Critique Express : Libertate

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Libertate

Roumanie : 2023
Titre original : –
Réalisation : Tudor Giurgiu
Scénario : Cecilia Stefanescu, Tudor Giurgiu, Nap Toader
Interprètes : Alex Calangiu, Cătălin Herlo, Ionut Caras
Distribution : Destiny Films
Durée : 1h48
Genre : Drame, guerre
Date de sortie : 21 mai 2025

3.5/5

Synopsis : Décembre 1989. La révolution roumaine a débuté et la ville de Sibiu devient le théâtre de terribles affrontements. Les policiers et miliciens fidèles à Ceausescu sont arrêtés et réunis dans le bassin vide d’une piscine. Mais comment savoir qui est qui dans un tel chaos ?

L’immersion dans le chaos d’une révolution

Il y a au moins 2 sujets qui sont particulièrement délicats à traiter au cinéma : l’ennui et une situation particulièrement chaotique. L’ennui, parce que le risque est grand de réaliser un film … ennuyeux lorsqu’on décide de filmer l’ennui ; une situation particulièrement chaotique car le risque est grand d’en faire un film incompréhensible pour le commun des mortels. Bien qu’il apparaisse difficile d’imaginer une situation plus chaotique que ce qu’il va nous montrer, cela n’a pas empêché le réalisateur roumain Tudor Giurgiu de s’inspirer de faits réels pour nous raconter ce qui s’est passé à Sibiu, en Transylvanie, lors de la révolution roumaine de décembre 1989. Après la vision d’une piscine dans laquelle s’entrainent quelques nageurs, histoire, peut-être, de nous faire comprendre que nous, spectateurs, allons pas mal « nager » tout au long du film, le texte suivant est affiché, un texte sans doute destiné à  fournir aux spectateurs une excuse pour ne pas arriver à comprendre tout ce qui va lui être présenté : « Dans le chaos de la révolution roumaine de 1989, la population civile, l’armée, la police et la police secrète de Ceaucescu , la Securitate, ont été montées les unes contre les autres afin de contrôler le récit de la chute du régime communiste ». Dans la première moitié du film, le chaos est à son comble, et il est difficile de savoir de quel camp fait partie tel ou tel protagoniste. Des civils sont entrés dans le bâtiment des armes de la police. On ne sait plus très bien qui commande à l’hôpital : son directeur ou un officier de l’armée ? Des coups de feu ont été tirés, mais par qui ? Il y a eu des morts, mais quels en sont les responsables ? On nie avoir tiré, on se traite de terroristes, de contre-révolutionnaires. Diverses rumeurs commencent à courir. Sentant que le vent a tourné, les membres de la police et, plus encore, les membres de la Securitate, troquent dès qu’ils le peuvent leurs uniformes pour des habits de civils. L’armée, quant à elle, affirme être du côté du peuple, qu’elle ne tirera jamais sur le peuple, qu’elle est là pour protéger les citoyens, mais est-ce vraiment sincère ? Et puis, on retrouve de nouveau une piscine. Elle n’est pas vide, mais ce n’est pas de l’eau qui la remplit, ce sont des hommes, d’anciens membres de la police et de la Securitate, mais aussi quelques civils qui se sont trouvés au mauvais endroit au mauvais moment. Sur les margelles de la piscine, des membres de l’armée sont là pour les surveiller, pour les invectiver, pour leur faire peur, pour les traiter de terroristes et, éventuellement, pour les autoriser à aller aux toilettes.

On regrette un peu que, dans ce film dont la réalisation est très nerveuse, on ne soit pas conduit à s’attacher un peu plus, en bien ou en mal, à 2 ou 3 personnages, même si on retrouve souvent à l’écran Viorel Stanese, un capitaine de la Securitate, membre du Parti Communiste, et qui ne cesse de supplier ses gardiens de le libérer afin qu’il puisse assister au baptême de son fils, le 7 janvier. Par contre, l’impression qu’on a dès le début d’être immergé dans cette révolution, parfois dans un camp, parfois dans le camp opposé, au milieu de gens qui ne comprennent pas très bien ce qui se passe, est au bout du compte une expérience intéressante à vivre, d’autant plus que, fort heureusement, on vit cette expérience sans risquer de faire partie des 99 personnes tués à Sibiu durant cette période, ou des 212 blessés, ou des 522 personnes retenues illégalement dans la piscine. Et comme on est en Roumanie, dont le cinéma est coutumier du fait, des situations tragicomiques sont parfois évoquées, comme cet homme qui dit avoir été frappé deux ans auparavant par un membre de la Securitate pour avoir écrit une lettre à Radio Europe Libre, une lettre pour se plaindre de … la présence de « Walk like an egyptian », le succès des Bangles, dans leur top musical. Particulièrement subversif, ce courrier !

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