Critique : Belle du Seigneur

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Affiche BDSBelle du Seigneur

France, Luxembourg, Royaume-Uni, Allemagne : 2013
Titre original : Belle du Seigneur
Réalisateur : Glenio Bonder
Scénario : Glenio Bonder, Vincenzo Cerami, James Dearden
Acteurs : Natalia Vodianova, Jonathan Rhys Meyers, Marianne Faithfull, Ed Stoppard
Distribution : Océan Films
Durée : 1h44
Genre : Drame
Date de sortie : 19 juin 2013

Globale : [rating:2.5/5][five-star-rating]

Le défi était à la mesure de l’oeuvre d’Albert Cohen, figure de proue de la littérature française du XXe siècle. Le long métrage posthume de Glenio Bonder, qui voyait dans Belle du Seigneur le film d’une vie, est un hommage poignant à Albert Cohen. Malgré de nombreuses maladresses et des infidélités au roman, le long métrage s’avère tout de même être une intéressante adaptation.

SynopsisGenève, 1935. Solal travaille à la Société des Nations. Séducteur affirmé, il s’éprend de la belle Arianne, une aristocrate protestante mariée à un de ses confrères, Adrien. Très vite, Arianne s’éprend à son tour de Solal. Leur amour aussi puissant que destructeur, les poussera inéluctablement vers une destinée tragique.

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La Belle et son Seigneur

Le choix d’acteurs encore discrets et bancales, dont le répertoire n’est pas aussi brillant que l’oeuvre, aurait pu conduire à une issue tragique. Toutefois, la beauté espiègle de Natalia Vodianova, ainsi que son charme, son élégance et sa pureté en font une héroïne à la fois touchante et esseulée, une femme prête à tout pour suivre son amant. Prise en tenaille par les foudres de la passion, l’actrice se montre parfois trop hésitante et souvent molle, mais enregistre toute de même une surprenante prestation. Jonathan Rhys Meyers est quant à lui magnifique, violent et sincère, fidèle représentation d’un homme dont l’égo le consume. C’est à travers ses yeux bleus turquins et son regard volatile, que le spectateur peut ressentir l’achèvement de la raison, celui qui le mène aux confins de la passion dans de nombreuses scènes souvent violentes et cruelles, image du lien qui unit le Seigneur Solal à la Belle Arianne. La justesse du long métrage tient aux artifices choisis, exaltations sincères des intermittences du cœur. La musique accompagne nonchalamment les pas des personnages, transformant l’énergie du désir en un souffle destructeur. La caméra épouse également la délicatesse d’Arianne et les peurs incurables de Solal, effrayé par l’ampleur grandissante de l’Allemagne nazie.

 

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Une timide transposition

Face au chaos provoqué par la montée des fascismes, et incapable d’y opposer la moindre résistance, le personnage de Solal nous est largement dépeint sous un jour sombre, rendant justice à l’oeuvre d’Albert Cohen. Le long métrage nous pousse donc à purger cette violence, à la voir à travers l’entrelacement du sexe et de la mort, de la violence et de l’espoir. Ces nombreuses oxymores mêlées, fidèlement représentées par l’esthétisme des scènes, sont une ode à la passion destructrice des deux amants qui les pousse inéluctablement vers une destinée tragique. Le film demeure malheureusement fort incomplet et manque ainsi de pertinence dans le choix des scènes : certains passages ne sont que de pures pertes de temps et d’autres n’ont aucune raison d’être. Cela conduit parfois à un essoufflement du film, qui pousse l’appesantissement de l’action vers une forme d’ennui. De même, le début du film n’esquisse que trop rapidement les débuts de la passion, sans réellement mettre en lumière les enjeux sous-jacents ni restituer la polyphonie du roman. Malgré des efforts évidents, le film ne parvient pas à transposer certains des piliers fondateurs de Belle du Seigneur : l’amour inconditionnel d’Albert Cohen pour la langue française, ainsi que sa vision de la mort et du temps. Le début du film l’illustre cruellement, avec un enchaînement beaucoup trop brutal et sans nuance, qui efface sans ménagement la naissance des sentiments.

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Résumé

Belle du Seigneur est un film intelligent, qui transpose plutôt bien l’univers de l’oeuvre d’Albert Cohen mais sans vraiment pouvoir faire mieux. Par ses choix scénaristiques, le long métrage n’en demeure pas moins allusif et n’effleure que trop peu le brio d’un roman éternel.

 

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