Critique : Les gardiennes

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Les gardiennes

France : 2017
Titre original : –
Réalisation : Xavier Beauvois
Scénario :  Xavier Beauvois, Frédérique Moreau, Marie-Julie Maille d’après le roman de Ernest Pérochon  
Acteurs : Nathalie Baye, Laura Smet, Iris Bry
Distribution : Pathé Distribution
Durée : 2h14
Genre : Drame
Date de sortie : 6 décembre 2017

3/5

Depuis 2010 et Des hommes et des dieux, Grand Prix du Festival de Cannes 2010 et César du meilleur film français l’année suivante, Xavier Beauvois s’est montré davantage présent comme acteur que comme réalisateur. Sorti en janvier 2015, son sixième film, La rançon de la gloire, n’avait reçu qu’un accueil mitigé. Voici le 7ème, Les gardiennes, première adaptation d’un roman par le réalisateur, premier tournage en numérique.

Synopsis : 1915. A la ferme du Paridier, les femmes ont pris la relève des hommes partis au front. Travaillant sans relâche, leur vie est rythmée entre le dur labeur et le retour des hommes en permission. Hortense, la doyenne, engage une jeune fille de l’assistance publique pour les seconder. Francine croit avoir enfin trouvé une famille…

Le rôle des femmes durant la guerre de 14

Avec la grande majorité des hommes partis combattre durant la première guerre mondiale, une solution a dû être trouvée pour continuer à assurer le fonctionnement des exploitations agricoles et des usines dans notre pays : jusqu’alors confinées le plus souvent à la fonction de mère et aux travaux domestiques, ce sont les femmes qui, pour beaucoup, pendant 4 ans, ont permis aux activités économiques de continuer à tourner. Malheureusement, les progrès que ces conditions difficiles avaient permis d’obtenir dans la condition féminine ont, pour la plupart, très vite disparus avec le retour de la paix.

Le travail effectué par les femmes durant la première guerre mondiale, c’est, entre autre, ce que nous montre Xavier Beauvois dans Les gardiennes, adaptation très libre du roman homonyme de Ernest Pérochon, paru en 1924. Ce film nous conduit dans une famille en charge d’une ferme dans le Limousin. Hortense, la doyenne, est la mère de 3 enfants : sa fille, Solange, ne pourra jamais avoir d’enfant, mais Clovis, l’homme qu’elle a épousé, avait eu une fille, Marguerite, de son premier mariage ; Constant est instituteur et c’est avec le grade de lieutenant qu’il combat dans les tranchées ; Quant à Georges, le plus jeune, il considère Marguerite comme sa petite sœur, ce qui n’empêche pas cette dernière d’être amoureuse de lui. Ces 3 hommes ont été réquisitionnés et ils ne reviennent que de temps en temps, pour de courtes permissions. D’où la nécessité, pour Hortense, d’engager une jeune fille pour aider aux divers travaux de la ferme : c’est Francine, 20 ans, qui vient de l’assistance publique.

Esthétiquement réussi mais des longueurs !

Xavier Beauvois est le premier à l’affirmer : l’adaptation du roman d’Ernest Pérochon au cinéma n’était possible qu’au prix de nombreuses modifications : « Il y a des choses qu’on peut facilement écrire mais qu’on ne peut pas filmer ». En tout cas, si le film consacre beaucoup de temps à dépeindre la vie à la ferme dans ce début de 20ème siècle, avec de belles images inspirées par Millet et Courbet, il raconte aussi les drames vécus par la famille, l’amour qui nait entre Francine et Georges, l’absence du mari qui trouble certaines femmes, le poids des rumeurs dans un petit village, l’injustice que peut commettre une mère pour sauver la réputation de sa fille.

De ce beau sujet, Xavier Beauvois a fait un film esthétiquement très réussi mais qui glisse parfois dans le pathos et qui manque de temps en temps de vivacité et de chaleur humaine. En vérité, pour son premier film tourné en numérique, le réalisateur est malheureusement tombé dans le défaut provenant des nouvelles conditions économiques générées par cette technique : le film trop long ! Reste à savoir à qui attribuer ce défaut : à Xavier Beauvois ou à Marie-Julie Maille, à la fois épouse du réalisateur, coscénariste et monteuse du film ?

La découverte d’une jeune comédienne

C’est Nathalie Baye qu’on retrouve, dans le rôle d’Hortense, à la tête de la distribution. Une Nathalie Baye parfaitement vieillie par Ronald Haldimann, le chef maquilleur mais qui, malheureusement, semble par compte avoir rajeuni dans son jeu, avec le retour de ses tics de début de carrière, le fameux sourire par exemple, qui avaient petit à petit disparu avec le temps. Le rôle de Solange, la fille d’Hortense, est (bien !) interprété par Laura Smet, fille de Nathalie Baye. Olivier Rabourdin, Nicolas Giraud et Cyril Descours interprètent de façon solide les rôles de Clovis, Constant et Georges. Et puis, il y a la découverte du film, Iris Bry, l’interprète du rôle de Francine : premiers pas devant une caméra, une interprétation lumineuse.

La plus belle réussite du film étant, à côté de la découverte d’Iris Bry, la qualité de la photographie, la moindre des choses consiste à citer le nom de Caroline Champetier, la directrice de la photographique, habituée à travailler avec Xavier Beauvois, mais également, entre autres, avec Anne Fontaine et Leos Carax.

Conclusion

On connait depuis longtemps les qualités de Xavier Beauvois. C’est sans doute pourquoi on peut avoir tendance à se montrer plus sévère avec lui qu’avec des réalisateurs dont on attend moins. Toutefois, ce n’est pas être particulièrement sévère que d’avoir tendance à renâcler devant certaines longueurs de ce film, par ailleurs fort estimable. Et puis, est-ce être sévère avec Nathalie Baye que de lui reprocher le retour de certains tics qu’on pensait avoir été définitivement gommés dans son jeu ?

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