Jane Campion, Présidente du Jury du 67e Festival de Cannes

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 » Je suis née en Nouvelle-Zélande, je ne suis pas spécialement férue de poésie et vouloir illustrer au cinéma un tel vertige de sentiments est délicat. Pourtant, à l’heure d’Internet et de Facebook, que recherchent des millions de gens à travers le monde ? Le besoin du contact, l’amitié, l’amour, le grand frisson. Rien n’a changé. « 

Jane Campion en 2009 à Cannes pour présenter Bright Star (© AFP)
Jane Campion en 2009 à Cannes pour présenter Bright Star (© AFP)

Un parcours cannois unique

L’an dernier la réalisatrice Jane Campion était déjà à la fête à Cannes. Elle présidait le jury des courts-métrages qui a primé Safe du coréen Moon Byoung-gon et de la Cinéfondation qui a honoré et recevait le Carrosse d’or dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs. Elle revient cette année pour présidera le jury officiel qui choisira la Palme d’or 2014. Elle succède dans cette fonction à Steven Spielberg. La 67ème édition du Festival de Cannes aura lieu du 14 au 25 mai 2014.

Jane Campion est non seulement la seule femme à avoir remporté une Palme d’or mais en a même reçu deux, même si ce n’est que rarement rappelé. Elle est ainsi la seule à avoir remporté une Palme pour un court-métrage puis une autre pour un long. Elle remporte la Palme d’or du court pour sa première invitation cannoise avec Peel en 1986. Un chef d’oeuvre du genre, inoubliable, tendre et colérique qui la révéla aux yeux de la planète cinéphile. Elle remporte la Palme d’or du long-métrage en 1993 avec un autre chef d’oeuvre, La Leçon de Piano, une oeuvre troublante, érotique, sensuelle, une captation unique de la passion viscérale et du pouvoir de destruction du désir. Un film à la force visuelle impressionnante grâce au chef-opérateur Stuart Dryburg, sur des notes de Michael Nyman dont son inoubliable arabesque en quelques notes de piano magiques, parmi les plus belles de la musique contemporaine. L’interprétation de Holly Hunter est magistrale, justement récompensée à Cannes puis aux Oscars. Ses partenaires n’étaient pas moins éblouissants : Anna Paquin, oscar du second rôle et qui n’a jamais déçu depuis, Harvey Keitel en homme des cavernes mélomane et Sam Neill en mari trop sage.

Elle a également réalisé Sweetie, rare premier long métrage à avoir été en compétition au Festival, Un ange à ma table, grand prix du jury à Venise en 1990 qui révéla Kerry Fox, Holy Smoke avec Kate Winslet, Portrait de femme avec Nicole Kidman, In the Cut avec Meg Ryan et Bright Star, biographie romancée du poète Keats et de sa muse jouée par Abbie Cornish et présenté en Compétition à Cannes en 2009 puis cité au César du film étranger. On lui doit aussi le magnifique téléfilm Two Friends qui fut présenté dans le cadre de la sélection Un Certain Regard la même année que Peel et qui raconte l’histoire d’une amitié, en commençant par la fin pour revenir à son point culminant. Une remontée dans le temps comme l’on en vit plus tard avec Irréversible de Gaspar Noe ou Memento de Christopher Nolan. Le point commun de ses films, aux registres et aux styles variés sont des portraits de femmes inoubliables qui affrontent leurs désirs et la sexualité de façon très libre, souvent dans un cadre tragique. Jane Campion vient à nouveau de tourner pour la télévision avec la minisérie Top of the Lake, coréalisée avec Garth Davis et où elle dirige Elisabeth Moss et Peter Mullan et met une nouvelle fois en scène ses thèmes de prédilection autour de la nature sauvage et du coeur humain, qui ne l’est pas moins.

Jane Campion à la Quinzaine des Réalisateurs en 2013
Jane Campion à la Quinzaine des Réalisateurs en 2013

Premières réactions

À l’occasion de l’annonce de sa sélection comme Présidente du Jury 2014, la réalisatrice née en 1954 a déclaré : « Je suis venue à Cannes pour la première fois en 1986 et depuis, mon admiration pour la reine des manifestations de cinéma n’a fait que grandir. Le glamour et le professionnel s’y marient de façon unique. C’est le pays des stars, des fêtes, des plages et du business mais on ne perd jamais de vue ce qu’est le festival : une célébration du cinéma comme Art et une célébration du cinéma du monde entier. C’est la passion qui rend Cannes incontestable, poursuit Jane Campion. C’est un lieu mythique et surprenant où des acteurs se révèlent, des films trouvent leurs producteurs et des carrières démarrent. Je le sais : ça m’est arrivé ! C’est un grand honneur pour moi que d’avoir été choisie pour être la Présidente du Jury, conclut Jane Campion. Et, pour dire la vérité : je suis très impatiente ! »

Gilles Jacob, toujours président du Festival malgré certains appétits peu discrets et peu élégants, a salué ainsi ce choix marqué du sceau de la cinéphilie et de l’affection : « Il était une fois une jeune réalisatrice inconnue venue des antipodes qui aurait été fière que le Festival de Cannes présentât un des trois courts-métrages qu’elle venait d’achever. Ils affirmaient déjà une telle vaillance, une telle humanité, un tel univers que se refusant de choisir, le Festival montra les trois d’un coup [NDLA : les deux autres étant Passionless Moments et A Girl’s Own Story] – car c’en était un. Jane Campion était née. Et un style avec elle. Ensuite ce furent Sweetie, La Leçon de piano ou récemment Bright Star, ce merveilleux film où la poésie circule comme jamais. Etonnez-vous après tant d’émotions que je l’appelle ma Lady Jane. »

Thierry Frémaux ajoute : « C’est une grande fierté que Jane Campion ait accepté. Après Michèle Morgan, Jeanne Moreau [NDLA : à deux reprises], Françoise Sagan, Isabelle Adjani, Liv Ullmann et Isabelle Huppert en 2009, elle complète la liste prestigieuse des Présidentes de Jury NDLA : sans oublier Olivia de Havilland, Sophia Loren et Ingrid Bergman]. Originaire d’un pays et d’un continent où le cinéma est rare et puissant, elle fait partie de ces cinéastes qui incarnent à la perfection l’idée qu’on peut faire du cinéma en artiste et séduire un public planétaire. Et nous savons que son exigence personnelle sera aussi celle de son jury. »

Jane Campion est la première artiste originaire d’Océanie à présider le Festival de Cannes.

Jane Campion (à droite) avec ses actrices Geneviève Lemon et Karen Colston le 17 Mai 1989 à Cannes pour la présentation du film Sweetie (AFP)
Jane Campion (à droite) avec ses actrices Geneviève Lemon et Karen Colston le 17 Mai 1989 à Cannes pour la présentation du film Sweetie (AFP)

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