Critique : Ben-Hur (Timur Bekmambetov)

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Ben-Hur

Etats-Unis, 2016
Titre original : Ben-Hur
Réalisateur : Timur Bekmambetov
Scénario : Keith R. Clarke & John Ridley, d’après le roman de Lew Wallace
Acteurs : Jack Huston, Toby Kebbell, Rodrigo Santoro, Morgan Freeman
Distribution : Paramount Pictures France
Durée : 2h03
Genre : Péplum
Date de sortie : 7 septembre 2016

Note : 2/5

Chaque époque a le Ben-Hur qu’elle mérite ! Certes, l’histoire d’un prince juif qui jure vengeance pour sauver in extremis son âme grâce au message altruiste du Christ n’a nullement marqué l’Histoire, ni d’un point de vue culturel, ni en s’inscrivant d’une façon indélébile dans les annales du cinéma. Mais il reste néanmoins quelque chose d’emblématique dans chacune des incarnations filmiques du roman de Lew Wallace, qui avait déjà dû paraître antique quand il a vu pour la première fois la lumière des projecteurs en 1925 à travers la version muette de Fred Niblo. Quant à l’épopée de William Wyler, sorti en 1959, on s’en souvient surtout parce qu’il détient à ce jour le record, désormais partagé à trois, de la récolte la plus impressionnante d’Oscars, au nombre d’onze. Pareil exploit n’est pas du tout à la portée du film de Timur Bekmambetov, un remake de plus pour assouvir la soif mercantile de Hollywood, qui manque d’envergure, de souffle épique et de noblesse, bref, qui fait sincèrement pitié à côté des fresques surdimensionnées qui chantaient jadis les louanges d’un héros, dégradé ici au rang de fantoche sans charisme.

Synopsis : En l’an 25 de notre ère, le prince Judah Ben-Hur et son frère adoptif Messala Severus se défient en toute complicité dans des compétitions hardies. L’orphelin romain préfère pourtant tourner le dos à sa famille d’accueil, afin de faire ses preuves en tant que soldat dans l’armée impériale. Trois ans plus tard, l’occupation de la ville de Jérusalem par les troupes romaines devient de plus en plus insoutenable. Judah espère alors que le climat insurrectionnel se calmera, grâce au retour de Messala en tant que tribun de la cité. Quand le préfet Ponce Pilate fait son entrée triomphale en Judée, il est la cible d’un attentat qui le rate de peu. Accusé d’être le complice du crime, Judah est condamné aux galères, pendant que sa mère et sa sœur doivent être crucifiées. Après cinq ans de travaux forcés, il réussit à s’échapper et jure de venger les siens auprès de Messala.

Un tour de piste de trop

Il n’y en a que pour la course des chariots ! Alors que la longue séquence de l’affrontement des deux adversaires dans l’arène était la pièce de résistance des deux films précédents, elle prend carrément une allure de raison d’être principale, voire exclusive dans ce Ben-Hur-ci. Le premier indice qui ne trompe pas est forcément le pré-générique. Les concurrents s’y mettent en place avant le coup d’envoi, auquel succède un retour en arrière à une époque, où la compétition sportive entre Judah et Messala était encore marquée par une complicité fraternelle. Cette dernière va connaître une dégradation progressive, aussi prévisible qu’ennuyeuse, jusqu’au rendez-vous fatidique, à l’issue potentiellement mortelle pour l’un d’entre eux. Hélas, le moment tant attendu s’avère décevant, moins à cause des prouesses techniques employées pour rendre le spectacle le plus immersif possible, mais parce que cette séquence-clef souffre des mêmes faiblesses formelles que le film dans son ensemble.

La Bible sous format aseptisé

Car la surcharge esthétique qui rendait les films précédents du réalisateur soit envoûtants, dans le cas de Day watch, soit déroutants dans celui de Abraham Lincoln Chasseur de vampires, a rétréci à présent comme une peau de chagrin d’ineptie narrative. C’est bien simple, aucun plan de cette épopée au rythme vite essoufflé n’aspire à une quelconque beauté plastique. La caméra sans cesse engagée dans un mouvement nerveux et le montage désordonné se chargent au contraire de faire en sorte que le ton du film reste au stade embryonnaire d’une aventure trop frileuse et écartelée pour réellement prendre son envol. La durée ramassée du film contribue de surcroît à faire passer en revue, sans le moindre approfondissement, les thématiques plus existentielles de l’histoire. La sensation désagréable d’une structure narrative en mode d’accélération constante se solde donc malheureusement par une surchauffe généralisée. La première victime en est l’interprétation, au mieux transparente comme celle de Jack Huston, petit-fils de John Huston et très, très loin de l’intensité pleine de noblesse de Charlton Heston, au pire atrocement poussive comme le jeu de Toby Kebbell, qui exprime mal le caractère tiraillé entre deux cultures de son personnage, gratifié en plus d’un sursis risiblement consensuel.

Conclusion

Personne n’attendait vraiment un remake de Ben-Hur, qui s’était tranquillement fondu dans l’arrière-plan de l’Histoire du cinéma, plus d’un demi-siècle après sa dernière version prestigieuse. Celle de Timur Bekmambetov est, quant à elle, atrocement bancale, sans tête, ni queue, et – pire encore – en panne d’un style personnel, susceptible d’adapter cette intrigue archaïque de façon percutante à notre époque moderne.

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