Dossier 137
France : 2025
Titre original : –
Réalisation : Dominik Moll
Scénario : Dominik Moll, Gilles Marchand
Interprètes : Léa Drucker, Guslagie Malanda, Mathilde Roehrich
Distribution : Haut et Court
Durée : 1h55
Genre : Policier
Date de sortie : 19 novembre 2025
4.5/5
Synopsis : Le dossier 137 est en apparence une affaire de plus pour Stéphanie, enquêtrice à l’IGPN, la police des polices. Une manifestation tendue, un jeune homme blessé par un tir de LBD, des circonstances à éclaircir pour établir une responsabilité… Mais un élément inattendu va troubler Stéphanie, pour qui le dossier 137 devient autre chose qu’un simple numéro.

Né d’un père allemand et d’une mère française, Dominik Moll est un réalisateur qui tourne peu mais certains de ses films ont profondément marqué la mémoire des cinéphiles, tels Harry, un ami qui vous veut du bien, en 2000, et, surtout, La nuit du 12, il y a 3 ans. Comme dans ce film, c’est de nouveau à une enquête policière qu’il se livre dans Dossier 137, film présenté en compétition officielle au dernier Festival de Cannes, mais une enquête bien différente puisque ceux qui, de toute évidence, sont les coupables sont eux-mêmes des policiers. En effet, en 2018, lors des manifestations des gilets jaunes, une certaine violence policière s’est traduite par de graves bavures ayant entrainé des blessures importantes chez un nombre non négligeable de manifestant(e)s. Dominik Moll et Gille Marchand, coscénariste du film, ont choisi de s’intéresser au cas d’un jeune homme venu de province en famille et qui a été grièvement blessé à la tête par un tir de flash-ball. Une plainte ayant été déposée par sa mère, Stéphanie, une policière de l’IGPN, la police des polices, a été chargée de s’occuper de l’affaire et donc, de déterminer les responsabilités. Très investie dans son travail, Stéphanie cherche vraiment à retrouver le responsable ou les responsables de cette bavure, ce qui n’est pas forcément bien vu par sa hiérarchie pour qui « ce n’est pas le moment de provoquer la grogne des syndicats » et qui craint également que cela débouche sur une mauvaise image de la police donnée à l’extérieur. Grâce à des images vidéo et à un témoignage, l’enquête de Stéphanie va pouvoir avancer. Mais jusqu’où sera-t-elle autorisée à aller ? Si le cinéma n’est pas avare en films mettant en scène des policiers, on peut s’étonner que celles et ceux qu’on surnomme les bœufs-carottes, peut-être à cause de la réputation qu’ils et elles ont de laisser longuement « mijoter » les suspects, n’ont pas souvent les honneurs de l’écran, qu’il soit petit ou grand. On peut s’étonner, mais aussi le regretter, car il parait a priori passionnant de s’intéresser à ces fonctionnaires de police qui sont à la fois souvent décriés par leurs collègues qui les accusent d’être des traites et suspectés par les parties adverses de n’être là que pour étouffer les affaires mettant en cause des policiers.
Dominik Moll est un réalisateur qui prépare toujours ses films avec beaucoup de soin. C’est ainsi que pour Dossier 137, il a réussi à obtenir de vivre une immersion de quelques jours au sein de la délégation parisienne de l’IGPN, ce qui lui a permis d’observer de près tout ce que vivaient les enquêteurs, que ce soit leurs motivations, leurs méthodes de travail et les problèmes qu’ils rencontrent. De son côté, Léa Drucker, l’interprète du rôle de Stéphanie, a pu rencontrer des enquêtrices de l’IGPN ce qui lui a permis de donner une grande authenticité à son interprétation. Même si on ne peut qu’être offusqué par le comportement et les mensonges d’une paire de policiers face à Stéphanie, même si on ne peut qu’être déçu et choqué par des comportements ambigus de la part de sa hiérarchie, Dossier 137 ne peut pas être accusé d’être un film à charge contre la police, la meilleure preuve étant que le personnage principal est une policière, une policière honnête dans son travail, qui sait faire la part des choses et qui connait les difficultés du métier. Parmi ces difficultés, le film évoque le manque de formation, avec de nombreux policiers qui sont envoyés faire du maintien de l’ordre sans avoir été formés pour cela. Il évoque aussi les ordres venus d’en haut donnés aux policiers de base et le bourrage de cranes que bien souvent ils subissent, du genre : vous êtes là pour sauver la République. En fait, Dossier 137 n’est pas un film à charge contre la police mais plutôt un film dans lequel se manifeste le constat (et le regret !) d’une dérive de la police qui, petit à petit, a perdu son caractère républicain et risque, « à force de donner des excuses à ceux qui déconnent », de voir partir « les flics sérieux qui essaient de bien faire leur boulot ». Dire que Léa Drucker est excellente dans le rôle de Stéphanie serait mentir : elle est exceptionnelle !!
















