Test DVD : Pulsions cannibales

0
1112

Pulsions cannibales

Italie, Espagne : 1980
Titre original : Apocalypse domani
Réalisateur : Antonio Margheriti
Scénario : Antonio Margheriti, Dardano Sacchetti
Acteurs : John Saxon, Elizabeth Turner, Giovanni Lombardo Radice
Éditeur : Le chat qui fume
Durée : 1h32
Genre : Horreur
Date de sortie cinéma : 10 novembre 1982
Date de sortie DVD : 6 décembre 2016

 

 

Lors d’un raid au Viêtnam visant à libérer des prisonniers, le capitaine Hopper (John Saxon) découvre que certains des captifs semblent atteints d’un mal étrange. De retour aux Etats-Unis, l’un d’eux s’évade de l’hôpital où il est isolé et commence à agresser des personnes en les mordant. Hopper comprend que ce vétéran a attrapé le virus cannibale et qu’une épidémie est en route. Les individus contaminés commencent à s’en prendre à la population, plongeant New York dans le chaos, la peur et la souffrance…

 

 

Le film

[4/5]

Formidable technicien, Antonio Margheriti a œuvré, au fil de ses quarante ans de carrière, dans à peu près tous les genres du cinéma d’exploitation italien : polar, horreur, fantasy, guerre, érotique, western, science-fiction… Autant de genres où le cinéaste, d’ailleurs plutôt enclin au « mélange » de plusieurs genres au sein d’un même film, nous a offert de solides séries B, avec une modestie et une générosité qui en font définitivement un des plus grands artisans du bis des années 60/70 – comme le déclare Giovanni Lombardo Radice dans un des suppléments du DVD de Pulsions cannibales, Margheriti repoussait d’un revers de la main l’appellation d’artiste, se comparant plus volontiers à un « boucher » débitant du celluloïd à la demande.

Au tournant des années 80, et alors que l’exploitation ritale était en net déclin, ce grand artisan du cinéma populaire a donc tenté, avec l’aide de son scénariste Dardano Sacchetti, le mélange hautement improbable de deux genres très en vogue à l’époque : d’un côté le film sur la guerre du Vietnam (qui pulvérisait alors le box-office mondial) et de l’autre, le film de cannibales, également dans l’air du temps après le succès du Dernier monde cannibale en 1977, et surtout de Cannibal holocaust en 1980.

« Attention, tu vas attraper le cannibalisme ! »

Le choix est donc fait, pour Pulsions cannibales, de considérer le cannibalisme comme un virus, une maladie qu’auront chopé les soldats au Vietnam, et qui se transmettra à la manière de la rage, à la moindre morsure par un infecté. Le scénario ne s’embarrasse d’ailleurs pas de longues explications à ce sujet : quand le personnage incarné par Elizabeth Turner évoque ses doutes quant à la crédibilité du pitch du film (« ce que j’ai du mal à saisir, c’est qu’un phénomène social tel que le cannibalisme puisse devenir une maladie contagieuse… »), elle s’entend simplement répondre « Par une sorte de mutation biologique, due à une altération psychique ». La caution scientifique est donc visiblement le cadet des soucis de Sacchetti et Margheriti, mais on ne leur en tiendra pas rigueur, le film s’avérant tout à fait divertissant dans son genre – et c’est bien là l’essentiel.

Porté par un John Saxon qui, à l’époque, tournait beaucoup en Italie et qui, toujours selon les dires de Giovanni Lombardo Radice, n’aimait pas le film et tournait juste pour l’argent, Pulsions cannibales s’impose néanmoins comme une bisserie absolument délectable, et assurément l’un des films dont on se souviendra dans la carrière de Saxon. En effet, il s’avère rythmé et solidement mis en scène : on sent vraiment une « vision » derrière la caméra, composant habilement les plans et plaçant d’office le film avec le haut du panier de ce qui se tournait en matière de bis au début des années 80. Proposant qui plus est quelques revirements de situations assez inattendus, Pulsions cannibales s’avère donc un véritable plaisir à suivre, malgré sa musique assez atroce et répétitive, signée Alexander Blonksteiner – cela dit, il est vrai également que cette bande originale se révèle assez entêtante, au point que l’on se surprend à la fredonner quelques heures après la fin du film (un peu comme quand quelqu’un sifflote le « petit bonhomme en mousse » à côté de vous, vous êtes bon pour le siffloter jusqu’à la fin de la journée).

En revanche, et malgré ce qu’on pourrait en déduire à la lecture de leurs titres français, on ne pourra pas réellement créer de passerelles entre Pulsions cannibales et Virus cannibale (Bruno Mattei, 1980), ce dernier étant d’avantage un classique film « de zombies » en mode nanar. Plus original, largement plus maitrisé, le film de Margheriti met en place une menace plus insidieuse, invisible, ce qui lui permettra d’ailleurs de verser dans un nihilisme tout à fait réjouissant lors de son final, qui rappellera sans doute aux amateurs de gialli celui de La baie sanglante. Pour la petite histoire, le film figurait sur la fameuse liste des  « video nasties » en Angleterre, où il fut totalement interdit. Grâce au Chat qui fume, le film débarque enfin en France, 37 ans après sa sortie en salles, en version intégrale non censurée.

 

 

Le DVD

[5/5]

On ne remerciera jamais assez Le chat qui fume, qui nous abreuve régulièrement de ces pépites du bis qui ont marqué notre enfance / adolescence et qui s’avèrent toujours, 30 à 40 ans plus tard, autant de plaisirs même pas coupables. D’autant que Pulsions cannibales est proposé dans un digipack trois volets du plus bel effet, et dans une édition 2 DVD n’ayant pas volé son appellation de « collector ». Côté galette, le film est au format 1.85 respecté, dans sa version intégrale, et le master affiche un bon état de conservation, même si, on peut le constater au visionnage, la source ne permettait probablement pas une exploitation sur format Blu-ray. Le DVD est donc la meilleure solution pour un film qui n’a finalement pas trop souffert des outrages du temps, et c’est un transfert assez irréprochable que nous propose aujourd’hui l’éditeur français. Côté son, VF d’époque (le doublage du flic incarné par Wallace Wilkinson n’est pas piqué des hannetons !) et VO sont proposées dans des mixages Dolby Digital 2.0 d’origine, la VF souffrant d’un peu plus de souffle que son équivalent anglais.

Côté suppléments, la première galette nous proposera de découvrir un entretien avec Edoardo Margheriti, fils du réalisateur, qui évoque le tournage du film, alléguant notamment que son père était beaucoup plus intéressé par la partie aventures / action du film que par les effets « gore ». On se plongera ensuite dans un entretien avec Giovanni Lombardo Radice, qui s’exprime dans un français un peu rouillé, mais s’avère toujours compréhensible. Il balance quelques anecdotes assez amusantes sur Margheriti et sur le tournage de Pulsions cannibales. Le premier DVD comporte également une série de bandes-annonces, mais le « gros » morceau de cette édition se trouve en fait sur le deuxième DVD, avec le documentaire The Outsider – Le cinéma d’Antonio Margheriti (59 minutes), présenté par Edoardo Margheriti lui-même, qui y expose sa note d’intention. Passionnant, ce doc propose notamment de voir et écouter des entretiens avec Margheriti lui-même, mais également avec Franco Nero, Richard Harrison, William Lustig, Frank Pesce, Dardano Sacchetti, Fred Williamson et bien d’autres… Un véritable régal, contenant des extraits et trailers de films rares que l’on aimerait vraiment découvrir. Une édition à nouveau au top pour Le chat qui fume. On en miaulerait de plaisir ! (ah ben dis donc elle est bonne celle-là).

 

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici