Roxane, un homme qui a passé la nuit avec elle et qui, descendant dans la cuisine pour le petit déjeuner, est tombé nez avec nez avec Clémence, une sœur dont Romane ne lui avait pas parlé.

La jalousie change de camp !

Il est très vite clair que l’arrivée de Guillaume auprès de Romane et Clémence vient perturber une situation qui paraissait immuable : si l’existence d’une forme de jalousie, totalement compréhensible par ailleurs, existait préalablement entre les deux sœurs, elle ne concernait que Clémence, envieuse de la vie menée par Romane, une vie à laquelle il lui était physiquement impossible d’aspirer, cette jalousie pouvant, par exemple, la pousser à effacer un message téléphonique destiné à sa sœur et concernant une invitation à un pot de départ. Progressivement, la jalousie va changer de camp ! En effet, Guillaume, en bon pompier qu’il est, s’est persuadé, dès qu’il a eu connaissance des maux dont souffre Clémence, qu’il pouvait, qu’il devait arriver à faire quelque chose pour lui rendre la parole et améliorer sa motricité. La complicité entre Clémence et Guillaume s’affichant au grand jour, les progrès effectués par Clémence devenant de plus en plus visibles, des sourires qui illuminent son visage en présence de Guillaume, voilà Romane qui voit en Clémence une rivale inattendue, voilà Romane qui jalouse sa sœur.

Trois remarquables comédiens

Ces rapports entre les deux sœurs, entre Romane et Guillaume, entre Clémence et Guillaume, c’est presque toujours avec une grande douceur que Sophie Lévy les filme, prenant bien garde, à l’exception d’une scène, de ne pas outrer les situations, invitant parfois le spectateur attentif à deviner ce qui se passe dans la tête de l’un.e ou de l’autre. Cette douceur dans la mise en scène et dans la conduite du récit va de pair avec la très grande douceur qui émane de la photographie, avec des couleurs qui ne sont jamais saturées. Par ailleurs, le choix du format scope est parfaitement en phase avec la grande maison qu’habitent Romane et Clémence et avec son environnement. Si le rapprochement de ce que raconte le film avec le mythe de Méduse est tout sauf évident, le film fait souvent appel à l’art du 15ème siècle avec de courtes visions de peintures de Jérôme Bosch ainsi qu’à la musique du 18ème siécle avec Vivaldi, Bach et Haydn.

Dans les rôles de Romane, Clémence et Guillaume, on retrouve deux comédiennes et un comédien dont on sait qu’elles et il sont dorénavant passé.e.s du stade d’interprètes prometteurs à celui de valeurs sûres, ce qu’elles et il confirment parfaitement dans Méduse. Roxane Mesquida, l’interprète de Romane, a commencé à tourner au cinéma alors qu’elle n’était qu’adolescente et sa filmographie est déjà très importante. Arnaud Valois, l’interprète de Guillaume, on avait particulièrement apprécié son interprétation du rôle de Nathan dans 120 battements par minute de Robin Campillo. Quant à la comédienne franco-roumaine Anamaria Vartolomei, découverte dans My little princess de Eva Ionesco, confirmée dans L’échange des princesses de Marc Dugain et plus encore dans L’évènement de Audrey Diwan, c’est elle qui a hérité du rôle le plus difficile, celui de Clémence, un rôle de jeune femme qui vit mal son handicap et qu’un homme arrive à reconnecter avec le bonheur.

Conclusion

Pour son premier long métrage, Sophie Levy n’a pas choisi la facilité, mais le résultat lui donne raison. Pour le moins atypique, son voyage dans le monde de la jalousie est traité avec douceur et pousse les spectateurs à s’inviter dans les pensées intimes des trois protagonistes du film, interprétés par trois remarquables comédiens.

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