Test Blu-ray : Hot Milk

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Hot Milk

Royaume-Uni, Grèce : 2025
Titre original : –
Réalisation : Rebecca Lenkiewicz
Scénario : Rebecca Lenkiewicz
Acteurs : Emma Mackey, Vicky Krieps, Fiona Shaw
Éditeur : Metropolitan Film & Video
Durée : 1h33
Genre : Drame
Date de sortie cinéma : 28 mai 2025
Date de sortie DVD/BR : 16 octobre 2025

Par un été étouffant, Rose et sa fille Sofia se rendent à Almeria, une station balnéaire du sud de l’Espagne. Elles viennent consulter l’énigmatique docteur Gómez, qui pourrait soigner la maladie de Rose, clouée à un fauteuil roulant. Sofia, jusque-là entravée par une mère possessive, s’abandonne au charme magnétique d’Ingrid, baroudeuse qui vit selon ses propres règles. Tandis que Sofia s’émancipe, Rose ne supporte pas de voir sa fille lui échapper ? et les vieilles rancœurs qui pèsent sur leur relation vont éclater au grand jour…

Le film

[4/5]

Petite pépite inattendue et venue de nulle-part, Hot Milk représente le point de convergence entre le cinéma d’Ingmar Bergman et un épisode de Love Island – le tout filmé avec des objectifs vintage et sous un cagnard espagnol qui fait transpirer même à travers votre dalle LCD. Le film, présenté en compétition officielle à la Berlinale 2025, est signé Rebecca Lenkiewicz, que l’on connaissait jusqu’ici pour ses scénarios bien charpentés (Ida, She Said…). Il s’agit de l’adaptation d’un roman de Deborah Levy, et le résultat est une romance moite au cœur de laquelle on suit la jeune Sofia (Emma Mackey), venue accompagner sa mère Rose (Fiona Shaw, impériale) dans une station balnéaire d’Almeria pour consulter le Dr Gómez, un médecin aux méthodes floues ; sur place, Sofia commencera à être attirée par l’envoûtante Ingrid (Vicky Krieps).

Vous l’aurez compris à la lecture de ce résumé rapide : Hot Milk, c’est avant tout une histoire de corps. De corps empêchés, souffrants – à travers la mystérieuse maladie de Rose – mais également de corps désirants, transpirants. Le film s’ouvre sur une citation de Louise Bourgeois : « Je suis allée en enfer et j’en suis revenue. Et croyez-moi, c’était merveilleux ». Mine de rien, cette entrée en matière donne le ton du film : ici, on va creuser dans les chairs, dans les relations « interdites », et dans ces non-dits qui collent à la peau comme du sable humide. La caméra de Christopher Blauvelt capte les peaux avec une sensualité trouble, presque fétichiste, jouant sur l’intime et le flou, parfois jusqu’à en frôler l’abstraction.

Jouant habilement sur les contradictions, Hot Milk joue ainsi la carte du huis clos, quasi-étouffant, mais en plein air, et sous un soleil de plomb. On sent bien, au fil des séquences, que Sofia est « prisonnière » de sa mère, et paradoxalement, l’espace autour d’elle est vaste, lumineux, chaud, très chaud. Une chaleur qui n’est pas juste celle du soleil, qui tape dur, mais qui s’étend plus largement à celle des émotions, des colères rentrées, et surtout des désirs refoulés. Le grain de l’image, volontairement accentué, donne une texture presque tactile à l’ensemble. Ce contraste entre enfermement psychologique et ouverture géographique donne au film une tension constante, comme une envie de crier en plein désert.

Pour Sofia, la tentation et la fuite en avant sont représentées par Ingrid, une baroudeuse qui semble sortie d’un fantasme de Guide du Routard BDSM. Leur relation, intense et ambiguë, rappelle les jeux de pouvoir de Désobéissance, autre scénario signé Rebecca Lenkiewicz. Réflexion sur la dépendance et le besoin de s’émanciper, Hot Milk souligne avec une certaine habileté les blocages d’une génération qui cherche à se libérer, mais sans savoir comment s’y prendre. Sofia y apparait comme coincée entre sa mère et ses propres désirs, et la fin du film, ouverte comme la braguette des spectateurs du Brady, laissera à coup sûr le spectateur dans un état de flottement, entre frustration et contemplation. Une jolie réussite.

Le Blu-ray

[4/5]

Après une courte carrière dans les salles obscures ayant attiré un peu plus de 14.000 français sur un circuit de 99 copies, Hot Milk débarque aujourd’hui au format Blu-ray, sous les couleurs de Metropolitan Film & Video, qui lui offre une élégante édition présentée dans un boîtier Scanavo full-frame plutôt classe, le Blu-ray étant d’ailleurs accompagné d’un DVD, probablement à destination des nostalgiques du pixel flou. Comme on pouvait s’y attendre pour un film aussi soigné, l’image du Blu-ray nous offre un rendu absolument superbe : les blancs sont lumineux sans cramer la rétine, les noirs profonds sans sombrer dans le glauque, et les tons de peau sont étalonnés avec un soin qui ferait rougir un dermatologue. Le grain, homogène et volontaire, donne au film une patine vintage qui colle parfaitement à son ambiance moite et introspective. Côté son, le film nous est proposé en VF et VO en DTS-HD Master Audio 5.1, et ça envoie du bois. La dynamique est bien gérée, les dialogues sont clairs, la musique et les ambiances se répartissent avec justesse sur les cinq canaux. Etant donné la performance livrée par le trio d’actrices principales, il va sans dire qu’on privilégiera la version originale à la version française.

Côté bonus, on trouvera sur la galette HD de Hot Milk une courte featurette (3 minutes) où les actrices, les productrices et la réalisatrice évoquent les thèmes du film et les personnages, ainsi qu’une sélection de bandes-annonces éditeur, composée de celles de Hot Milk, Hurry Up Tomorrow, Memory, Jusqu’au bout du monde, Les Indomptés, Daddio, Immaculée, Blackbird, Reality et Tatami). Le supplément le plus intéressant consiste en réalité dans le riche livret de 28 pages accompagnant cette édition. Richement illustré, il nous proposera entre autres une intéressante note d’intention et un entretien avec Rebecca Lenkiewicz, ainsi qu’une passionnante analyse du film signée Nicolas Rioult – un complément passionnant qui compense largement la maigreur des bonus vidéo. Un bel objet pour les amateurs de cinéma sensoriel et de psychanalyse en maillot de bain !

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