Festival de Cannes à Paris : jour 1 – Béliers, Les élues, Nahid

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Le Festival de Cannes s’est achevé officiellement ce dimanche 24 mai avec la proclamation du palmarès et l’annonce de la Palme d’or à Jacques Audiard pour Deep End Dheepan suivie de la projection de La Glace et le Feu le Ciel de Luc Jacquet. Pourtant les stackhanovistes complétistes n’en ont pas fini avec les films révélés sur la Croisette. Cannes à Paris, c’est parti, voir l’intégralité des séances en cliquant ici. On commence avec quatre films de la section officielle Un Certain Regard…


beliers AfficheBéliers (Hrútar) de Grímur Hákonarson

Synopsis : Dans une vallée isolée d’Islande, deux frères qui ne se parlent plus depuis quarante ans vont devoir s’unir pour sauver ce qu’ils ont de plus précieux : leurs béliers.

Notre critique 2/5 :

Voilà selon le jury, le meilleur film de la section Un Certain Regard 2015. Ce film islandais souffre d’un gros problème de scénario, le rythme peinant à décoller dans sa première heure, ce qui fait long. Les paysages de l’Islande sont toujours aussi impressionnants et superbement filmés, mais ce n’est plus une nouveauté depuis longtemps. Ce qui aurait du être le cœur du film, cette opposition entre deux frères qui ne se parlent plus depuis quarante ans, arrive frontalement bien trop tard et ne dure pas assez longtemps. Dès qu’on les voit ensemble, se jaugeant au loin, communiquant sans se parler, le film renaît et nous capte, nous amuse (un peu) et nous touche (un peu plus). L’échange de ces taiseux vivant seul se fait grâce / à cause d’une infection qui frappe leurs béliers, leur bétail étant symbolique de leur opposition parfois musclée, Gummi et Kiddi étant eux-même des béliers qui se battent front contre front mais sans corne. Une comédie dramatique un peu trop vaine, moins burlesque finalement que mélancolique, les quelques tentatives d’humour font au mieux sourire, une séquence qui s’achève aux portes des urgences étant la seule scène qui fasse vraiment rire malgré le contexte sombre.


Les Élues (Las Elegidas) de Les élues afficheDavid Pablos

Synopsis : Sofia, 14 ans, est amoureuse d’Ulises. A cause de lui, et malgré lui, elle devient la proie d’un réseau de prostitution. Pour l’en sortir, Ulises devra lui trouver une remplaçante…

Notre critique 2/5 :

Le Mexique est un pays de violences et de maltraitances où la femme est un produit à vendre parmi d’autres. C’est en substance ce que résume ce film et d’autres films de festivals (Sicario, Heli, Daniel et Ana…) sans compter quelques blockbusters. Dénoncer cette réalité, pourquoi pas, le faire avec complaisance, c’est déjà plus gênant. C’est hélas un peu le cas avec Les Élues plutôt maîtrisé dans sa réalisation comme le prouve la séquence d’ouverture, la première fois d’une adolescente avec le garçon qui l’a séduite… pour la « tester » avant de faire d’elle la nouvelle victime d’un gang de traite de blanches. Mais le film s’égare lorsqu’il représente l’acte sexuel avec des acteurs pour signifier concrètement le viol à l’écran, ce qui est toujours gênant, l’auteur alors se faisant complice d’un geste qu’il prétendait dénoncer et plaçant le spectateur dans une position de voyeur. Autres maladresses de narration, un split screen inutile et la double fin malhonnête car dénuée d’explication, n’en disons pas plus pour ne pas trop en révéler. Les deux principales victimes sont interprétées par deux débutantes convaincantes, Nancy Talamantes (Sofia) et Leidi Gutierrez (Marta), et leur bourreau (Ulises) par Oscar Torres qui joue finement en innocent (voire en héros) alors qu’il n’est pas moins coupable que son père et son frère à la tête du trafic. Typiquement le long-métrage qui a failli être fort et n’est qu’un pétard mouillé à cause d’erreurs de débutant.

 


Nahid afficheNahid de Ida Panahandeh

Synopsis : Nahid, jeune divorcée, vit seule avec son fils de 10 ans dans une petite ville au bord de la mer Caspienne. Selon la tradition iranienne, la garde de l’enfant revient au père mais ce dernier a accepté de la céder à son ex femme à condition qu’elle ne se remarie pas. La rencontre de Nahid avec un nouvel homme qui l’aime passionnément et veut l’épouser va bouleverser sa vie de femme et de mère.

Notre critique 4/5 :

Premier long-métrage de l’iranienne Ida Panahandeh, Nahid est un exemple d’écriture dans le récit et la caractérisation de personnages mais aussi de mise en scène, d’une très agréable sobriété. Un premier vrai coup de cœur pour la section Un Certain Regard 2015, on en espère encore d’autres. Premier atout, il s’agit d’un vrai film choral porté par une belle distribution, le moindre petit rôle, même sans dialogues ou presque, existant à l’écran avec une réelle profondeur, autant les adultes que les enfants. Le personnage féminin principal (Nahid jouée dans une tension permanente par Sareh Bayat) n’est pas forcément sympathique malgré l’empathie que l’on peut avoir pour ses déboires (qui ne sont pas sans rappeler ceux de Viviane Amsellem), ses atermoiements sentimentaux étant parfois d’une grande maladresse, le nouveau fiancé en prend pour son grade malgré la constance de son comportement patient. L’ex mari aux faux airs de Nino Manfredi (Navid Mohammad Zadeh au jeu inattendu) déjoue aussi les attentes, ne répondant pas aux critères habituels du cinéma iranien. La réalisatrice fait exister une communauté, un petit village grâce à sa direction d’acteurs magistrale complétée par de belles idées de mise en scène, notamment cette caméra qui filme une plage. Il y a du Atom Egoyan dans ce rapport aux images qui saisissent des instants de bonheur pour en faire une arme et soulignent la vie sous surveillance en Iran où tout le monde observe tout le monde, des voisins trop curieux (dès les premiers instants dans l’immeuble où vit Nahid) et évidemment à l’extérieur. Beaucoup d’humour enfin dans ce film qui déjoue les clichés du « film iranien » et révèle une conteuse d’histoires douée, qui évoque avec intelligence le rapport à l’argent, au style feutré et très personnel. Un vrai coup de cœur.

https://youtu.be/biTIi4b6Nq8

 

 

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