Test Blu-ray 4K Ultra HD : Cabal

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Cabal

États-Unis, Royaume-Uni, Canada : 1990
Titre original : Nightbreed
Réalisation : Clive Barker
Scénario : Clive Barker
Acteurs : Craig Sheffer, David Cronenberg, Anne Bobby
Éditeur : ESC Éditions
Durée : 1h42
Genre : Fantastique, Horreur
Date de sortie cinéma : 16 janvier 1991
Date de sortie 4K : 7 mai 2025

Convaincu par son propre psychiatre, le Dr. Decker, qu’il pourrait être le serial killer qui s’attaque régulièrement aux familles de la région, Aaron Boone quitte sa petite amie pour se réfugier derrière les grilles du cimetière de Midian, accès à une cité mythique dont les habitants, des monstres appelés Nocturnes, hantent ses cauchemars. Mordu par l’un d’eux puis criblé de balles par la police, Boone rejoint à son tour les rangs des créatures des ténèbres. Pendant ce temps, à la surface, les autorités organisent une vaste expédition punitive contre Midian…

Le film

[4/5]

Le parcours de Clive Barker est réellement atypique. Artiste « total », s’exprimant largement dans l’écriture mais également par le biais du cinéma, de la peinture, de la bande dessinée, de la mise en scène de théâtre et même du jeu vidéo, Barker fut repéré dans les années 80 principalement grâce à sa série des « Livres de sang », recueils de nouvelles pour lesquels il reçut l’adoubement public de l’un des plus grands noms de la littérature fantastique. « J’ai découvert l’avenir de la littérature de terreur, il s’appelle Clive Barker. Il est si bon que j’en suis presque littéralement muet. A côté de ce qu’accomplit Barker, le reste d’entre nous semble avoir été plongé dans la léthargie durant les dix dernières années » pouvait-on lire en quatrième de couverture de ses romans de l’époque – des dithyrambes signés de la plume de Stephen King en personne…

En matière de cinéma (puisque c’est plutôt cet aspect qui nous intéresse ici), on pourra d’ailleurs créer quelques passerelles entre les carrières des deux romanciers : tous deux ont en effet eu des velléités de cinéastes pour le moins contrariées. Si on ne compte plus les adaptations des romans de Stephen King, et si bon nombre d’entre elles rencontrent de nos jours de grands succès publics, cela n’a pas toujours été le cas ; d’ailleurs, Maximum overdrive, sa seule expérience en tant de metteur en scène s’est soldée par un échec cuisant, à la fois du point de vue public et artistique. Clive Barker n’a pas eu de chance non plus avec le cinéma : s’il est à l’origine d’une franchise – Hellraiser – dont le succès n’a jamais été démenti, ses deux autres expériences derrière la caméra ont été calamiteuses d’un point de vue personnel : les tournages de Cabal (1990) et Le Maître des illusions (1995) ont été particulièrement difficiles, et les deux films se sont vus massacrés au montage par leurs producteurs, au point d’en apparaître complètement dénaturés.

Pour autant, même mutilés, ces deux films demeurent de sacrées curiosités à découvrir. Barré, généreux, foisonnant d’idées foutraques, Cabal s’impose ainsi non seulement comme le film le plus ambitieux de Clive Barker, mais aussi tout simplement comme l’un des films les plus ambitieux du cinéma fantastique tout court, toutes époques et nationalités confondues. Suivant une vague ligne directrice biscornue passant du thriller au film de monstres le plus débridé, le cinéaste / romancier se permet nombre de digressions invraisemblables, au point souvent de perdre le spectateur au milieu d’un maelström bizarroïde et 100% foutraque, se payant pourtant le luxe de s’avérer étrangement et paradoxalement tout à fait homogène. Mais ce qui frappera le plus le spectateur qui reverra Cabal presque trente ans après l’avoir découvert en salles, c’est à quel point le film semblait en avance sur son temps, en décalage complet avec la production horrifique des années 80/90.

Fou, énergique mais bancal dans les grandes largeurs, le film de Barker mérite donc amplement la révision, et mériterait surtout de voir son riche univers à nouveau développé à l’écran, à travers par exemple une série TV d’envergure : dix à douze heures de programme, voire plus, parmi les monstres de Midian permettraient sans doute à Clive Barker d’étoffer le background de chaque créature, et de se laisser aller à autant de digressions qu’il le désirerait. Étonnant, en ces temps de reboots et revivals à tire-larigot, que personne n’y ait encore pensé…

Le coffret Blu-ray 4K Ultra HD

[5/5]

En une dizaine d’années d’activité sur critique-film.fr, c’est déjà la troisième fois que l’on vous parle d’une sortie de Cabal en vidéo : le film de Clive Barker était déjà sorti sur support DVD en 2015, dans une édition Warner dénuée de suppléments et de version française. En 2019, le film repointerait le bout de son nez sous les couleurs d’ESC Éditions, dans une galette Haute Définition proposée dans un tirage limité et rapidement épuisé. Six ans plus tard, revoici donc Cabal, mais cette fois, au format Blu-ray 4k Ultra HD. La particularité la plus notable de cette nouvelle édition est donc de nous proposer le film en Katka en version « cinéma », mais également en version « Director’s Cut » : un véritable événement pour les fans du film, dans le sens où il s’agit là d’une exclusivité mondiale. L’éditeur français a en effet reconstruit une version Director’s Cut 4K à partir d’éléments 2K qui ont été upscalés, étalonnés en HRD10 / Dolby Vision et intégrés au montage cinéma : même si les séquences en 2K sont sans doute un peu moins fines et homogènes, le résultat est tout à fait réussi.

La version « Director’s Cut » de Cabal dure une vingtaine de minutes de plus que la version que l’on avait pu découvrir dans les salles. Dans la première moitié du film, on pourra constater de nombreux ajouts destinés à enrichir les personnages, et en particulier celui de Lori (Anne Bobby). Outre une intéressante et mystérieuse séquence de rêve de Boone, l’actrice Anne Bobby fait montre de ses talents de chanteuse en interprétant le tube des années 60 « Johnny get Angry » de Joanie Sommers. On notera également quelques petits ajouts esthétiques dont le sens n’est pas toujours clair, mais qui contribuent à renforcer l’étrangeté du film. Le plus intéressant cela dit dans ce nouveau montage est sans conteste la fin alternative, qui réserve un tout autre destin à différents personnages : [Attention Spoilers] Lori se suicide pour ne pas être séparée de Boone, qui fait désormais partie de Midian. Le prêtre Ashberry tue le chef de la police Eigerman avant d’annoncer sa vengeance contre Midian. Narcisse ne survit pas non plus, périssant de la main de Decker. [fin des Spoilers] Certaines scènes de la version « cinéma » ont également été retirées, telles que celle au cours de laquelle Decker se réveille avec l’aide du prêtre ; quelques vannes de la part des policiers disparaissent aussi, et les dialogues du personnage de Dirk Lylesberg (incarné par Doug Bradley, interprète de Pinhead dans la saga Hellraiser) ont été post-synchronisés avec la voix de l’acteur.

On notera par ailleurs que cette édition 4K de Cabal (1 Blu-ray 4K + 2 Blu-ray + Livret) nous est comme d’habitude présentée dans un écrin splendide : un sublime Steelbook aux couleurs du film. En deux mots comme en cent, le packaging est une nouvelle fois au top, dans la plus parfaite continuité du travail éditorial effectué par le ESC Éditions depuis quelques années. Côté master, la restauration Katka de Cabal s’avère tout simplement majestueuse : l’image du Blu-ray 4K Ultra HD nous propose un rendu visuel époustouflant, avec une granulation préservée et un niveau de détail extraordinaire, et ce même si le film se déroule le plus souvent dans le noir ou dans l’obscurité – grâce à l’étalonnage HRD10 / Dolby Vision, les couleurs, les contrastes et les noirs sont impressionnants : c’est magnifique, un bel hommage rendu au travail sur l’image assuré par Clive Barker et son chef op’ Robin Vidgeon. Même en ce qui concerne le Director’s Cut, qui intègre des éléments 4K upscalés, le master est stable et parfaitement respectueux du grain argentique d’origine, avec des couleurs resplendissantes et un piqué d’une précision extrême. Même constat d’excellence et de fidélité au matériau d’origine du côté des pistes sonores : version française et anglaise sont mixées en DTS-HD Master Audio 2.0, et proposent un bon équilibre global et une excellente stabilité d’ensemble, sans souffle ni craquements intempestifs. La version française d’origine est trop saturée et un peu plate. On notera également la présence d’une VO en DTS-HD Master Audio 5.1 sur le Director’s Cut, avec des effets d’ambiances sobres et efficaces, en plus d’un bon placement, dynamique à souhait, de la sublime musique de Danny Elfman.

Du côté des suppléments, outre un livret de 32 pages intitulé « Clive Barker : L’homme qui aimait les monstres », l’éditeur ESC Éditions nous propose des heures et des heures de suppléments riches et intéressants. Pour les suppléments hérités de l’édition de 2019, on retrouvera le commentaire audio de Clive Barker et du producteur Mark Alan Miller (VOST). On retrouvera également l’analyse de quatre séquences du film par Christophe Foltzer (12 minutes), qui ne se montrera pas à l’image mais assurera son travail d’analyse de la mise en scène et des influences du film en voix off. Il évoquera donc la première interaction entre Decker et Boone au téléphone, la descente de Lori à Midian, la scène du « trou dans le mur » mettant en scène Lori et Boone au motel, réflexion sur le statut de voyeur du spectateur, et enfin le passage à tabac de Boone par le prêtre. On enchaînera ensuite avec une large sélection de scènes coupées et/ou alternatives (23 minutes, VONST). Certaines sont intéressantes, certaines sont vraiment sympa, même si une poignée d’entre elles sont clairement issues d’une source VHS d’une qualité très mauvaise. On terminera enfin avec « Tribes of the Moon », le très bon making of rétrospectif du film (1h12, VOST), qui contient des entretiens avec Craig Sheffer, Anne Bobby, Doug Bradley et plusieurs autres acteurs jouant les « monstres » du film. L’ensemble est monté de façon assez rythmée, et les interventions se font sans langue de bois : on y abordera donc pêle-mêle la conception et le scénario du film et la mise en place des maquillages et des effets spéciaux. On y trouvera également quelques anecdotes amusantes sur le casting : on apprendra ainsi que Marc Almond, membre fondateur du groupe de new wave Soft cell, devait à l’origine incarner le rôle d’Ohnaka, finalement attribué à Simon Bamford. Le documentaire ne fait pas l’impasse sur le tournage et la post-production pour le moins chaotiques de Cabal, et le fait que Clive Barker se retrouve forcé de modifier son montage… En deux mots, un must pour les amoureux de ce film unique, même si bien sûr le grand absent du sujet est le réalisateur lui-même.

Mais ce n’est pas tout : l’éditeur nous a également réservé un entretien avec Olivier Desbrosses (26 minutes), consacré à la musique du film et à la carrière de Danny Elfman, évoquant entre autres ses débuts avec le groupe de new wave Oingo Boingo et son travail aux côtés de cinéastes tels que Tim Burton ou Sam Raimi. On continuera ensuite avec un entretien avec Bob Keen, Martin Mercer, and Paul Jones (42 minutes), au cœur duquel ces experts en maquillages et effets spéciaux reviendront sur leurs carrières respectives avant d’évoquer leur travail sur Cabal, qui a représenté pour eux un défi créatif majeur en raison de la nécessité de concevoir et de maquiller des monstres, ce qui leur a permis de laisser libre cours à leur imagination lorsqu’il s’est agi de créer ces personnages bizarroïdes. Place ensuite à une « Masterclass » consacrée à Bob Keen, qui reviendra de façon plus approfondie sur les monstres du film et les prothèses nécessaires à leur fabrication. On enchainera ensuite avec un entretien avec le réalisateur de deuxième équipe Andy Armstrong (20 minutes), qui reviendra sur les aspects techniques et l’ambition folle de Cabal, reviendra sur quelques anecdotes de tournage et évoquera sa collaboration avec Clive Barker.

Mais ce n’est pas terminé, puisqu’on aura également le droit à un entretien avec le monteur Mark Goldblatt (14 minutes), qui a débarqué sur le film lorsque ce dernier a commencé à rencontrer des « problèmes » avec la production. Engagé pour travailler avec le scénariste / réalisateur Clive Barker à faire des compromis et à résoudre les problèmes de rythme et de continuité du film, Goldblatt semble conscient de sa position délicate, même s’il précise que ce genre d’interventions fait partie du processus de production de nombreux longs-métrages. On embrayera avec un entretien avec l’illustrateur Ralph McQuarrie (5 minutes), qui nous montrera une série de « Concept Arts » créés pour le film, et on complétera ce sujet par une poignée de tests de Matte Paintings (9 minutes) destinées à développer et enrichir l’univers de Cabal. On terminera enfin avec des essais maquillage (5 minutes), des répétitions et tests (3 minutes), qui seront l’occasion de découvrir les acteurs sans leurs maquillage et prothèses de monstres, une version longue des scènes de torture (4 minutes), et une scène perdue en stop-motion (7 minutes), qui donnera à nouveau la parole à Bob Keen. L’éditeur nous propose également les traditionnelles bandes-annonces.

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