Critique : The Master

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joaquim

afficheThe Master

États-Unis : 2012
Titre original : –
Réalisateur : Paul Thomas Anderson
Scénario : Paul Thomas Anderson
Acteurs : Joaquin Phoenix, Philip Seymour Hoffman, Amy Adams
Distribution : Metropolitan FilmExport
Durée : 2h17
Genre : Drame
Date de sortie : 09 janvier 2013

2,5/5

Après l’acclamé There will be blood, Paul Thomas Anderson revient derrière la caméra pour un film forcément très attendu avec des personnages forts et un sujet intéressant mais complexe : l’emprise mentale que certains individus peuvent avoir sur d’autres. Si le film révèle une photographie magnifique (tourné en 65 mm offrant une sursaturation pour des couleurs optimales), et se montre fascinant par instants, The Master est quand même une petite déception. Explications.

Synopsis : Freddie, un vétéran, revient en Californie après s’être battu dans le Pacifique. Alcoolique, il distille sa propre gnôle et contient difficilement la violence qu’il a en lui… Quand Freddie rencontre Lancaster Dodd – « le Maître », charismatique meneur d’un mouvement nommé la Cause, il tombe rapidement sous sa coupe…

joaquim

Une victime paumée, un traumatisme commun

The Master se présente avant tout comme un miroir de l’époque qu’il dépeint. La fin d’une guerre est toujours suivie d’une période de changements dans un pays. C’est ainsi que commence le film, au terme de la seconde guerre mondiale, voyant revenir du Pacifique myriades de jeunes gens psychologiquement détruits, totalement confus après la sauvagerie à laquelle ils ont pris part. Freddie (Joaquin Phoenix) est l’un d’eux, un soldat instable qui n’arrive pas à revenir au quotidien et se noie dans l’alcool qu’il distille tout en étant incapable de refouler ses accès de violence. Le réalisateur et scénariste a jugé bon de l’affubler de problèmes supplémentaires : un amour déçu, un père absent, une mère internée ; révélant un psyché dévasté. C’est dans ce contexte qu’il va découvrir un nouveau mouvement – La Cause – qui semble s’intéresser aux émotions humaines. Il faut dire que la période choisie par Paul Thomas Anderson est propice à cette atmosphère de recherche spirituelle : la guerre a totalement bouleversée les croyances des gens qui se cherchent de nouvelles idoles ou un nouveau sens à leur vie. Tout ce contexte social et politique qui transparaît dans le film est plutôt intéressant pour comprendre la construction mentale du personnage de Freddie et ses motivations à rejoindre la Cause. Joaquin Phoenix est totalement bluffant et compose un personnage torturé et peu recommandable. Là où le film tire sa puissance, c’est dans l’amitié qui va naître entre Freddie et Dodd, le premier devenant le cobaye des croyances et l’homme de main du second.

 

philip hoffman

Un maître et un gourou

De la fascination des deux hommes va naître une sorte de combat mental où deux personnalités vont s’opposer, donnant lieu à d’excellentes scènes de pseudo psychanalyse. Malgré les plans fixes et l’instant totalement centré sur la performance des acteurs, ces fulgurances du réalisateur sont assez brillantes. Le problème vient du fait que Paul Thomas Anderson semble tellement fantasmer sur eux qu’il focalise ses efforts sur les personnages au détriment de l’histoire en elle-même. De là une constatation malheureuse : The Master est ennuyeusement long car il ne raconte pas grand chose au final, se contentant de suivre Joaquin Phoenix et Philip Seymour Hoffman (lui-même excellent) dans leurs échanges verbeux, dans la fascination réciproque qui les caractérise. Le réalisateur livre donc un film bancal dans lequel son amour des personnages prend le pas sur tout le reste, notamment une intrigue convenable ; en cela et malgré ses qualités le film divise. De plus on a du mal à comprendre en quoi réside l’amitié ou l’affrontement des deux hommes, le caractère de leurs échanges reste vraiment obscur, si bien que l’histoire se pare d’un attrait mystique. L’alcoolisme de Joaquin Phoenix n’est jamais plus développée que cela, et la remise en cause de cette secte et ses croyances à peine évoquée au travers de deux scènes qui n’auront comme seul impact de souligner la violence de Freddie. Au-delà des performances actor studio du duo, aucun torrent émotionnel ne se dégage et on recherchera des enjeux désespérément jusqu’au bout. Les seconds rôles n’apportent strictement rien à l’histoire (le rôle de Amy Adams est assez ambiguë) si ce n’est plus de questions qu’ils n’en résolvent.

À noter le gros travail sur la bande originale, tantôt faite d’une cacophonie d’accords tantôt s’ordonnant suivant l’état mental de Freddie, le travail de Jonny Greenwood (Radiohead) est exemplaire.

 duo

 

Résumé

Le vrai problème de The Master, n’ayons pas peur des mots, c’est qu’il est ennuyeux. Paul Thomas Anderson alterne scènes formellement brillantes voire fascinantes et moments de total égarement, un peu comme s’il ne savait pas où allait son film. De fait l’intrigue est beaucoup trop lisse, plate et il ne se passe pas grand chose sur 2h20. Dommage car les acteurs sont superbes et le réalisateur toujours si intéressant.

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