Revu sur OCS : Mission : impossible

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© 1996 Murray Close / Cruise Wagner Productions / Paramount Pictures France
Tous droits réservés

Aucun genre n’est davantage soumis au jugement impitoyable du temps que le thriller d’espionnage, qui cherche à épater son public avec les gadgets technologiques dernier cri. Ces petits détails de communication et de procuration d’informations risquent souvent de dater terriblement un film semblant encore à l’avant-garde de la modernité au moment de sa sortie. En partie, la première adaptation cinématographique de « Mission : impossible », la série à succès des années 1960, accuse le quart de siècle qu’elle aura bientôt sur le dos, avec ses réseaux archaïques juste avant la démocratisation d’internet, ses effets spéciaux plus tellement crédibles – mais au fond, la fameuse séquence de l’hélicoptère dans le tunnel sous la Manche a-t-elle pu sembler plausible à quelque moment que ce soit ?! – et son idéologie encore empreinte d’un certain état d’esprit de la Guerre froide.

Pourtant, avec le recul rétrospectif de désormais cinq suites, le film de Brian De Palma, disponible depuis aujourd’hui et pour un mois sur le replay d’OCS, se défend plus qu’honorablement, à la manière d’un James Bond ancien plus qu’acceptable, dont les morceaux de bravoure compensent largement pour un scénario avare en logique dramatique. Mission : impossible est avant tout un film qui porte fièrement l’empreinte esthétique de son réalisateur. A l’image de la plupart des films de Brian De Palma au cours de cette dernière décennie d’œuvres importantes dans une filmographie somme toute enthousiasmante, il s’agit d’un essai sur la paranoïa à la fois au niveau individuel et collectif.

Ethan Hunt, ce personnage qui allait devenir le gagne-pain insoupçonné de Tom Cruise jusqu’à ce jour, n’y était pas encore la machine à cascades spectaculaires qu’il allait devenir par la suite. A présent, l’attrait presque exclusif de chaque nouveau film devient le degré de dangerosité des exploits physiques accomplis par l’acteur, suspendu à des moyens de locomotion infiniment plus rapides qu’un banal TGV. Ce qui ne signifie guère que cet original, en quelque sorte, lui confère un arrière-plan plus recherché que les quelques traits de caractère approximatifs des héros de blockbusters hollywoodiens remontant plus loin dans le passé. La mise en scène de De Palma fait juste preuve d’assez d’élégance pour créer une multitude d’écrans de fumée derrière lesquels il peut confortablement se cacher. D’une façon bien plus efficace par ailleurs que cette relique désormais usée jusqu’à la corde des masques en caoutchouc, enlevés au moment soi-disant opportun.

© 1996 Murray Close / Cruise Wagner Productions / Paramount Pictures France
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Il n’y a en effet pas grand-chose à comprendre à ce jeu à bandes multiples, puisque l’intrigue n’ose pas vraiment s’éloigner du niveau de sophistication narrative d’un simple épisode de série télé. Ce qui compte ici, c’est par conséquent plus la forme que le fond, sans qu’on ne qualifie obligatoirement la démarche du réalisateur de platement caricaturale. Ses personnages ont ainsi beau être des stéréotypes entiers, leur interprétation arrive globalement à leur insuffler un semblant de classe internationale. Cela vaut seulement en partie pour la vedette, qui montre un investissement physique plus terre-à-terre dans le film présent, avec de la transpiration et des grimaces provoquées par un effort authentique, là où l’on ne voit dans les épisodes les plus récents de l’univers que l’arrogance aseptisée de la surenchère en termes de dépassement de soi. Et il n’y a aucune raison d’afficher une quelconque satisfaction chauvine face aux prestations assez outrancières des participants français Emmanuelle Béart et, surtout, Jean Reno.

Le contingent britannique sait mieux s’imposer en en faisant moins, le chic de Kristin Scott Thomas et de Vanessa Redgrave ne restant plus à prouver, même dans des emplois très ponctuels. Enfin, la bande originale de Danny Elfman ressemble beaucoup trop à celle de Mars attacks de Tim Burton, sorti la même année, pour prétendre prendre la relève du thème mythique signé Lalo Schifrin. C’est pourtant le seul reproche formel majeur à formuler envers un film, qui a certes pris quelques petites rides, mais dont les qualités sous la surveillance avisée de Brian De Palma restent largement d’actualité.

© 1996 Murray Close / Cruise Wagner Productions / Paramount Pictures France
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