Requiem for a Dream
États-Unis : 2000
Titre original : –
Réalisation : Darren Aronofsky
Scénario : Hubert Selby Jr., Darren Aronofsky
Acteurs : Ellen Burstyn, Jared Leto, Jennifer Connelly
Éditeur : Bubbel Pop’ Édition
Durée : 1h42
Genre : Thriller, Drame
Date de sortie cinéma : 21 mars 2001
Date de sortie DVD/BR/4K : 16 avril 2025
Harry Goldfarb est un toxicomane. Il passe ses journées en compagnie de sa petite amie Marion et de son copain Tyrone. La mère d’Harry, Sara, souffre d’une autre forme de dépendance : la télévision. Afin de satisfaire aux canons esthétiques, la veuve s’astreint à un régime draconien lorsqu’elle est invitée à participer à son jeu télévisé favori…
Le film
[5/5]
D’une manière générale, on tend à classer Requiem for a Dream dans le genre du « drame », en raison de sa description pour le moins spectaculaire de l’addiction à la drogue et du mal que l’homme est capable de s’infliger à lui-même. Pourtant, le moins que l’on puisse dire du magnum opus de Darren Aronofsky, c’est que le film développe tout au long de son intrigue une atmosphère étouffante et si effrayante que l’on pourrait finalement être tenté de le ranger dans le genre très codifié du film d’horreur. Darren Aronofsky a toujours flirté avec le cinéma d’horreur, mais avec Requiem for a Dream, il plongeait le spectateur au cœur d’une véritable descente aux enfers, un cauchemar éveillé tellement extrême et dérangeant qu’il dépasse – et de loin – en termes d’impact et de terreur sourde la grande majorité des films évoluant dans le domaine de l’horreur. Dans ce film, l’homme est son propre monstre, son propre Boogeyman, s’infligeant son propre enfer, se créant sa propre prison, choisissant de son propre chef la voie de la souffrance et de la mort à petit feu – d’un point de vue émotionnel tout d’abord, puis physique.
Peu de films ont abordé le problème de l’addiction avec autant de force que Requiem for a Dream. Adapté d’un roman du roman « Retour à Brooklyn » d’Hubert Selby (1978), le film se double d’un regard extrêmement critique sur le poids des médias aux États-Unis, qui ont contribué à créer certaines obsessions morbides, telles que celles de devenir maigre à tout prix, ou d’obtenir ses fameuses « 15 minutes de célébrité », notamment en participant à des jeux TV. Les temps changent, mais le retentissement que peut encore avoir Requiem for a Dream de nos jours dans le cœur du public reste malheureusement intact. Ces sujets sont plus que jamais d’actualité : les drogues dures font malheureusement toujours autant de ravages, et les diktats médiatiques ont probablement encore été accentués ces vingt-cinq dernières années, la TV ayant juste été remplacée par Internet et les réseaux sociaux, qui ont encore un peu renforcé l’influence de l’image sur la vie de tout un chacun. D’une certaine manière, il est même permis de penser que les réseaux ont étendu cette problématique à une échelle mondiale, et donc exacerbé ces dérives obsessionnelles qui détruisent des vies en abîmant les corps et en déchiquetant les âmes.
Il va (presque) sans dire que Requiem for a Dream est le prototype même du « feel bad movie » – on entend par là qu’il est de ces films qui, une fois terminés, vous donnent envie de vous allonger sur une poubelle en attendant la mort. Apre et moralement complexe, développant une atmosphère et un climat oppressant, désespéré, le long-métrage de Darren Aronofsky ne cache pas forcément son jeu, dans le sens où même son titre suggère l’absence d’espoir, la mort d’un avenir, l’abandon d’une chance de rédemption. Avec chaque pilule / avec chaque shoot, les personnages rajoutent un clou à leur cercueil : ce destin inévitable n’est pas difficile à percevoir du côté du spectateur, mais les protagonistes du récit choisissent d’ignorer cet état de fait, et ce même quand ils sont amenés à faire face à des signes douloureusement évidents.
Formellement, Darren Aronofsky et son directeur photo Matthew Libatique nous proposent avec Requiem for a Dream une vision du monde extrêmement stylisée, qui capture visuellement les thèmes du désespoir, de l’égoïsme et de la souffrance. De plus, le montage est très habile, capturant avec talent les hauts et les bas d’une vie d’un toxico : le film s’avère délibérément lent et sinueux durant les séquences durant lesquelles les personnages ne se défoncent pas, pour devenir beaucoup plus rapide et spectaculaire quand ils se laissent aller à leurs faiblesses, en utilisant un montage ultra-cut, des gros plans extrêmes ou d’autres volontairement tremblants et/ou presque abstraits.
D’autres idées de mise en scène tendent à renforcer le fossé qui sépare de plus en plus les personnages de Requiem for a Dream, telles que le split-screen utilisé par Aronovsky durant la scène où Harry (Jared Leto) et Marion (Jennifer Connelly) sont allongés l’un à côté de l’autre dans le même lit. Même s’ils ne sont séparés physiquement que de quelques centimètres, la réalisation nous suggère qu’un gouffre les sépare en réalité, leur relation n’étant maintenue que par le désir mutuel qu’ils éprouvent non pas l’un pour l’autre mais pour la dope, qui finira par les déchirer émotionnellement et physiquement. Mais la véritable force de Requiem for a Dream réside dans son message universel, qui dénonce non pas seulement l’addiction à la drogue, mais toutes les sortes d’addictions malsaines qui peuvent devenir quelque chose de potentiellement dévastateur pour une vie (alcool, jeu, réseaux sociaux). Chef d’œuvre.
Le coffret Blu-ray 4K Ultra HD
[5/5]
Quelques mois après avoir édité ses premiers films au format Blu-ray (Stay Hungry, Recherche Susan désespérément, In Bed with Madonna), Bubbel Pop’ Édition enrichit son activité en se lançant dans le Blu-ray 4K Ultra HD. Et il y a fort à parier que cette édition 4K de Requiem for a Dream permette à l’éditeur de se faire une place de tout premier ordre dans le cœur des cinéphiles français. S’imposant comme une véritable référence en terme de qualité de transfert et de suppléments, ce superbe coffret Requiem for a Dream s’impose comme une superbe édition Combo Blu-ray 4K UHD + Blu-ray + Livre de 90 pages + Goodies (4 cartes postales) – le coffret nous est de plus présenté avec un design soigné.
Côté image, le transfert 4K de Requiem for a Dream qui nous est proposé ici par Bubbel Pop’ Édition est de toute beauté, respectueuse du grain d’origine, mais elle sait également imposer un beau piqué et des contrastes solides. La restauration 4K a fait place nette des poussières et autres points blancs, et le résultat s’avère même au-delà de nos espérances. Bien sûr, il s’agit d’une présentation respectant les volontés artistiques de Darren Aronofsky et de son directeur photo Matthew Libatique, et qui s’avère donc volontairement hétérogène, oscillant entre une clarté cristalline, des éléments plus flous et des scènes de trips aux teintes plus psychédéliques. Mais en dépit des grandes différences entre les séquence, le niveau de détail global a été sensiblement amélioré par rapport aux éditions précédentes, et la technologie HDR + Dolby Vision ajoute des reflets fascinants à une palette chromatique déjà absolument remarquable. Les couleurs des trois saisons qui rythment la narration du film sont exceptionnelles. Certains éléments vidéo ne sont probablement pas mis en valeur par la résolution accrue de la Katka, et certains contenus télévisés peuvent donc parfois paraître légèrement pixellisés. Côté son, la VO nous est proposée en Dolby Atmos ; cette dernière sera décodée en Dolby TrueHD 7.1 sur les amplis non compatibles, et la VF nous est également proposée en Dolby TrueHD 7.1. Dans les deux cas, la spatialisation est remarquable, et tout au long du film, tous les canaux sont sollicités, notamment lors des transitions vers des scènes plus intenses. La musique de Clint Mansell est excellente du début à la fin, et en dépit de sa spatialisation spectaculaire, les dialogues sont parfaitement séparés des autres éléments sonores, et bénéficient d’une clarté surprenante. Qu’on visionne le film en VF ou en VO, les deux mixages contribuent au sentiment général d’irréalité développé par Requiem for a Dream.
Dans la section suppléments, Bubbel Pop’ Édition a mis les petits plats dans les grands : outre le livre de 90 pages et les cartes postales, on trouvera tout d’abord un entretien avec Ellen Burstyn (16 minutes). L’actrice y reviendra sur son investissement extraordinaire sur le film, des deux semaines de soupe aux choux au calvaire du retrait des prothèses à la fin de chaque journée de tournage en passant par le plan-séquence du « grand nettoyage ». On continuera ensuite avec un entretien avec Clint Mansell (17 minutes). Le compositeur évoquera sa relation avec Darren Aronofsky, qui lui avait conseillé d’envisager Requiem for a Dream comme un « film de monstres ». Il reviendra également sur l’influence du hip-hop sur sa musique et du processus d’échantillonnage de différents requiems pour les déployer pendant le climax du film. On continuera le tour des suppléments avec une série de scènes coupées (12 minutes), une featurette sur le tournage (6 minutes), et on terminera avec les pensées de deux journalistes français sur le film. Dans l’entretien avec Caroline Vié (21 minutes), la très sympathique journaliste reviendra sur le « choc » représenté par le film en 2001, en abordant ses thèmes, ses personnages, son intemporalité, sa musique, ses acteurs, etc. Toujours souriante et de bonne humeur. Dans l’entretien avec Gérard Delorme (26 minutes), le journaliste s’intéressera davantage à la carrière de Darren Aronofsky.