Test DVD : Rossosperanza

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Rossosperanza

Italie, France : 2024
Titre original : –
Réalisation : Annarita Zambrano
Scénario : Annarita Zambrano
Acteurs : Margherita Morellini, Ludovica Rubino, Leonardo Giulani
Éditeur : Blaq Out
Durée : 1h27
Genre : Thriller
Date de sortie DVD : 1 avril 2025

Italie, années 90. Zena, 16 ans, fille du médecin du Pape et petite-fille d’un ancien fasciste, est admise à Villa Bianca, dernier recours de la bonne société italienne pour « soigner » les déviances d’une génération rebelle. Elle y rencontre trois adolescents avec lesquels elle se lie d’amitié : Marzia, une jeune fille nymphomane, Alfonso, un jeune homosexuel fantasque, et Adriano, enfermé dans un mutisme attachant et terrorisant…

Le film

[3/5]

Découverte en 2017 avec Après la Guerre, la réalisatrice Annarita Zambrano n’en a pas encore fini de régler ses comptes avec son pays natal, l’Italie. Avec Rossosperanza, elle s’éloigne cela dit des cicatrices des Années de Plomb abordées dans son premier long métrage, et opte pour une voie plus onirique, voire même grotesque, dans un film d’horreur rongé par le désir qui raconte les vestiges de l’Italie des années 1980. Le film tourne autour de quatre jeunes gens, tous issus de familles aisées et bourgeoises. Leurs parents les ont envoyés dans une prestigieuse – et coûteuse – institution pour enfants difficiles, la Villa Bianca. Mais même là-bas, leur malaise et leur inquiétude persistent, leurs désirs entre l’amour et la mort…

La narration de Rossosperanza, qui ne cesse de faire des allers et retours entre l’avant et l’après, le passé et le présent, la nature « sociale » de ces jeunes et une nature plus « libre », où la violence peut exploser – dans les intérieurs cossus de la Villa Bianca, au milieu du malaise de la haute bourgeoisie, lors de fêtes fastueuses où toutes sortes de personnalités prestigieuses sont conviées. Au fil des séquences, un fossé se creuse entre le réel et l’imaginaire. Formellement, Annarita Zambrano et son directeur photo Laurent Brunet s’amusent à recréer les reflets rouges et verts du cinéma de Dario Argento, auquel le titre du film fait forcément penser.

Pour autant, Rossosperanza prend d’autres directions, à la fois plus sociales et plus intimes, et s’imposera rapidement comme un film viscéral, fougueux et passionné, empruntant les chemins de traverse du cinéma de genre pour atteindre avant tout ses personnages qui ne parviennent à s’épanouir que dans les ténèbres, comme si l’obscurité pouvait devenir un refuge les protégeant de leurs cages dorées. Interprétés par Margherita Morellini, Ludovica Rubino, Leonardo Giulani et Luca Varone, les quatre protagonistes principaux s’imposent comme autant d’apparitions au cœur du film, apparaissant et disparaissant à l’envi. A leurs côtés, comme largué au milieu des bêtes sauvages, le bègue Tommaso (Elia Nuzzolo) refuse quant à lui de se laisser envahir par le ressentiment et la haine. Mais son cri de liberté sera étouffé dans une des scènes les plus fortes du film, au cœur de laquelle il subira les pires humiliations.

Rossosperanza est aussi un film sur le(s) corps, sur la sexualité, peut-être même un fantasme intime sur les superpuissances évoluant au cœur d’une Italie qui, dans sa corruption flagrante et généralisée, multipliait les vices et les signes de la décadence. Ainsi, si Annarita Zambrano n’ose pas aborder de front la politique à la façon d’un Elio Petri dans les années 70, Rossosperanza n’en demeure pas moins un film qui raconte aussi, à sa manière, l’Italie de ces années-là, hantée par les fantômes de l’Église, de Bettino Craxi et Silvio Berlusconi… Le tout rythmé par le fameux morceau « Lullaby » de The Cure, qui rythme le film à la manière d’une berceuse terrifiante. Malheureusement, tout au long du film, on ne pourra s’empêcher de penser qu’Annarita Zambrano piétine sans jamais les égaler les plate-bandes formelles et thématiques du chef d’œuvre La Solitude des nombres premiers (Saverio Costanzo, 2010).

Le DVD

[4/5]

Si le film a remporté le « Prix des Jeunes Pass Culture » au Festival Écrans Mixtes 2024, Rossosperanza n’a malheureusement pas pu bénéficier d’une sortie dans les salles obscures. Qu’à cela ne tienne, il est aujourd’hui disponible au format DVD chez Blaq Out, et pour peu que vous fassiez le choix de le visionner sur un diffuseur approprié, cette version DVD vous permettra de découvrir le nouveau film d’Annarita Zambrano dans des conditions globalement satisfaisantes. Rodé au format DVD, Blaq Out limite la casse : en dépit des partis pris esthétiques forts et de la photo signée Laurent Brunet, la définition, le piqué et les couleurs composent correctement avec les limites d’un encodage en définition standard. Côté son, le film est proposé en VO italienne uniquement, en Dolby Digital 5.1, et le mixage s’avère dynamique et bien enveloppant. Blaq Out n’oublie cependant pas les cinéphiles qui visionnent leurs films à domicile sans utiliser de Home Cinema, et l’éditeur nous propose également un mixage Dolby Digital 2.0, acoustiquement plus cohérent si vous visionnez Rossosperanza sans bénéficier d’un système de spatialisation du son.

Dans la section bonus, l’éditeur nous propose un entretien avec Annarita Zambrano (12 minutes). La scénariste / réalisatrice reviendra sur la genèse et le tournage de son film, ainsi que sur sa volonté de se laisser porter par l’énergie du moment et la force des images : l’idée était de faire fi du scénario afin de créer un pur film d’atmosphère, purement « sensoriel ». Intéressant.

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