Critique : Truman

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Truman

truman afficheEspagne, Argentine : 2015
Titre original : –
Réalisateur : Cesc Gay
Scénario : Cesc Gay, Tomas Aragay
Acteurs : Ricardo Darin, Javier Cámara, Dolores Fonzi
Distribution : La Belle Company
Durée : 1h48
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 6 juillet 2016


Note : 4.5/5

A bientôt 50 ans, le réalisateur catalan Cesc Gay ne jouit pas d’une grande notoriété dans notre pays. Six longs métrages de cinéma avaient précédé Truman, mais seuls deux d’entre eux, Krampack, en 2001, et Les Hommes ! De quoi parlent-ils ?, en 2014, avaient eu droit à une sortie en salles dans notre pays. Arrive 2015 : Truman commence sa tournée des Festivals par celui de Toronto, le 12 septembre. A partir de cette date, une ribambelle de nominations et de récompenses pleuvent sur le film dans des festivals dans le monde entier. Truman sort en Espagne le 30 octobre et, le 6 février 2016, il récolte 5 parmi les plus prestigieux Goyas (l’équivalent espagnol des Oscars et des Césars) : meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario original, meilleur acteur principal, meilleur acteur pour un second rôle. Excusez du peu ! Un espoir : qu’en France, le succès de ce film soit à la hauteur de ses qualités.

 

Synopsis : Julian, un madrilène, reçoit la visite inattendue de son ami Tomas qui vit au Canada. Ils sont loin de se douter qu’ils vont passer avec Truman, le chien fidèle de Julian, des moments émouvants et surprenants…

 

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La force de l’amitié face à l’inéluctable

Julian et Tomas étaient les meilleurs amis du monde. Toutefois, depuis plusieurs années, l’Océan Atlantique les sépare, Julian étant parti vivre au Canada alors que Tomas est resté à Madrid. Lorsque Julian apprend que Tomas est très sérieusement malade, il n’hésite pas : il abandonne femme et enfants pour quelques jours, des jours qu’il va passer auprès de son ami. A son arrivée, il trouve un homme qui a décidé d’arrêter son traitement contre le cancer, un homme qui n’a pas peur de la mort et qui a décidé de l’affronter dans la dignité, un homme dont le principal souci semble être de laisser son chien Truman dans de bonnes mains. En traversant l’Atlantique, Julian pensait qu’il allait faire son devoir d’ami en venant s’occuper d’un malade. Il va, durant les quelques jours passés avec Tomas, faire beaucoup plus que cela : il va l’aider à remonter dans ses souvenirs, familiaux ou professionnels, à reprendre contact avec son fils qui vit à Amsterdam, à trouver une solution pour le chien Truman. Ils vont parfois rire ensemble, ils vont parfois sombrer dans l’émotion. En résumé, Julian va aider Tomas dans une période qui fait partie de la vie, une période qui n’est pas la plus facile mais qui se vit mieux lorsqu’elle est abordée dans la sérénité et non dans la panique : la préparation à sa propre mort.

 

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Courage et talent

Il faut du courage et beaucoup de talent pour proposer un film qui ne soit pas morbide, un film qui s’apparente même souvent à une comédie en s’attaquant au sujet que traite Truman : la préparation à la mort d’un homme atteint d’un très grave cancer et qui a décidé d’arrêter son traitement, considérant que s’acharner à prolonger de quelques mois sa propre vie n’était pas le meilleur choix. Comme Nanni Moretti décidant que Mia Madre serait son prochain film en perdant sa mère alors qu’il travaillait au montage d’Habemus Papam, Cesc Gay a commencé à travailler sur Truman pendant la réalisation de son film précédent, Les Hommes ! De quoi parlent-ils ? Il venait de faire face à la maladie et au décès de sa mère et il souhaitait, en partageant de façon tendre et drôle l’expérience qu’il avait vécue, aider les spectateurs à s’interroger sur leur manière de faire face à la mort. C’est ainsi qu’un film qui aurait pu être glauque ou larmoyant est devenu lumineux, touchant, parfois comique et, osons le dire, optimiste.

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Ils sont exceptionnels !

Partir sur la réalisation d’un film avec un scénario solide et de bonnes intentions constitue un bon début, encore faut-il pouvoir disposer des comédiens adéquats, d’autant plus lorsque les rôles qu’on va leur faire jouer sont éminemment complexes. Pour interpréter Tomas et Julian, Cesc Gay n’a pas eu à faire de très longues recherches : commençant à travailler sur Truman alors qu’il tournait Les Hommes ! De quoi parlent-ils ? dont les têtes d’affiche étaient Ricardo Darin et Javier Cámara, il a tout de suite pensé à eux pour jouer Tomas et Julian et ils ont immédiatement accepté. Au travers de films comme Dans ses yeux, Carancho, Elefante Bianco ou Les Nouveaux sauvages, on commence à bien connaître les très grandes qualités de comédien de l’argentin Ricardo Darin. Dans Truman, une fois de plus, il est exceptionnel de justesse, que ce soit dans le domaine de l‘émotion que dans celui de la comédie. Le comédien espagnol Javier Cámara, l’interprète de Julian, est surtout connu pour son interprétation du rôle de l’infirmier Benigno dans Parle avec elle de Pedro Almodovar. Loin d’être écrasé par son prestigieux partenaire, il fait preuve lui aussi d’une très grande authenticité dans un rôle peut-être encore plus complexe que celui de Tomas, surtout parce que, aux registres de l’émotion et de la comédie, s’ajoute le fait d’être désarçonné, dès son arrivée à Madrid, par la décision de son ami. A leur côté, on retrouve, entre autres, l’actrice argentine Dolores Fonzi dont on avait pu récemment admirer le grand talent dans Paulina : elle interprète ici le rôle de Paula, une cousine de Tomas qui n’apprécie pas le choix qu’il a fait face à sa maladie. Quant à Nico, le fils que Tomas et Julian vont visiter à Amsterdam, son rôle est interprété par Oriol Pla, un jeune comédien dont l’avenir s’avère prometteur.

 

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Conclusion

Grâce à son approche pleine de franchise, grâce à l’absence totale de pathos, grâce à l’humour qui irradie son film, grâce à la justesse et la subtilité de sa réalisation, grâce à la présence de deux comédiens au sommet de leur art, Cesc Gay gratifie les spectateurs d’un film qui ne peut que les marquer profondément, de façon positive, pas seulement durant les 108 minutes de la projection mais, peut-être, tout au long de leur vie, que ce soit de façon consciente ou inconsciente.

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