Wicked
États-Unis : 2024
Titre original : Wicked – Part I
Réalisation : Jon M. Chu
Scénario : Winnie Holzman, Dana Fox
Acteurs : Cynthia Erivo, Ariana Grande, Michelle Yeoh
Éditeur : Universal Pictures
Durée : 2h40
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 4 décembre 2024
Date de sortie DVD/BR/4K : 9 avril 2025
Wicked suit le parcours des sorcières légendaires du monde d’Oz. Elphaba, une jeune femme incomprise à cause de la couleur inhabituelle de sa peau verte ne soupçonne même pas l’étendue de ses pouvoirs. À ses côtés, Glinda qui, aussi populaire que privilégiée, ne connaît pas encore la vraie nature de son cœur. Leur rencontre à l’Université de Shiz, dans le fantastique monde d’Oz, marque le début d’une amitié improbable mais profonde. Cependant, leur rapport avec Le Magicien d’Oz va mettre à mal cette amitié et voir leurs chemins s’éloigner. Tandis que Glinda, assoiffée de popularité, se laisse séduire par le pouvoir, la détermination d’Elphaba à rester fidèle à elle-même et à son entourage aura des conséquences aussi malheureuses qu’inattendues. Leurs aventures extraordinaires au pays d’Oz les mèneront finalement à accomplir leur destinée en devenant respectivement la Bonne et la Méchante Sorcière de l’Ouest…
Le film
[4/5]
Wicked est la première partie d’une adaptation en deux films de la comédie musicale « Wicked » de Stephen Schwartz et Winnie Holzman, lancée en 2003 à Broadway, elle-même basée sur le roman « Wicked : La Véritable Histoire de la méchante sorcière de l’Ouest » de Gregory Maguire. Ce roman publié en 1996 met en situation les personnages inventés par L. Frank Baum dans « Le Magicien d’Oz » en 1900, qui furent d’ailleurs repris par Baum dans plusieurs suites, puis par d’autres auteurs tout au long du Vingtième Siècle (Ruth Plumly Thompson, John R. Neill, Jack Snow…). Bon élève, Gregory Maguire respectait la trame historique mise en place par les auteurs précédents, mais en s’intéressant particulièrement au personnage de la méchante sorcière de l’Ouest, il proposait une vision du pays d’Oz et de ses habitants radicalement différente de celle proposée par les auteurs précédents. Le succès du roman lui permit d’approfondir son univers dans une quadrilogie littéraire achevée en 2011.
Wicked est donc l’adaptation cinématographique du premier acte de la comédie musicale de 2003, et s’intéresse à la méchante sorcière popularisée par le film Le Magicien d’Oz de Victor Fleming en 1939 (« Je fonds ! Je fonds ! Oh, quel monde ! »), à qui il donne le nom d’Elphaba – en référence au nom de L. Frank Baum, « El » provenant de L., « fa » de Frank et « ba » de Baum. Le film s’échine également à lui imaginer une famille, et à raconter sa jeunesse. Elle est incarnée à l’écran par Cynthia Erivo. Le récit met également en scène Glinda (Ariana Grande), camarade d’études et de chambre d’Elphaba, qui sera amenée à devenir la bonne sorcière du Sud. A leurs côtés, le film de Jon M. Chu met également en scène Jeff Goldblum dans le rôle du Magicien d’Oz, et Michelle Yeoh dans celui de Madame Morrible, créée dans le roman de 1996.
Doté d’un budget de 150 millions de dollars, Wicked a, à ce jour, engrangé plus de 730 millions de dollars à l’international, et attiré plus de 850.000 français dans les salles. Le moins que l’on puisse dire, c’est que chaque centime dépensé dans la production du film se retrouve à l’écran : on est en effet en présence d’un immense spectacle familial, coloré et conscientisé. Mais en dépit de son aspect vaguement « woke » ou du moins toujours très politiquement correct, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’à condition d’être capable de prendre suffisamment de recul vis-à-vis du cinéma Hollywoodien du vingt-et-unième siècle, Wicked emmènera le spectateur au cœur d’un spectacle lumineux et enthousiasmant, rempli de musique, de rebondissements, d’émotion mais aussi d’humour – on saluera notamment l’autodérision d’Ariana Grande, qui s’amuse visiblement beaucoup ici à casser son image en incarnant une parvenue totalement stupide.
La grande question soulevée par l’intrigue de Wicked est naturellement celle du « déterminisme ». L’histoire qui nous est racontée ici est celle d’un personnage connu comme l’un des méchants les plus mémorables de la culture populaire. Dans la version originale du Magicien d’Oz, la méchante sorcière de l’Ouest est en effet un personnage maléfique, unidimensionnel et conçu pour être détesté par le plus grand nombre : elle s’exprimait de manière excessive, prenait un plaisir évident à être cruelle, et ses menaces se terminaient souvent par d’odieux ricanements d’autosatisfaction. Mais les gens naissent-ils vraiment mauvais ou le deviennent-ils par la force des événements ?
C’est la question que pose Wicked, à travers la trajectoire de cette femme ayant été la victime de discriminations et de préjugés dès son plus jeune âge en raison de sa couleur (verte), à commencer par son propre père. Ce qui la distingue des autres, cependant, va bien au-delà de la couleur de sa peau : dans les moments d’émotion et de stress, ses pouvoirs magiques apparaissent au grand jour. Comme Elsa, l’héroïne de La Reine des Neiges, elle va devoir apprendre à les contrôler, mais dans les yeux des autres (et notamment des habitants du pays d’Oz), elle reste une aberration. Elle est quelque chose qu’Oz n’a jamais vu auparavant et qu’il ne reverra probablement jamais, et sous le vernis magnifique et impressionnant d’Emerald City, l’intolérance et le rejet s’enracinent et se développent : on retrouve cet état d’esprit dans le sort réservé aux animaux parlants. Leur traitement est comparable à celui d’un certain nombre de groupes de personnes dans l’histoire de notre civilisation et, malheureusement, également dans le monde contemporain.
Alors bien sûr, on pourra arguer que ces thèmes ne sont pas avancés au spectateur avec la plus grande subtilité. Ils sont de plus tout à fait dans l’air du temps, et correspondent à une époque où le wokisme et l’inclusivité sont les maître-mots. Mais honnêtement, il nous paraît hypocrite de faire ce procès à Wicked tant cet état d’esprit semble aujourd’hui baigner le cinéma Hollywoodien « familial », bien au-delà du genre du conte de fées et/ou des productions Disney / Marvel. De fait, sous la surface du divertissement léger et souvent très drôle et derrière les performances musicales impressionnantes, le message du film transparaît parfois au cœur de paroles plutôt sombres. Ajoutez à cela une mise en forme visuellement époustouflante et un rythme parfaitement tenu en dépit d’une durée de 160 minutes, et vous obtiendrez assurément l’un des divertissements les plus solides et les plus inspirants de l’année 2024.
Le Blu-ray 4K Ultra HD
[5/5]
Disponible depuis quelques semaines au format Blu-ray 4K Ultra HD sous les couleurs d’Universal Pictures, Wicked s’impose comme la plus impeccable démonstration de l’excellence du format 2160p sur tous ceux l’ayant précédé. Le piqué, la profondeur de champ, les couleurs et les contrastes sont absolument éblouissants, d’autant que les étalonnages HDR10 + Dolby Vision offrent un élargissement extraordinaire de la palette de couleurs. La saturation des couleurs ne nous apparaît que plus riche et plus convaincante, les détails sont fins sont spectaculaires, les textures sont réalistes, et les scènes plus sombres ne faiblissent jamais : c’est du lourd.
Du côté des pistes sonores, la VO nous est proposée dans un mixage Dolby Atmos ébouriffant. Le rendu acoustique est vivant et immersif à souhait, avec des basses très profondes et des surrounds omniprésents, qui soutiennent les numéros musicaux avec puissance et finesse, les voix étant concentrées sur les canaux avant, l’ensemble nous proposant des effets multicanaux précis et fluides. La piste VF n’est pas en reste : le mixage nous est proposé en Dolby Digital+ 7.1, et fait preuve d’une ampleur et d’un dynamisme échevelé, avec une spatialisation aussi riche que fine, des effets dans tous les coins et un rendu parfaitement et définitivement enveloppant : du très beau travail acoustique.
Côté suppléments, on trouvera tout d’abord une sélection de scènes coupées et/ou étendues (15 minutes), présentées à divers stades de finalisation. On enchaînera ensuite avec un intéressant making of (46 minutes). Le réalisateur Jon M. Chu, le producteur Marc Platt et le compositeur Stephen Schwarz y reviendront sur les origines de Wicked, et du passage de la comédie musicale au grand écran. On évoquera également le choix d’Ariana Grande et Cynthia Erivo dans les rôles principaux, tandis que Michelle Yeoh et Jeff Goldblum reviendront sur ce qui les a attirés dans leurs rôles respectifs. De nombreux membres de l’équipe interviendront sur les maquillages, les costumes, les décors, les chorégraphies ou encore le chant, enregistré en direct pendant le tournage.
Pour terminer, une poignée de featurettes reviendront sur divers aspects du film, tels que les décors et les costumes des scènes se déroulant à l’université (8 minutes), le personnage du magicien d’Oz et la création de la grande tête en animatronique (4 minutes) et bien sûr la comédie musicale d’origine (4 minutes), et l’apparition de deux de ses interprètes emblématiques (Idina Menzel et Kristin Chenoweth) dans le film. On notera par ailleurs la présence d’une version Karaoké du film, et que le Blu-ray 4K Ultra HD de Wicked édité par Universal Pictures est présenté dans un superbe SteelBook aux couleurs du film.