Jeunes mères
Belgique, France : 2025
Titre original : –
Réalisation : Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne
Scénario : Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne
Interprètes : Babette Verbeek, Elsa Houben, Janaïna Halloy Fokan, Lucie Laruelle
Éditeur : Blaq Out
Durée : 1h41
Genre : Drame
Date de sortie cinéma : 23 mai 2025
Date de sortie DVD/BR : 7 octobre 2025
Jessica, Perla, Julie, Ariane et Naïma sont hébergées dans une maison maternelle qui les aide dans leur vie de jeune mère. Cinq adolescentes qui ont l’espoir de parvenir à une vie meilleure pour elles-mêmes et pour leur enfant.
Le film
[4/5]
Cela faisait plusieurs films que des rabats-joie se délectaient à débiner les frères Dardenne, prétendant que leur cinéma n’évoluait pas, qu’ils tournaient en rond, voire qu’ils radotaient. Voilà un grief qu’ils ne pourront pas faire concernant Jeunes mères, leur 13ème long métrage, la plupart de leurs films ayant été présentés au Festival de Cannes. En effet, ce film, qui a obtenu le Prix du scénario lors du tout récent Festival de Cannes, représente leur première incursion dans le film choral. Avec une grande virtuosité, passant de l’une à l’autre, revenant plusieurs fois sur la situation de chacune d’entre elles, ils nous décrivent la vie et les décisions, choisies ou subies, de 4 adolescentes qui se sont retrouvées enceintes et qui sont hébergées dans une « Maison maternelle ». Jessica, Perla, Julie et Ariane trouvent dans cette structure d’accueil le gite et le couvert, mais aussi l’assistance de puéricultrices et de psychologues qui les aident à prendre soin de leurs bébés et à préparer leur avenir. Au début du film, l’une d’entre elles n’a pas encore accouché.
Les cas de ces 4 adolescentes sont tous différents en ce qui concerne leur rapport avec leur mère, trop présente ou pas assez présente, leur ressenti vis à vis de leur bébé, le comportement du père du bébé s’il ne s’est pas déjà évanoui dans la nature. On remarquera d’ailleurs que, d’une manière générale, les pères sont quasiment absents de Jeunes mères : on ne rencontre jamais les pères des 4 adolescentes, on ne rencontre que 2 pères de bébé, l’un, Robin, s’avérant être un beau salaud, l’autre, Dylan, étant son contraire absolu. Le point commun entre ces 4 adolescentes, c’est la précarité économique dans laquelle elles ont toujours vécu. L’une d’entre elles, en plus, a des problèmes avec la drogue. La magie du cinéma des Dardenne fait que le film dégage de grands moments d’émotion sans jamais glisser dans le pathos. Les Dardenne ont su dans le passé découvrir des jeunes interprètes qui sont devenu(e)s de grand(e)s comédien(ne)s. Avec Jeunes mères, ce sont 4 jeunes comédiennes particulièrement talentueuses qu’ils nous font découvrir : Babette Verbeek, Elsa Houben, Janaïna Halloy Fokan, Lucie Laruelle . Le talent de directeurs d’acteurs des Dardenne va même jusqu’à obtenir des prestations remarquables de la part de tous jeunes bébés, comme cette scène formidable où l’un d’eux gratifie celui et celle qui jouent le rôle de ses parents d’un merveilleux sourire.
Le DVD
[4/5]
On ne s’attardera pas sur les qualités techniques de ce DVD qui réunit tout ce qu’on peut attendre de mieux pour ce type de galette en ce qui concerne la qualité de l’image. Le son et les accompagnements ne sont pas en reste, avec le choix entre Stéréo et 5.1, avec la possibilité d’une audio description, avec le choix de le regarder avec ou sans sous-titrage pour sourds et malentendants.
Un supplément de 27 minutes accompagne le film. Il s’agit d’un entretien avec Mathieu Macheret, critique de cinéma au Monde. Dans cet entretien très riche, le journaliste parle de l’influence considérable qu’ont eue les frères Dardenne dans l’histoire du cinéma et évoque le risque qu’ils ont pris en abandonnant dans Jeunes mères le suivi du parcours d’un seul personnage qui était jusque là leur marque de fabrique pour s’intéresser à la vie de 4 ou 5 jeunes femmes vivant dans un foyer. Mathieu Macheret se refuse à parler de film choral, rapprochant plutôt Jeunes mères de certains films à sketchs du néo-réalisme italien, avec une suite de scènes qui s’assemblent et se complètent, permettant, entre autre, de montrer que la maternité ne va pas forcément de soi, qu’il faut apprendre à devenir une mère et que, très souvent, il faut d’une certaine façon se défaire de sa propre mère pour pouvoir en devenir une. Il rapproche aussi Jeunes mères des mélodrames du cinéma muet et il insiste sur le caractère chrétien du cinéma des Dardenne, avec la figure de la Pietà, de la Vierge à l’enfant, omniprésente dans leur film. On peut ne pas partager entièrement tout ce que Mathieu Macheret a vu dans Jeunes mères, sa vision des choses n’en est pas moins fort intéressante à écouter.