Critique Express : Reedland

0
116

Reedland

Pays-Bas, Belgique : 2025
Titre original : Rietland
Réalisation : Sven Bresser
Scénario : Sven Bresser
Interprètes : Gerrit Knobbe, Loïs Reinders, Mirthe Labree
Distribution : The Jokers Films
Durée : 1h51
Genre : Drame, Policier
Date de sortie : 3 décembre 2025

3.5/5

Synopsis : Lorsqu’il découvre le corps sans vie d’une jeune fille sur ses terres, Johan, fermier solitaire, est submergé par un étrange sentiment. Alors qu’il s’occupe de sa petite-fille, il se lance à la recherche de la vérité, déterminé à faire la lumière sur ce drame. Mais le mal se cache parfois derrière les apparences les plus ordinaires…

Si les seuls films que vous appréciez sont ceux qui débordent d’actions trépidantes, autant vous le dire tout de suite : Reedland n’est pas vraiment fait pour vous. Par contre, si vous êtes curieux de faire la connaissance d’un jeune réalisateur particulièrement prometteur, Sven Bresser, 33 ans,  dont c’est le premier long métrage et qui nous vient d’un pays, les Pays-Bas, dont la production cinématographique est loin d’être pléthorique, si un côté contemplatif n’est pas pour vous déplaire, si vous reconnaissez à un réalisateur le droit de laisser des zones d’ombre dans ce qu’il vous raconte, si vous préférez que, dans un film,  des sujets de réflexion soient discrètement glissés ici et là plutôt que brutalement assénés, si vous êtes particulièrement sensible à la qualité de l’image, alors, vous pouvez vous diriger sereinement vers Reedland, film présenté dans la sélection de la Semaine de la Critique lors du dernier Festival de Cannes, film qui représentera les Pays-Bas dans la course aux Oscars.

Johan, veuf, la bonne cinquantaine, est un fermier de la région de Weerribben-Wieden, dans la province d’Overijssel, à quelques kilomètres à l’est de l’IJsselmeer. C’est une contrée où cohabitent l’eau et la terre et c’est la dernière région des Pays-Bas où la culture des roseaux continue d’exister, malgré la concurrence de plus en plus sévère de la production qui arrive de Chine par bateau. Johan est un paysan à l’ancienne qui se refuse à utiliser des moyens mécaniques qui lui permettraient de faire des récoltes plus conséquentes mais qui détruiraient à brève échéance un sol particulièrement fragile. Sa vie est très routinière, partagée entre les travaux des champs, les soins apportés à Grise, sa jument, de furtifs moments de plaisir solitaire, et le transport scolaire qu’il assure à Dana, sa petite fille. Jusqu’au jour où, au milieu d’un champ de roseaux, Johan va découvrir le cadavre d’Elise, une jeune voisine, violée et assassinée. Johan pourrait faire un excellent suspect pour la police mais c’est plutôt le schéma tristement classique qui, dans un premier temps, est privilégié : certes, dans ce schéma, ce n’est pas depuis l’autre côté de la Méditerranée que vient le violeur, c’est plus localement depuis l’autre côté du lac, un représentant de ces Trooters qui, non contents de venir voler des terres viennent également violer nos filles. De son côté, Johan, aimerait bien poursuivre sa propre enquête mais la police locale n’apprécie pas.

Alors oui, on peut dire que Reedland est un film policier, mais c’est un film policier tout à fait à part. En fait, on sent bien que le réalisateur n’a pas du tout envie de nous désigner l’assassin d’Elise, il préfère brouiller les pistes, il préfère partager avec son compatriote le peintre Jacob van Ruisdael son goût pour les ciels dans lesquels dominent les nuages, et se ranger aux côtés  d’un autre peintre néerlandais, Armando, pseudonyme de Herman Dirk van Dodeweerd, sur la notion de « paysage coupable » suivant laquelle la nature serait indifférente à la souffrance humaine ; il préfère, associé à Sam du Pon, son Directeur de la photographie, faire preuve d’un talent certain pour scruter les visages et les mains des interprètes, il préfère se ranger auprès de Bergman dans certaines scènes et du Spielberg de Duel dans une autre scène et c’est bien pour cela qu’on apprécie son film et qu’on voit en lui un réalisateur dont on devrait reparler dans le futur. Un futur qui, on peut le regretter, pourrait l’amener à abandonner la langue néerlandaise, trop peu pratiquée dans le monde aux yeux de l’industrie cinématographique, pour passer à la langue anglaise. Dans ce cas, y retrouverons nous l’authenticité du jeu de Gerrit Knobbe, l’interprète de Johan, authentique coupeur de roseaux dans la vraie vie et débutant au cinéma ?

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici