Critique : Qu’Allah bénisse la France

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Qu'Allah bénisse la France afficheQu’Allah bénisse la France

France, 2014
Titre original :  –
Réalisateur : Abd Al Malik
Scénario : Abd Al Malik
Acteurs :  Marc Zinga, Sabrina Ouazani, Mireille Perrier
Distribution : Ad Vitam
Durée : 1h36
Genre : comédie dramatique
Date de sortie : 10 décembre 2014

Note : 2.5/5

En 2004, le rappeur Abd Al Malik avait écrit un roman autobiographique ayant pour titre « Qu’Allah bénisse la France ». A cette époque, il n’avait pas en tête d’en faire en film. 10 ans après, Abd Al Malik a pris conscience qu’il pouvait être salutaire de porter ce livre au cinéma, le résultat escompté étant une œuvre qui prendrait la suite de La Haine, le film de Mathieu Kassovitz. Abd Al Malik avait beaucoup apprécié ce film lors de sa sortie en 1995, mais, depuis, la problématique religieuse a pris une importance dans les cités qu’elle n’avait pas à l’époque. C’est Mathieu Kassovitz qui a incité Abd Al Malik à se lancer dans la réalisation de cette adaptation.

 

Synopsis :  Adapté du livre autobiographique de Abd Al Malik, QU’ALLAH BENISSE LA FRANCE raconte le parcours de Régis, enfant d’immigrés, noir, surdoué, élevé par sa mère catholique avec ses deux frères, dans une cité de Strasbourg. Entre délinquance, rap et islam, il va découvrir l’amour et trouver sa voie.

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Des jeunes d’une cité

 Qu’Allah bénisse la France raconte l’histoire de Régis, un jeune d’origine congolaise vivant dans une cité de la banlieue de Strasbourg et se partageant entre études brillantes, délinquance et rap. Lui et ses deux frères sont élevés par une mère catholique, très fière des résultats scolaires de Régis. Il faut dire qu’il est particulièrement doué pour la philosophie et la littérature au point de se voir diriger vers une classe d’hypokhâgne. Toutefois, le vrai rêve de Régis, c’est le rap. Problème : que faire lorsque vous habitez dans une cité, que vous avez monté un groupe de rap et que vous avez besoin d’argent pour acheter du matos et réaliser une maquette ? J’en entends qui murmurent le mot délinquance et d’autres qui sont très heureux de le crier très fort. Eh bien oui, Régis et son environnement entrent en délinquance, d’abord petitement avec des vols de sacs à main, puis en passant à un étage plus conséquent avec le trafic de drogue. Dans ce contexte, quel effet peut avoir sur Régis sa conversion à l’islam ? Quel effet peut avoir sur Régis le fait de tomber amoureux de Nawel, une jolie voisine d’origine maghrébine ?

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Une sincérité maladroite

 Tout au long du film, on sent beaucoup de sincérité dans la description que nous fait Abd Al Malik de la cité de sa jeunesse et de sa bande de copains. Toutefois, cette sincérité n’est pas exempte de maladresse car ce que l’on voit durant la plus grande partie du film ne peut que renforcer les thèses d’un Zemmour ou d’une Le Pen. Dans la mesure où on peut penser que ce n’était pas là le but du réalisateur, c’est qu’il y a un problème ! En fait, en voulant nous montrer la cité de l’intérieur, Abd Al Malik reste trop concentré sur un petit monde fermé et n’arrive pas à placer ces problèmes de banlieue dans un contexte plus large, un contexte qui prendrait en compte davantage d’interactions entre cité et extérieur de la cité. Il y a bien la relation avec l’école pour aller dans ce sens mais elle n’est pas suffisamment approfondie dans la mesure où, par exemple, le spectateur peut s’étonner des résultats brillants obtenus par un élève qu’ils ne voient jamais travailler. La maladresse d‘Abd Al Malik va même se nicher dans ce qui peut apparaître comme des détails mais qui sont loin d’en être. Par exemple, lorsqu’on entend un homme proférer une phrase très gênante par son côté trop général. « Tu as eu la chance de rencontrer l’islam avant de rencontrer les musulmans » : « avant de rencontrer les islamistes » eut été plus heureux ! Heureusement, il y a aussi quelques trouvailles de bon aloi, comme la visite de Régis et de sa mère au lycée ou comme le clin d’œil aux Beatles lorsqu’on voit les quatre membres du groupe emprunter l’un derrière l’autre un passage zébré à un carrefour.

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Un beau noir et blanc

 Dès le début, il était évident pour Abd Al Malik que son film serait tourné en noir et blanc. Comme La Haine ! C’est d’ailleurs Pierre Aïm, le Directeur de la photographie de La Haine, qu’on retrouve ici derrière la caméra et on ne peut qu’admirer le résultat. Pour interpréter le rôle du réalisateur, il fallait quelqu’un qui puisse interpréter du rap. Une recherche difficile jusqu’à ce que le réalisateur tombe sur Marc Zinga, comédien de cinéma et de théâtre tout en étant musicien. A part lui, on ne trouve que deux professionnels dans la distribution, deux femmes en l’occurrence : Sabrina Ouazani qui interprète Nawel, la jeune fille dont Régis / Abd Al Malik va tomber amoureux et la trop rare Mireille Perrier qui joue le rôle de la professeur qui le pousse à poursuivre ses études. Le reste de la distribution, ce sont pour la plupart des jeunes de la cité du Neuhof, celle qui a vu grandir Abd Al Malik, celle dans laquelle il est allé tourner son film.

Conclusion

On est forcé de regretter qu’un film aussi sincère souffre d’une réalisation souvent brouillonne et maladroite. On peut toutefois penser qu’Abd Al Malik, dont la polyvalence n’est plus à démontrer, saura corriger ces défauts s’il se lance dans une nouvelle réalisation cinématographique.

 

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