Critique Express : L’amour qu’il nous reste

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L’amour qu’il nous reste 

Islande : 2025
Titre original : Ástin sem eftir er
Réalisation : Hlynur Pálmason
Scénario : Hlynur Pálmason
Interprètes : Saga Garðarsdóttir, Sverrir Gudnason, Ída Mekkín Hlynsdóttir, Grímur Hlynsson, Þorgils Hlynsson
Distribution : Jour2fête
Durée : 1h49
Genre : Drame, Famille
Date de sortie : 17 décembre 2025

3.5/5

Synopsis : La trajectoire intime d’une famille dont les parents se séparent. En l’espace d’une année, entre légèreté de l’instant et profondeur des sentiments, se tisse un portrait doux-amer de l’amour, traversé de fragments tendres, joyeux, parfois mélancoliques. Un regard sensible sur la beauté discrète du quotidien et le flot des souvenirs qui s’égrènent au rythme des saisons.

Le réalisateur islandais Hlynur Pálmason n’est pas homme à se laisser enfermer dans un genre particulier, bien au contraire. Après Winter brothers en 2018, un film social lorgnant sur le polar et à la radicalité assumée, après Un jour si blanc en 2020, véritable polar cette fois-ci, après Godland en 2022, film qui nous amenait dans la 2ème moitié du 19ème siècle alors que l’Islande était toujours soumise à la domination du DanemarkHlynur Pálmason a choisi, pour son 4ème long métrage, de nous faire partager avec beaucoup de tendresse la vie d’une famille, une femme, un homme, 3 enfants, une chienne, qui, d’une façon plutôt paisible, est en train de se décomposer. L’idée du film lui est venue il y a 4 ans, lorsqu’il tournait Nest, un court-métrage dans lequel Hlynur Pálmason avait filmé sur plusieurs saisons l’occupation par sa fille et ses 2 fils d’une cabane construite tout en haut d’un arbre. Et le réalisateur, lorsqu’il tournait ce film,  de se demander ce que leurs parents pouvaient bien faire pendant ce temps, des parents dont on parlait beaucoup mais qu’on ne voyait jamais ! Dans L’amour qu’il nous reste, on retrouve les 3 enfants du réalisateur, Ída, déjà présente dans Godland, Grímur et Þorgils, on pense bien reconnaître le lieu où se déroulait ce court métrage, et, cette fois ci, les parents, Anna et Magnús, sont bien présents, ainsi que Panda,  la chienne de la famille.  Remplaçant la cabane construite en haut d’un arbre, un poteau  est planté dans le sol, poteau auquel est accroché un mannequin de chevalier et qui sera régulièrement  utilisé pour faire comprendre aux spectateurs qu’on change de saison. Lorsqu’on parle d’une  famille, on évoque souvent le toit qui l’abrite et c’est par le toit d’un bâtiment qui s’envole que commence le film : le clin d’œil est évident, cette famille qui vit dans la campagne, sur la côte sud de l’Islande, n’est pas au meilleur de sa forme. En fait, Anna et Magnús sont séparés, mais, que ce soit le fruit de « l’amour qu’il leur reste » ou celui d’un désir commun de protéger leurs enfants, cela ne les empêche pas de se réunir régulièrement autour d’un bon repas en plein d’air ou de partir ensemble, avec les enfants, pour randonner dans la nature environnante.

Cette séparation qui ne parait pas peser de façon excessive sur les enfants, est-elle irrémédiable ? Anna n’a manifestement pas envie de revenir en arrière alors qu’on sent bien que Magnús, lui, se verrait bien reprendre une vie commune avec celle qui est toujours sa femme, un désir qui, lorsqu’il le manifeste, ne manque pas d’engendrer des heurts avec Anna. Son principal handicap, c’est son métier. Il est marin pêcheur sur un bateau du port voisin et le rythme de sa vie est fonction de la pêche au hareng, ce qui handicape fortement une vie familiale régulière et réduit sa disponibilité auprès de ses enfants. En plus, même si l’Islande est très en pointe en ce qui concerne l’égalité entre les hommes et les femmes, ce monde islandais de la pêche est toujours un monde très masculin, un monde qui, dans son comportement et dans ses conversations, ne fait pas étalage d’une très grande finesse. Anna, elle, est une artiste plasticienne qui aimerait bien se faire un nom mais qui se plaint de ne rencontrer que des galeristes davantage intéressés par des conversations tournant autour de la gastronomie et de l’œnologie que par les œuvres qu’elle leur a montrées. Après une sélection à la Semaine de la Critique cannoise pour Un jour si blanc et une sélection à Un Certain Regard pour Godland,  c’est dans la section Cannes Première que L’amour qu’il nous reste a été projeté au dernier Festival de Cannes. Une section qui n’a pas de palmarès mais cette projection a permis à Panda, la propre chienne du réalisateur, de se voir attribuée la Palm Dog 2025,  « meilleure performance canine sur grand écran ». Comme c’est toujours le cas dans les films de Hlynur Pálmason (et dans presque tous les films qui nous viennent de cette île du grand nord aux paysages si particuliers), la nature occupe une place importante dans L’amour qu’il nous reste. Cette nature est très bien mise en valeur par le Directeur de la photographie qui n’est autre que le réalisateur ! Etant par ailleurs artiste plasticien, ce sont ses propres œuvres qui sont présentées dans le  film comme ayant été réalisées par Anna. Dans un film par ailleurs très réaliste et ayant même parfois un côté documentaire aussi bien en ce qui concerne la pêche et l’industrie du poisson que sur le travail d’une artiste plasticienne, Hlynur Pálmason a glissé habilement une petite dose d’onirisme. Quant à la musique, le réalisateur a décidé d’utiliser presque intégralement une œuvre déjà existante, « Playing Piano for Dad » du compositeur et pianiste anglais aux tendances minimalistes H Hunt. Ce n’est peut-être pas la meilleure décision qu’il ait prise !

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