Critique : 120 battements par minute

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120 battements par minute

France : 2017
Titre original : –
Réalisation : Robin Campillo
Scénario : Robin Campillo, Philippe Mangeot 
Acteurs : Nahuel Perez Biscayart, Arnaud Valois, Adèle Haenel
Distribution : Memento Films Distribution
Durée : 2h22
Genre : Drame
Date de sortie : 23 août 2017

3.5/5

L’an dernier, lors du Festival de Cannes, l’ensemble de la critique s’était enflammée à propos du film allemand Toni Erdmann et avait mal vécu que ce film reparte bredouille (A juste titre, nous permettrons nous d’ajouter). Cette année, c’est un film français, 120 battements par minute, qui, à Cannes, s’est retrouvé coqueluche de la critique. Un engouement beaucoup plus mérité, même si ce film, une fois de plus trop long, est loin d’être parfait. In fine, une récompense prestigieuse : le Grand Prix du Jury. On ne manquera pas de rappeler que 120 battements par minute est le 3ème long métrage réalisé par Robin Campillo après Les revenants et Eastern Boys et qu’il a beaucoup travaillé comme scénariste et comme monteur auprès de Laurent Cantet.

Synopsis : Début des années 90. Alors que le sida tue depuis près de dix ans, les militants d’Act Up-Paris multiplient les actions pour lutter contre l’indifférence générale.
Nouveau venu dans le groupe, Nathan va être bouleversé par la radicalité de Sean.

Les débuts d’Act-Up

C’est en 1981 qu’un premier cas de sida a été signalé dans notre pays. 8 ans plus tard, Act-Up Paris, association militante de lutte contre le sida, a vu le jour, sur le modèle de l’association américaine Act-Up fondée 2 ans plus tôt. Ce sont les débuts de cette association que Robin Campillo a entrepris de relater dans 120 battements par minute, au travers d’une reconstitution minutieuse de ses assemblées générales et de ses actions militantes qui pouvaient se dérouler aussi bien dans les lycées que dans la rue ou dans les sièges sociaux des laboratoires pharmaceutiques.

Après une première partie au caractère quasiment documentaire et, à un détail près, particulièrement passionnante, le film, en avançant, s’attache de plus en plus à la relation amoureuse qui s’établit entre Nathan, « séro-neg », et Sean, un militant très actif mais gagné de plus en plus par la maladie.

On a l’impression d’y être !

Act-Up Paris, le réalisateur Robin Campillo connaît bien, ayant été membre de cette association à partir d’avril 1992. Quant à Philippe Mangeot, avec qui il a écrit le scénario, il connait encore mieux Act-Up Paris, en ayant été le Président durant 2 ans. A cette parfaite connaissance du sujet vient s’ajouter le talent de metteur en scène de Campillo, un talent qui se manifeste particulièrement dans la représentation des AG de l’association : ces AG, on à l’impression de les vivre vraiment, de se retrouver impliqué et on va même parfois jusqu’à avoir de la peine à ne pas prendre la parole ! On s’amuse aussi des bonnes intentions affichées au début d’une AG : on doit manifester son acquiescement par des claquements de doigts et non en applaudissant, on doit s’inscrire pour pouvoir intervenir, on doit attendre son tour et on doit s’efforcer de faire court. On se doute bien que ces bonnes intentions ne sont pas toujours tenues !

Ce retour vers le début des années 90 présente aussi l’intérêt de montrer comment la vie associative a pu évoluer en moins de 30 ans : à cette époque, il n’y avait ni internet, ni réseaux sociaux, ni téléphone mobile. La diffusion d’images ne se faisait que par la télévision d’où la nécessité de marquer les esprits en travaillant à la mise en scène des actions entreprises et en recherchant les slogans les plus percutants. La seule façon d’agir était d’être physiquement présent, ce qui explique sans doute le nombre important de participants lors des réunions publiques.

 

A un détail près !

Nous avons écrit plus haut que la première partie du film était passionnante « à un détail près ». Il se trouve qu’entre chaque représentation passionnante d’une AG ou d’une action militante, le réalisateur a choisi d’insérer des interludes, tous bâtis plus ou moins sur le même moule : des jeunes gens qui dansent sur fond de musique house et des images qui se fondent sur des cellules qui s’agitent. On peut y voir le combat entre des jeunes gens qui veulent continuer à vivre leur vie à fond quels que soient les risques, face à la progression d’une maladie très souvent mortelle. On est donc là face à une bonne idée de cinéma mais qui est malheureusement gâchée par son utilisation trop systématique et par la trop longue durée de ces interludes qui aboutissent à casser le rythme du film.

Lorsqu’il a composé son casting, Robin Campillo s’est attaché à y reproduire la diversité d’Act-Up : un mélange de professionnels du spectacle (théâtre, cinéma, danse, cirque) et d’amateurs trouvés via Facebook ou dans des boites de nuit ; des gays pour la plupart, dans un souci d’implication, même si, grâce aux multithérapies, les rapports avec le sida ne sont plus les mêmes qu’en 1990. En fait, on ne trouve à l’affiche qu’une comédienne de grande renommée, Adèle Haenel, épatante comme d’habitude. Par ailleurs, on ne peut que remarquer l’excellente prestation de Nahuel Perez Biscayart et d’Arnaud Valois, les comédiens qui interprètent les rôles difficiles de Sean et de Nathan et qui rehaussent une deuxième partie de film qui n’arrive pas trop à choisir entre pur mélo et froide description.

Conclusion

Il est indéniable que, à Cannes, Robin Campillo a marqué les esprits avec ce film consacré aux premiers moments de l’association Act-Up Paris et il va probablement le faire à nouveau dans les salles. Un film en quelque sorte dédié à toutes celles et tous ceux qui sont morts du sida, mais aussi à celles et ceux qui ont survécu et qui continuent de se battre contre la maladie.

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