Critique : Max mon amour

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Max mon amour

France, 1986
Titre original : –
Réalisateur : Nagisa Oshima
Scénario : Nagisa Oshima et Jean-Claude Carrière, d’après une idée de Jean-Claude Carrière
Acteurs : Charlotte Rampling, Anthony Higgins, Victoria Abril
Distribution : Acteurs Auteurs Associés
Durée : 1h37
Genre : Satire
Date de sortie : 22 octobre 1986

Note : 2,5/5

La subversion sulfureuse se manifeste exclusivement dans la prémisse de ce film faussement iconoclaste. Une femme qui tombe amoureuse d’un singe, au point de le préférer à son mari, qui est à son tour assez téméraire pour accepter cette concurrence à la fois animale et déloyale dans le foyer familial : il y aurait eu de quoi en faire une satire cinglante sur l’hypocrisie des mœurs, si seulement le scénariste Jean-Claude Carrière avait encore pu faire équipe avec son trublion de collaborateur Luis Buñuel. Puisque le maître de la provocation filmique n’était déjà plus de ce monde au milieu des années 1980, Carrière a dû se rabattre sur un autre cynique invétéré en la personne de Nagisa Oshima, lors de l’un de ses très rares films coupés complètement de la sphère japonaise. Le résultat est bien trop sage pour défrayer encore la chronique de nos jours. Même à l’époque, pareille entorse aux conventions sexuelles n’a pas non plus dû faire trop de vagues, vu comment le récit tourne obstinément autour du pot, sans jamais vraiment oser choquer le spectateur.

Synopsis : L’ambassadeur britannique à Paris Peter Jones s’inquiète des absences répétées et inexpliquées de sa femme Margaret. Il engage un détective privé qui lui apprend que son épouse passe tous les après-midi dans un petit appartement qu’elle a loué, mais dont jamais personne d’autre qu’elle n’est sorti. Convaincu que sa femme a un amant, Peter se rend dans la garçonnière afin de la surprendre en flagrant délit d’adultère. Quelle est alors sa surprise, quand il la trouve nue dans les bras de Max, un chimpanzé. Margaret affirme avoir des rapports sexuels et romantiques avec l’animal et ne pas vouloir s’en séparer, quitte à mettre en danger sa vie de famille. Son mari insiste, afin de mieux surveiller et comprendre cette affaire extra-conjugale, pour que Max vienne habiter dans l’appartement que le couple partage avec leur fils Nelson.

Un cheval qui tombe amoureux d’un cerisier

Le voyeurisme, suggéré symboliquement dès le générique de Maurice Binder et son motif du trou de la serrure, s’articule d’une manière trop tortueuse et timide dans Max mon amour pour en faire réellement un film osé. Le récit souffre d’entrée de jeu d’une erreur de conception, à cause du point de vue qui est essentiellement celui – passablement machiste et peu compréhensif – de l’homme, au détriment d’une perspective féminine moins attachée à l’attribution classique des rôles dans les jeux érotiques. L’enjeu principal de l’intrigue se laisse résumer en effet au lent processus d’acceptation du mari de l’aventure inorthodoxe de sa femme, sans que cette dernière n’ait vraiment son mot à dire. Ce drôle de ménage à trois n’est ainsi analysé qu’à travers les inquiétudes de Peter. Celles-ci ne sont pas tant alimentées par la peur des éventuels commérages, mais elles ne servent pas non plus de prétexte habile à une mise en question approfondie de l’image de l’homme dans une société où tous les écarts de conduite paraissent possibles. La narration plutôt maladroite n’arrive pas à dissiper tout à fait le soupçon que cette farce inoffensive n’a d’autre vocation que de titiller un peu la bienséance, passant en même temps à côté de la véritable portée sociale du sujet, qu’il aurait été infiniment plus passionnant d’explorer.

Chacun cherche son singe

Pendant que ce pauvre notable diplomatique tente de se débarrasser de ses appréhensions et de son spleen typiquement britanniques, nous passons donc notre temps à regretter les occasions ratées par la mise en scène et le scénario de rendre irrésistible cette histoire de plus en plus tirée par les cheveux. Les incongruités s’amoncellent hélas au fur et à mesure que l’histoire progresse, dont la plus ahurissante reste tout de même la descente des Champs-Elysées parmi la foule en liesse parce que Max a trouvé refuge sur le toit du 4×4 familial ! Le défilé de personnages secondaires pas moins bizarres, mais tout aussi peu percutants, nous réserve au moins la surprise de croiser des acteurs comme Victoria Abril ou Fabrice Luchini vers le début de leurs carrières respectives. Quant à la divine Charlotte Rampling, elle dégage certes son habituelle aura mi-glaciale, mi-énigmatique, mais la narration ne semble point savoir en tirer profit au-delà de quelques poses superficielles. Cette indécision est d’autant plus enrageante que la comédienne a su montrer depuis grâce à ses magnifiques rôles de vieillesse qu’elle sait aisément incarner des femmes plus complexes que son personnage dans le cas présent, une maîtresse maternelle assise entre deux espèces.

Conclusion

La réputation scandaleuse qui le précède nous paraît sensiblement plus vive que ce film en lui-même. Les implications morales et sociales de son point de départ prometteur y sont traitées avec un minimum d’imagination et de panache sur l’arrière-plan du cinéma des années ’80, souvent décrié à raison pour la vacuité de sa forme et de son fond.

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