Critique Express : The cord of life

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The cord of life 

Chine : 2025
Titre original : Qi Dai
Réalisation : Sixue Qiao
Scénario : Sixue Qiao
Interprètes : Badema, Yider, Nahia
Distribution : Éclumia Pictures
Durée : 1h36
Genre : Drame
Date de sortie : 5 novembre 2025

3.5/5

Synopsis : Alus, un jeune musicien urbain, retourne dans la steppe mongole, sa terre natale, pour accompagner sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer. Pour éviter qu’elle ne se perde, Alus est parfois contraint de l’attacher avec une corde. Ils entament ainsi un voyage à deux à la recherche d’un arbre légendaire, « yin-yang », lié à la mémoire et à l’identité.

D’après Sixue Qiao, la réalisatrice chinoise de The cord of life, elle-même originaire de la ville-préfecture de Hulunbuir en Mongolie-Intérieure, le titre original du film, en mongol, signifie littéralement « Cordon ombilical ». D’après les sites de traduction qu’on peut trouver sur le net, le titre chinois, « Qi dai », signifie « attendre avec impatience ». The cord of life, le titre anglais, dont la traduction est « la corde de vie » et qui est utilisé pour la distribution dans notre pays, s’avère très proche de « cordon ombilical » sauf qu’il s’agit ici d’un « cordon ombilical » qui fonctionne à l’inverse du cordon qui, à la naissance, relie une mère à son enfant. En effet, The cord of life relate le très fort attachement, à tous les sens du mot, d’un fils pour sa mère, une femme qui souffre d’une forme sévère d’Alzheimer. C’est au cours d’un concert se déroulant dans une grande ville chinoise, Pékin peut-être, que l’on fait connaissance avec Alus, un jeune chanteur mongol qui s’accompagne avec un « morin khuur » électrifié, cet instrument à 2 cordes de la Mongolie dont le bout du manche est  traditionnellement orné d’une tête de cheval sculptée. En plein milieu de ce concert, Alus, jetant un œil sur son smartphone, s’aperçoit que « Maman » a essayé de l’appeler. Rappelant « Maman » dès la fin du concert, il s’aperçoit que son interlocutrice semble ne pas savoir qui il est. En bon fils inquiet de l’état de sa « maman », Alus va aussitôt quitter sa vie citadine et artistique pour se rendre dans la ville de Mongolie-intérieure où sa mère loge chez le frère aîné d’Alus et son épouse. S’apercevant très vite que sa mère n’est pas particulièrement bien traitée par ce frère aîné pour qui l’Alzheimer dont elle souffre la rend ingérable, prenant conscience qu’elle aspire à rentrer chez elle, Alus va partir avec elle sur les routes des steppes mongoles en moto et side-car. Toutefois, au moins deux questions se posent : où est ce « chez-elle » où sa mère tient à se rendre ? Ne serait ce pas un arbre, ou plutôt 2 arbres, un arbre mort enlaçant un arbre vivant, peut-être les seuls arbres qu’on puisse trouver sur les steppes de Mongolie ? Et comment éviter que sa mère arrive à s’enfuir et cherche, au risque de se perdre, à retrouver seule ce « chez elle » autrement qu’en l’attachant au bout d’une code, cette « cord of life » qui donne son titre au film ? Petit à petit, cette corde très colorée qui relie Alus à sa mère va devenir une sorte de métaphore des liens rattachant Alus à sa terre d’origine, des liens qui, à part ceux entretenus au travers de la musique, étaient devenus très ténus.

Premier long métrage d’une jeune réalisatrice mongole qui a fait ses études de cinéma en France, The cord of life est un film qui, tout en adoptant la forme du « road movie », nous fait réfléchir sur la coexistence du passé et du présent, sur la tradition et la modernité. Y a-t-il un autre pays au monde où, semble-t-il, il y ait autant de différences qu’en Chine entre le monde du passé et le monde moderne ? Un monde du passé dans lequel suinte la pauvreté, un monde moderne où semble régner une certaine opulence. Lors du concert d’Alus, nombreux et nombreuses sont les spectateurs et les spectatrices qui se comportent comme partout dans le monde au 21ème siècle lors de concerts de rock, brandissant à bouts de bras leurs téléphones portables allumés. Lorsque, à la sortie de son concert, Alus traverse une rue, on aperçoit un gratte-ciel en arrière plan. A l’issue de son voyage en train, Alus arrive dans une ville dont les immeubles évoquent les années 50, une ville qu’il traverse en taxi et dans laquelle certains se déplacent à cheval. C’est encore un peu plus loin dans le temps qu’on remonte avec le logement très vieillot du frère d’Alus et de sa femme. Quant au périple entrepris par Alus et sa mère, il se déroule dans une région qui semble hors du temps : un paysage de steppe peuplé de moutons et de yourtes mais au dessus duquel peut voler un drone duquel s’échappe une voix signalant à Alus et à sa mère qu’ils sont sur une propriété privée et leur ordonnant en « evenki » de rebrousser chemin. Dans The cord of life, la musique est très intelligemment utilisée pour apporter une réflexion sur la cohabitation entre la tradition et la modernité : Alus est un chanteur et un musicien bien ancré dans le présent, mais il joue du « morin khuur », un instrument on ne peut plus traditionnel de la Mongolie mais qui, chez lui, est électrifié. Par ailleurs, il possède un matériel électronique qui permet de transformer en musique les bruits environnants. A mesure que le film avance, on oublie les quelques minutes durant lesquelles le film distille un ennui poli, et on retient la nostalgie qu’il dégage avec bonheur, donnant naissance à des moments où on se met à réfléchir aux liens qu’on a pu avoir ou qu’on a toujours avec ses parents, aux souvenirs qu’on peut avoir des endroits où on a vécu.

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